Pourquoi "ribosomique" et pas "ribosomal" ?

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aymeric
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Pourquoi "ribosomique" et pas "ribosomal" ?

Post by aymeric »

Bonjour,

Je faisais une recherche sur le 'ribosomal RNA' qui est traduit sur Wikipédia par 'ARN ribosomique', avec la précision : "ribosomal est un anglicisme".
Voilà donc ma question : pourquoi dit-on ribosomique en français et pas ribosomal ? pourquoi dit-on 'maximal', 'minimal' et pas 'maximique, minimique' ?

Merci.
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Sisyphe
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Re: Pourquoi "ribosomique" et pas "ribosomal" ?

Post by Sisyphe »

:) Alors :

- -alis est un suffixe d'adjectif qui n'existe qu'en latin. On dit déjà maximalis en latin, donc le mot emprunté est maximal
- En revanche, le grec comme le latin ont un suffixe d'adjectif en -ikos/-icus, quoique beaucoup plus productif en grec qu'en latin ; mais en même temps (comme dirait l'autre), les Latins déjà avaient emprunté pas mal de mots scientifiques (< scientificus, adjectif purement latin) au grec, en profitant du fait que le suffixe était lisible dans les deux langues.
- Dans certains cas, les deux suffixations ont pu cohabiter : philosophicus vs philosophalis, d'où une pensée philosophique, mais une pierre philosophale, un tribunal rabbinique (là c'est hébreu -> grec -> latin -> français) mais une autorité rabbinale.
- Quant aux mots modernes de la sciences modernes, là, c'est une pure question de hasard et de qui l'a forgé ou employé en premier. En l'occurrence, rhibosomique est un poil plus logique puisque le mot est sur une racine grecque.

- Au passage, les Anglo-saxons, dans leur grande perversion du monde, ont encore compliqué les choses d'un degré en combinant les deux dans le suffixe -ical (philosophical), sans éliminer les deux premiers. Je connais au moins une thèse sur l'opposition entre -ic et -ical, il paraît qu'en observant bien et au microscope, on trouverait vaguement une logique tendancielle les jours de pluie.

But that seems to me both too specific and too specifical...
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Beaumont
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Re: Pourquoi "ribosomique" et pas "ribosomal" ?

Post by Beaumont »

:jap:
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aymeric
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Re: Pourquoi "ribosomique" et pas "ribosomal" ?

Post by aymeric »

Merci Sysiphe ! J'en retiens donc que les deux formes sont quand même acceptables (car malgré le purisme de l'auteur de cet article sur Wikipédia, on trouve pas mal de résultats pour "ARN ribosomal" sur Internet).
Je trouve que le problème se pose beaucoup en biochimie. Je reste par exemple perplexe face au fait qu'on parle de déShydrogénases, mais de déhydroacétate (sans le S) par exemple. Un coup c'est du français, un coup c'est de l'anglais francisé...
- Au passage, les Anglo-saxons, dans leur grande perversion du monde, ont encore compliqué les choses d'un degré en combinant les deux dans le suffixe -ical (philosophical), sans éliminer les deux premiers. Je connais au moins une thèse sur l'opposition entre -ic et -ical, il paraît qu'en observant bien et au microscope, on trouverait vaguement une logique tendancielle les jours de pluie.
Je ne connais que la nuance entre historic (dans le sens de "qui restera/est resté dans les annales") et historical (généralement relatif à l'histoire). Je ne savais pas qu'il y en avait entre les autres paires, si ce n'est la consonance vaguement plus scientifique du -ic...
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Sisyphe
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Re: Pourquoi "ribosomique" et pas "ribosomal" ?

Post by Sisyphe »

Cf. https://www.englishpractice.com/words/a ... s-ic-ical/

:) On arrive bien à expliquer quelques vagues tendances (j'ai toujours senti -ic comme plus "relationnel" : economic theory et -ical comme plus "qualifiant" : this car is more economical), ça marche aussi pour comic/comical, mais on arrive toujours à trouver des exceptions, et historic / historical en est précisément une.



Pour ceux qui voudraient un peu de science et de linguistique à la fois :
Opinions regarding the use of the –ic and –ical word endings are varied and conflicting, and this issue has been hotly debated in linguistics and lexicology (Kaunisto, 2007). In 1969, the linguist Hans Marchand promoted the use of the shorter ‘-ic’ form, stating that this form was more closely linked to the root meaning of the word because it is a derivative of the noun form, whereas the ‘-ical’ form is more loosely related because it is a derivative of the adjectival form and thus more general. The 18th century linguist James Elphinston argued that the ‘-ic’ form was used more for “solemn” subjects and the ‘-ical’ form, for more “familiar” subjects. This led Marchand to comment that the ‘-ic’ form is more common in science due to its conciseness. That is, “the scholar uses the unextended forms much more, as for him the quality expressed by the adjective is more directly and intimately connected with the thing to which it [the word] is applied than it is for a non-scientist” (as cited in Kaunisto 2007 p.25).
https://www.scitechedit.com/en-GB/helpf ... ic-or-ical

*

Quant aux "anglicismes francisés", c'est une plaie dans toutes les sciences (en linguistique, on a droit à des "efficiences béhabitives de relevances argumentales en clauses de requêtes séquentiales..."). Cela dit, le problème est à deux niveaux : 1) La connaissance réelle des règles d'anglicisation des racines grecques par les scientifiques anglo-saxons (j'ai tendance à penser qu'elle est meilleure chez les Britanniques, qui font encore du grec dans leurs public schools, que chez les Ricains), 2) La connaissance réelle et du grec et des règles de francisation de ses racines par les traducteurs scientifiques et 3) le fait que les traducteurs soient réellement des scientifiques ou du moins aient une culture scientifique de base ce qui - mais tu dois le savoir mieux que moi - n'est pas du tout une évidence.

Le pire, ce sont les (pseudo-)psy aux études approximatives qui tapent "[le mot que je veux] en grec" sur internet et font des mots monstrueux. Je veux bien qu'il y ait un mot pour désigner la peur panique des chats, mais si le chat se dit ailouros* en grec (qui désigne aussi la belette et divers ratiers), alors le mot devrait être élurophobe en français, et pas aïlourophobe comme je l'ai lu dans le tram récemment. :evil:

Ailouros et non pas airoulos comme je l'avais écrit (αἴλουρος)...
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