Les années 50...
Mon histoire commence en Janvier 1951… je gigote, suis pressé d’arriver, vite vite, place, j’ai rendez-vous…
Ça y est, je suis dans la place, je pousse bien, mais ça a failli mal se finir, un jour d’été mon futur papa rentre en sang, accident de scooter, grosse frayeur de maman
Mais, voilà le 09 Octobre 1951, ET est né ! t’as de beaux, non, gros yeux tu sais… et de superbes oreilles en parabole

Chapitre un : mes problèmes
Maman me les scotche le soir en espérant un miracle…
Pas grave ça, ce dont je me souviens le plus c’est cette fenêtre trop claire, éblouissante, où je ne vois que des ombres genre X-Files, on habitait Schiltigheim juste à côté de la voie ferrée, au grand malheur de maman, toujours de la poussière grise partout, oui de ce temps là les locos marchaient au charbon !
Mais j’anticipe, donc ma fenêtre et mes ombres commencent à inquiéter… on va de docteur en professeur, personne ne veut prendre la responsabilité de m’opérer, de toute façon c’est foutu !
Miracle, si, il y en a un qui veut tenter l’expérience… glaucome à gauche, cataracte à droite, nerf optique coincé, aïe ça s’annonce mal
Je débarque donc à la clinique ophtalmo de l’Hôpital Civil par un beau matin, avec mon nounours sous le bras, et ça commence
Je le souviens encore de ce gros projecteur au dessus de moi (toujours X-Files) puis l’odeur de l’éther… Zzzzzz Je me réveille avec des coquilles en fer sur les yeux (vous vous rappelez Costa Gavras, l’Aveu ?) bon, tout se passe finalement assez bien, à droite c’est foutu (on m’a enlevé le cristallin) mais à gauche ça peut aller (pupille tirée vers le haut du plus bel effet)…
Plusieurs séjours seront nécessaires, je suis la mascotte et me fais des copines, une petite infirmière genre bonne sœur en costume d’époque et son aquarium avec 3 petits poissons rouges qui s’emmerdent un peu, je me balade partout, suis souvent aux cuisines et cherche ce que je veux, la cave à « lithinée » (eau gazeuse au goût particulier) j’ai trouvé
Juillet août infernal, fait chaud, je nourris les pigeons sur le bord de la fenêtre de ma chambre d’hôpital et vais dans la salle des pensionnaires qui sent le tabac froid et les jeux de cartes me servent à construire des châteaux, le Professeur est au Brésil pour une conférence et je dois attendre pour une nouvelle opération
Bon ça se finit tout ça, je suis obligé de boire un truc rose infect qui retourne et bouffe l’estomac trois fois par jour, les gouttes « bêta-bloquants » n’existaient pas encore…
Maman me conduit régulièrement à l’hosto pour le suivi jusqu’à mes 12 ans où je dois m’y rendre seul et là je me défile !
Autre petit problème bien embêtant celui là, qui durera longtemps… une incontinence nocturne sévère… les chutes du Niagara me réveillent souvent… euhhh, trop tard !
Chapitre deux : mes premières aventures
Alors là, je me souviens encore des trains dont j’avais parlé, avec un copain de mes 5/6 ans on passait notre temps à rester le plus longtemps possible sur les rails en regardant la loco arriver… chiche que je me dégonfle pas ! un jour trop pressé de déguerpir je finis sous une voiture… ouf, rien ! les parents n’en sauront jamais rien
Puis d’autres souvenirs du rail, les locos à vapeur qui passaient sous le pont et en sortant, grooos dégagement de fumée blanche (oui blanche) gros brouillard trop drôle
L’hiver aussi, de folles descentes en luge sur les talus du quartier, puis Papa qui tirait deux traineaux derrière sa Vespa 125cc, souvenirs émouvants sauf le jour bien plus tard où j’ai voulu le démarrer tout seul le machin, il s’est cabré comme un cheval en furie, papa a bien ri, avant de voir son scoot cabossé
Que d’autres souvenirs de cette époque ? si, j’avais une petite copine juste de l’autre côté de la route, on jouait bien ensemble dans la cage d’escalier, puis un jour on nous a séparé, je n’ai jamais su pourquoi
Aussi nos jeux avec ma grande (!) soeur, il y avait un très long couloir, on y tirait au fusil à fléchettes sur la porte du fond, de l’autre côté du couloir la salle à manger, on regardait par le trou de la serrure pour apercevoir le sapin de Noël, la porte était soigneusement fermée à clé
Un dernier souvenir, les odeurs… Schiltigheim, citée de brasseurs donc odeur de malt, de houblon, et Neudorf ou habitait ma grand’mère, là c’était la levure « Falla » qui embaumait tout
Grand’mère on y allait tout seuls les mercredis comme des grands, en Tramway… elle avait la Tv noir et blanc elle ! Zorro, Rintintin, Aigle noir et j’en passe, mon premier aperçu d’Elvis dans « âge tendre et tête de bois » je crois… souvent on devait partir avant la fin, Tram oblige
Ne surtout pas oublier le grand gros carnaval « Bim Bam » ça c’était quelque chose de grandiose !
Chapitre trois : on déménage
Bye Schiltigheim, on va habiter un beau pavillon tout neuf à Eckbolsheim
L’école communale, mon enthousiasme bien modéré, les douches hebdo dans les sous sols de l’école, l’école des filles de l’autre côté de la route, toute une époque, bon les filles c’était pas encore mon soucis !
J’avais un bon copain, Martin , on allait souvent aux étangs, on étalait les roseaux pour faire une belle plateforme étendue de deux mètres au moins sur l’eau, on « fumait » des roseaux, et on allait sur la barque de pêcheur à fond plat typique de l’Alsace jusqu’au jour où on a plongé !!! punaise on savait pas nager mais quand même assez près du bord pour s’en sortir, tout trempé on va à la décharge publique où on essaye de se sécher autour des grands feux, puis retour penaud à la maison… maman ne dit pas un mot et AU LIT !
Les premières années se passent bien tranquille jusqu’à u fameux mois d’Août 58, le gros épisode de grêle… la fin du monde, un ciel noir et jaune, pas de vent et soudain ça tombe dru, des œufs de pigeon comme on dit, gros comme un poing, ça tape, ça casse tout, notre belle « Traction 15 » cabossée dans le garage, les grelons passaient par le soupirail, plus une tuile sur le toit, les volets en bois sont percés, un bruit d’enfer, on a bien peur… puis ça empire, la pluie tombe à verse… le grenier est envahi, papa doit casser les murs du haut pour laisser l’eau sortir, on en a déjà 5cm sur le parquet des chambres, on installe une bâche gouttière pour faire passer l’eau du grenier à la cave, sacrée nuit
Par la suite c’est la course aux tuiles, mettre un fourneau dans le couloir pour sécher les murs, la maison était pratiquement neuve, maman démarre une méningite qui la suivra toute sa vie
Nous jeunes on oublie vite et on s’amuse à nouveau, la mode était au boomerang, au révolver à capsules et plus tard au couteau à lancer (bien 15/20cm) qui s’achetait librement en ville au magasin Wery
Chapitre quatre : mes belles vacances dans les Vosges
Là ma vie commence, ce sera toujours inoubliable… grand’mère et grand’père, une petite chaumière (Melker Hutt), une grange, une étable, une petite maisonnette où logeait le gardien de troupeau dans le temps, pas d’électricité, éclairage à la lampe à gaz (vous savez, le petit chausson en toile qui brulait pas je sais toujours pas pourquoi), chauffage assuré par le poêle/cuisinière en pierre, pas de frigo, pas d’eau courante, l’eau vient d’une source (très froide) où il fallait se laver le matin, et un gros abreuvoir en bois (on y conservait les aliments, les dates de péremption ça n’existait pas encore), camion de ravitaillement tous les quinze jours, wc dehors dans un réduit en tôle, araignées au choix, je dormais sous le toit, à l’arrivée il fallait d’abord enlever les nids de guêpes (travail de grand’père) petit cornets en papier et zou au feu… « La Zone »
Pas de voiture chez les grand parents, on y allait en autorail jusqu’à Metzeral, puis souvent montée de nuit à la lampe de poche, pas de piles là, un genre de dynamo qu’on actionnait avec une languette, lumière assez chiche dans les grands sapins, mais même pas peur ! en arrivant au bout d’une heure de marche t’avais plus de pouce
Mais un décors, je vous dit pas… la nuit sans aucune pollution lumineuse, un ciel étoilé comme jamais j’ai revu, une vue de la Voie Lactée inoubliable, on voyait passer le fameux Spoutnik, les étoiles filantes, pour un peu je couchais dehors, le matin p’tit déj café au lait saucisse à tartiner au son des cloches de vaches du mont d’à côté (le Schnepfenried), un pur rêve ! si je ne mentionnais pas les chevreuils qui venaient le soir lécher le gros cube de sel qu’on mettait en bas de la maison, je passe par le brame de cerf, le renard qu’on nourrissait, le matin ramassage des souris piégées, non je n’exagère en rien !
Tous les matins ou presque j’allais rendre visite à mon nid de fourmis, 1m de haut, pareil à la base… petit asticotage avec une branchette, destroy destroy puis cavale courageuse à toutes jambes quand ça sortait dru en grandes vagues noires, le lendemain inspection, elles avaient tout remis en ordre
La cueillette des champignons (girolles, pieds de moutons, trompettes de la mort, cèpes, tout ce qu’on peut désirer), le lait à chercher tôt le matin (tout seul svpl à 10km travers la forêt) un bon morceau de munster avec du lait en récompense
Lors de ces cueillettes on trouvait plein de restes de la grande et terrible bataille du « Sillacker Wase » d’énormes trous d’obus et des tranchées, grenades, barbelés, douilles d’obus en cuivre qui finissaient en bouillottes, j’ai même débusqué un fusil « Lebel » qui avait été trouvé par le marcaire du temps, visite régulière au cimetière Allemand avant d’aller au Gashney
Puis venaient les foins avec Fanny le cheval, trois jours de boulot, les orvets qu’on ramassait en pagaille, les sauterelles énormes comme la main, les nids de guêpes dans le sol aussi et pas des petits le draps de lit qu’on mettait à blanchir au soleil sur les prés fauchés, les roulades dans l’herbe à en avoir la nausée, l’odeur d’écorce de sapin fraichement coupés (on en faisait des bateaux) et enfin nos belles virées au lac du Schissrothried, les vaches auxquelles il fallait laisser le passage, de bien belles aventures, eau un peu froide mais on avait pas peur, plein de tétards et de grenouilles dont les cuisses finissaient à la casserole pour aller là-bas, passage par des champs de fougères plus hautes que moi et le soir inspection générale de tiques !
Avec grand’père, nos grandes virées, marcheur du Club Vosgien infatigable, on montait aux Spitzkoeffes (passage très dangereux par le couloir des moraines au dessus du lac du Fischboedle), le Kastelberg puis arrivée au Hohneck, au Markstein,le col de la Schlucht, il n’arrêtait jamais, là j’aiappris la marche à la boussole, pas un cadeau, c’était tout droit sur l’objectif quels que soient les obstacles, montées rudes, descentes de ravines, contournements…
J’ai failli oublier les mégas cerf-volants que l’on fabriquait vers le mois de Septembre, 50/100m de corde et hop dans le vent, on y faisait monter des ronds de bière en messagerie
Chapitre cinq : Petit aparté douloureux
Ce ne serai pas honnête de ne pas le citer, ma rencontre avec un pédophile !!! eh oui, à presque 10 ans !!! épisode triste mais qui m’a ouvert malgrés moi à la sexualité…un vrai prédateur, il m’a suivi toute le journée lors de cette marche en groupe, force démonstrations de préservatifs, de discours sur ses séjours en piscines, moi je faisais semblent de comprendre…le coin dans la forêt il l’avait bien choisi et le connaissait surement déjà, heureusement pour moi il n’a pas été très loin dans ses avances, le soir en partant une pièce de 5 francs glissée pour que je ne dises rien…passons vite et pourtant je n’ai jamais oublié
Voilà c'est sur cet épisode un peu scabreux que je vais achever cette décennie, la prochaine sera bien plus Rock’n Roll
