L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcteur)
- Sisyphe
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L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcteur)
Ca y est, ils y sont arrivé ! À force de supprimer des postes :
http://www.liberation.fr/societe/010123 ... ns-le-vide
3000 copies de philo dans les trois académies de la région parisienne ("PVC" = Paris-Versailles-Créteil) n'ont aucun correcteur pour cette session.
Et pourtant, les recteurs de PVC ont fait appel au ban et à l'arrière-ban : non seulement les profs de terminale en postes, mais aussi les profs de prépa (qui n'ont pas vu un élève "normal" de lycée depuis vingt ans, et qui ont l'habitude de mettre 3,5/20 a un copie parce qu'elle ne fait "que" dix pages) et même les retraités.
À ma connaissance, c'est la première fois dans ces proportions en deux cents ans de baccalauréat.
Les profs de philo ont toujous été moins nombreux que les autres (ils n'enseignent qu'en terminale), et c'est pourquoi on commence par leur épreuve. Mais la situation présente est le résultats de deux facteurs :
- De moins en moins de profs dans l'absolu : je n'ai plus qu'un seul collègue, qui fait les cinq classes et vingt-et-une heures de cours (contre 18 en théorie). Pour ainsi dire plus du tout de remplaçants (qui formaient autrefois le "tampon" des correcteurs suppléants). Et plus en plus de vacataires (engagés directement par le lycée), qui ne peuvent statutairement pas corriger un examen national.
- Une folie sans nom lancée par un précédent ministre, appelée "reconquête du mois de juin". Partant de l'idée que les profs de lycée sont des feignasses parce qu'ils arrêtaient les cours dès le 1er juin, on est donc supposé tout faire en même temps : cours, surveillances, corrections. Il était même question un temps, pour que les secondes aient cours jusqu'au 1er juillet, de libérer les salles en faisant passer les écrits d'examen dans les gymnases ( super-simple à surveiller, "et si on n'en a pas ? - vous pouvez aussi utiliser les salles de réunion", moi je propose l'écrit de sciences-nat dans les toilettes des garçons, et dans le bureau de ma chef, il y a la place de caser douze ou quinze candidats en se serrant : l'option allemand lourd, en plus c'est des maigrichons en général ). Bref : comme l'opinion publique n'admettrait pas qu'on décale trop les résultats du sacro-saint baccalauréat, on se trouve avec des délais de correction de plus en plus réduits.
Fut un temps où les correcteurs avaient cinq semaines, ils ont aujourd'hui 14 jours francs de correction, en comptant les samedis et les dimanches. À 45 minutes par copie, 130 copies de série générale, ça fait presque 100 heures de correction, 7 heures de correction non stop tous les jours pendant les 14 jours, samedi et dimanche compris.
Plutôt que de disserter éternellement du contrôle continu ou pas, des coeff et des cumuls d'options, je propose désormais le baccalauréat stochastique : vous passez toutes les épreuves (dans le frigo de la cantine), et on vous en corrige deux au hasard...
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3000 copies de philo dans les trois académies de la région parisienne ("PVC" = Paris-Versailles-Créteil) n'ont aucun correcteur pour cette session.
Et pourtant, les recteurs de PVC ont fait appel au ban et à l'arrière-ban : non seulement les profs de terminale en postes, mais aussi les profs de prépa (qui n'ont pas vu un élève "normal" de lycée depuis vingt ans, et qui ont l'habitude de mettre 3,5/20 a un copie parce qu'elle ne fait "que" dix pages) et même les retraités.
À ma connaissance, c'est la première fois dans ces proportions en deux cents ans de baccalauréat.
Les profs de philo ont toujous été moins nombreux que les autres (ils n'enseignent qu'en terminale), et c'est pourquoi on commence par leur épreuve. Mais la situation présente est le résultats de deux facteurs :
- De moins en moins de profs dans l'absolu : je n'ai plus qu'un seul collègue, qui fait les cinq classes et vingt-et-une heures de cours (contre 18 en théorie). Pour ainsi dire plus du tout de remplaçants (qui formaient autrefois le "tampon" des correcteurs suppléants). Et plus en plus de vacataires (engagés directement par le lycée), qui ne peuvent statutairement pas corriger un examen national.
- Une folie sans nom lancée par un précédent ministre, appelée "reconquête du mois de juin". Partant de l'idée que les profs de lycée sont des feignasses parce qu'ils arrêtaient les cours dès le 1er juin, on est donc supposé tout faire en même temps : cours, surveillances, corrections. Il était même question un temps, pour que les secondes aient cours jusqu'au 1er juillet, de libérer les salles en faisant passer les écrits d'examen dans les gymnases ( super-simple à surveiller, "et si on n'en a pas ? - vous pouvez aussi utiliser les salles de réunion", moi je propose l'écrit de sciences-nat dans les toilettes des garçons, et dans le bureau de ma chef, il y a la place de caser douze ou quinze candidats en se serrant : l'option allemand lourd, en plus c'est des maigrichons en général ). Bref : comme l'opinion publique n'admettrait pas qu'on décale trop les résultats du sacro-saint baccalauréat, on se trouve avec des délais de correction de plus en plus réduits.
Fut un temps où les correcteurs avaient cinq semaines, ils ont aujourd'hui 14 jours francs de correction, en comptant les samedis et les dimanches. À 45 minutes par copie, 130 copies de série générale, ça fait presque 100 heures de correction, 7 heures de correction non stop tous les jours pendant les 14 jours, samedi et dimanche compris.
Plutôt que de disserter éternellement du contrôle continu ou pas, des coeff et des cumuls d'options, je propose désormais le baccalauréat stochastique : vous passez toutes les épreuves (dans le frigo de la cantine), et on vous en corrige deux au hasard...
La plupart des occasions des troubles du monde sont grammairiennes (Montaigne, II.12)
Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
Du grand art !
Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
Et aloooooors, il va se passer quoi ? Quel suspense !
Reconnaissez que sans les suppressions de postes, on n'aurait jamais eu un feuilleton aussi haletant au sujet de la philo !*
(*ceci est de l'humour, au cas où ce ne serait pas clair)
Par contre, sérieusement, les gymnases, c'est quoi le problème ? Moi j'ai passé des partiels dans un gymnase, ça avait l'air de se passer très bien, et du point de vue de l'étudiant, je dirais même que c'était beaucoup plus pratique.
Reconnaissez que sans les suppressions de postes, on n'aurait jamais eu un feuilleton aussi haletant au sujet de la philo !*
(*ceci est de l'humour, au cas où ce ne serait pas clair)
Par contre, sérieusement, les gymnases, c'est quoi le problème ? Moi j'ai passé des partiels dans un gymnase, ça avait l'air de se passer très bien, et du point de vue de l'étudiant, je dirais même que c'était beaucoup plus pratique.
Sonka - Сонька
I'm a father and I am a son but I don't know how to tell them that I have come undone
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Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
Et maintenant, une fuite avant l'épreuve reine, les maths en série S !
http://www.ouest-france.fr/actu/actuDet ... 4_actu.Htm
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Penn ar Bed
The end of the land
Le commencement d'un monde
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Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
Moins rare à la limite.Maïwenn wrote:Et maintenant, une fuite avant l'épreuve reine, les maths en série S !
http://www.ouest-france.fr/actu/actuDet ... 4_actu.Htm
Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
L'auteur de la fuite va vite être retrouvé... Ça m'étonnerait fortement qu'il ait pensé à brouiller son point de connexion puisqu'il n'a même pas enlevé les informations EXIF du cliché qu'il a mis en ligne.
Je viens d'y trouver le modèle du téléphone employé ainsi que l'heure et la date de prise de vue.
Je viens d'y trouver le modèle du téléphone employé ainsi que l'heure et la date de prise de vue.
Les courses hippiques, lorsqu'elles s'y frottent.
Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
chépa comment t'as fait, mais je n'arrive pas à mettre la main sur l'image...
A+ les cactus !
A izza i ana sacranou
Askaratni kaasoun kaasoun khalidah
Ana mal' anou bihoubbinn raasikhinn
Lan yatroukani abada...
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Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
http://s3.noelshack.com/upload/16974989 ... 111817.jpgiubito wrote:chépa comment t'as fait, mais je n'arrive pas à mettre la main sur l'image...
Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
Selon Numerama, les données EXIF liées à l'image indiquent que la photographie aurait été prise le 11 juin 2011, à 18h17, avec un BlackBerry 8520.
Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
suffit d'afficher les propriétés du fichier, si tu l'as téléchargékokoyaya wrote:Selon Numerama, les données EXIF liées à l'image indiquent que la photographie aurait été prise le 11 juin 2011, à 18h17, avec un BlackBerry 8520.
Les courses hippiques, lorsqu'elles s'y frottent.
Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
Oui, c'est vrai. On peut même dire que la photo a été prise sans flash avec une exposition de 1/-2147483648 s
- Sisyphe
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Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
On se croirait dans Les ExpertsKokoyaya wrote:Oui, c'est vrai. On peut même dire que la photo a été prise sans flash avec une exposition de 1/-2147483648 s
*
Pas si courante que ça, en réalité. Le bac est un miracle annuel. Mais chacun se rappellera du précédent de 1982, où un certain Xavier Darcos, plus tard ministre de l'éduc' nat', avait fait fuiter un sujet de français. Enfin bon, son précédesseur immédiat (et de notoriété publique, ennemi intime), lui, séchait carrément ses cours. On en arrive presque à pardonner ceux qui ne sont qu'incompétents.kokoyaya wrote:Moins rare à la limite.Maïwenn wrote:Et maintenant, une fuite avant l'épreuve reine, les maths en série S !
http://www.ouest-france.fr/actu/actuDet ... 4_actu.Htm
Quant on connaît le système de l'intérieur, les fuites sont très peu probables. Le circuit du sujet est le suivant :
- Conception par une commission d'une dizaine de personnes. Être sélectionné est déjà un privilège (qui normalement "accélère" une carrière), fuiter revient au suicide, même si le "cas Darcos" est un contre-exemple.
- Imprimerie nationale. Ses employés sont l'élite du monde de l'imprimerie et la sécurité du site est très lourde.
- Transports. Quiconque s'est un jour acharné à tenter de décachetter un sujet pour le distribuer sait qu'il est impossible de "jeter un coup d'oeil" et de remettre le paquet en l'état (j'y apporte chaque année une paire de ciseaux spéciaux, et il me faut à chaque fois trois bonnes minutes : l'espèce de matière plastique noire collante et fondue pourrait servir d'isolant thermique à une navette spatiale).
- Stockage dans les lycées. Du moment où les sujets sont reçus et entreposés, le proviseur ne dort plus, il y joue sa carrière et même son emploi. Mon chef récupère à ce moment-là les quatre clefs de la salle-forte, normalement en possession des deux adjoints et de la secrétaire. Et quand les sujets sont en cours de livraison, le couloir même est interdit.
Le seul point vraiment faible, c'est quand le sujet "sort" du système :
- Les établissements privés hors contrats, autrement dit les "boites à bac", dont le personnel ne dépend pas de l'EN. Depuis quelques années, certains sont autorisés à être centre d'examen, et il y a quelques années (je suis supris que la presse ne s'en souvienne pas), il y avait eu un soupçon de fuite dans l'un d'entre eux. Ses membres demeurent exposés au pénal, bien sûr, mais non au disciplinaire. Or la charge de la preuve est beaucoup plus lourde dans le premier. D'où la tentation, d'autant que ces usines recrutent uniquement sur le taux de réussite, et certains petits machins vivent d'un équilibre financier précaire (des "lycées" de cinquante élèves !).
- Le moment de latence entre l'impression et le cachetage. A supposé qu'il ait fallu transporter des feuilles d'un coin à l'autre de l'imprimerie, de la zone "sécurisée" à la zone normale...
- Plus probable : une erreur lors d'une distribution. Le mauvais sujet est ouvert lors d'une épreuve antérieure (d'autant plus facilement que, pour faire des économies de bout de chandelle minables, les rectorats n'assignent plus les sujet par salle : jusqu'a il y a peu, le lot ZDSFLJ4005 qui devait être ouvert dans la salle 134, où siègent 31 candidats, comportait 31+2 sujets ; aujourd'hui les lots sont standardisés, et on est parfois obligé d'aller chercher le complément dans la salle d'à-côté). Bref : on s'en rend compte au moment de distribuer, mais un surveillant au moins a le temps de prendre une photo.
Là encore : il y a quinze ans, la situation aurait été gérable, les candidats auraient replanché. Mais le stakhanovisme du ministère - la "reconquête du mois de juin" des profs qui foutent rien - fait qu'il n'y a plus une seule journée de disponible, même en faisant abstraction du problème des corrections !
La solution adoptée (neutraliser la question, i.e. 4 points sur 20 sur une épreuve coeff 7/9) est ignoble pour les candidats ; moi je passe des heures à expliquer à mes secondes comment organiser son travail en fonction du barème. Certains vont y jouer des mentions, et en série S, ce n'est pas un détail.
La plupart des occasions des troubles du monde sont grammairiennes (Montaigne, II.12)
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Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
Un petit commentaire monsieur Cabrel ?
Et ça continue encore et encore
C'est que le début, d'accord, d'accord
http://www.ouest-france.fr/actu/actuDet ... 8_actu.Htm
Et ça continue encore et encore
C'est que le début, d'accord, d'accord
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Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
D'après un reportage diffusé hier soir, il y aurait une dizaine de personnes au maximum qui auraient accès aux sujets. Es-tu en mesure de confirmer, nuancer ?Sisyphe wrote:Quant on connaît le système de l'intérieur, les fuites sont très peu probables.
Ensuite, je pense qu'il y a une bonne conclusion sur le lien que donne Maï :
(ironie activée) Mais... Dans un certain sens, si le public qui profite des fuites est plus large aujourd'hui que hier, l'égalité des chances n'est-elle justement pas moins bousculée ?La sacrosainte confidentialité du bacho a donc du plomb dans l'aile. D'autant plus avec les nouvelles technologies. Des fuites existaient sans doute déjà, mais elles n'étaient pas diffusées à grande échelle comme c'est le cas aujourd'hui.
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Re: L'existence (de la copie) précède l'essence (du correcte
Si on en croit cet article, les trois mis en examen (c'est le cas de le dire ) bosseraient dans l'informatique. Pas doués quand même...