Petit jeu d'écriture. A la manière de... la 4ème dimension.

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Geache
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Post by Geache »

5ème texte. Signé Miguel.
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kyliane
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Post by kyliane »

Geache wrote:5ème texte. Signé Miguel.
Cool!!! :)
vallisoletano
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Post by vallisoletano »

kyliane wrote:
Geache wrote:5ème texte. Signé Miguel.
Cool!!! :)
ne te réjouis pas trop vite ... :lol:
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Geache
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Post by Geache »

Clôture de ce petit jeu dans peu de temps... Plus d'amateurs ?
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moonila
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Post by moonila »

Hum, je pense que je ne vais pas participer à celui la de jeu, car j'ai pas le temps d'écrire quoi que ce soit en dehors de ce que je fais à la fac :( mais bon, je me console en me disant que je pourrais lire la prose des autres participants :loljump:
Pixel
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Post by Pixel »

moonila wrote:Hum, je pense que je ne vais pas participer à celui la de jeu, car j'ai pas le temps d'écrire quoi que ce soit en dehors de ce que je fais à la fac :( mais bon, je me console en me disant que je pourrais lire la prose des autres participants :loljump:
De même... :cry:
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Geache
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Post by Geache »

On se rapproche de la fin. 5 textes, à ce jour.
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Geache
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Post by Geache »

Le texte de BloodBrother :

Une sonnerie retentit soudain et martela mon pauvre crâne endormi avec insistance . Tandis que je sortais de ma torpeur matinale, je maudissais l'odieux responsable de mon état léthargique.Non, ce n'était pas mon réveille-matin mais bel et bien ce soi-disant ami que je haïssais à ce moment-là car ce dernier voulait absolument que je lui envoie son colis ce matin alors que j'avais l'habitude de faire la grasse matinée le mercredi.Après avoir pris ma douche,m'être habillé et avoir enfourné quelques biscottes dans mon gosier desseché je me précipitais vers ma voiture, toujours de mauvaise humeur.Une fois arrivé à la poste, l'éternel rituel m'attendait, c'est-à-dire deux guichets ouverts et les trois autres fermés pour une raison qui demeure toujours inconnue.Je fus donc obligé d'attendre un bon quart d'heure, le temps d'enrager enncore plus dans une file d'attente dont l'âge moyen devait dépasser les soixante ans.Alors que des insultes vociféraient dans ma tête à propos du troisième âge et de leur emploi du temps plutôt léger leur permettant de venir plus tard, je serrais fortement ce fichu colis qui était la source de mes malheurs.Quand vint mon tour, ce fut alors un soulagement que seules les femmes enceintes doivent éprouver à la fin d'un long et pénible accouchement.C'est donc dans un état quasi-euphorique que je me présentais devant l'employé avec mon maudit paquet dans les bras.Ce dernier,apparement très confiant dans son humour me sourit béatement en me disant "Bonjour,monsieur.....votre colis, c'est pour envoyer?" Je le fixai tandis qu'il continuait "enfin je veux dire.....à quelqu'un ?"
Ma première envie fut de rentrer dans son jeu et de lui expliquer que demain c'était mon anniversaire et que je voulais
m'envoyer un cadeau mais qu'il ne fallait surtout pas qu'il m'en parle car c'était une surprise.Mais finalement je me résolus à
acquiescer avec fatalité en me disant qu'il y a des jours comme cela,où tout va mal.Je lui tendais donc mon colis afin qu'il le tamponne

Au moment où le fonctionnaire rabattait son tampon, un hurlement d'une rare intensité parcourut mes tympans.C'était comme le cri d'une bête inconnue qui résonnait dans ma tête et me faisait peu à peu perdre connaissance.Ce son venait de l'intérieur, et donc contrairement à mon réveil électronique, était impossible à arrêter de quelque manière que ce fût.Au fur et et à mesure que mes forces me quittaient, le son se fit plus doux et fini par disparaître .Je flottais à présent dans les ténèbres,bercé par un océan de vide.
Dépourvu de mon corps et de mes sens, je ne ressentais les choses qu'à travers mon esprit.Cela n'avait rien de désagréable car se libèrer d'une prison qu'est le corps était très enivrant, tel un oiseau découvrant la liberté en sortant de sa cage.Je commençais vraiment à apprécier cette sensation et n'avait aucune idée du temps qu'il faudrait pour recouvrer mes esprits et mon enveloppe charnelle.Je pensais seulement que j'étais en train de faire un rêve délicieux et que cela n'aurait qu'un temps.Puis je me mis à percevoir mon corps, mais contrairement à ce que je pensais il s'éloignait de plus en plus.Dépourvu de tout liberté de mouvement je ne pus rien faire pour l'empêcher de partir.C'est alors que le doute commençait à m'envahir, reverrais-je un jour ma véritable apparence ?M'étais-je fait berner par une illusion de bien-être qui m'avait éloigné de la réalité ?

Un mouvement brusque me tira de ma réflexion.L'univers dans lequel j'érrais bougeait, et j'étais incapable de contrôler ni ce qui m'entourait ni ma propre existence.Je n'étais qu'une marionnette à qui l'on pouvait faire ce que l'on voulait.Ah je le savais que je n'aurai pas dû me lever ce matin.Mon instinct m'avait pourtant prévenu de ne pas me réveiller pour aller à la poste déposer ce foutu colis .Ca m'apprendra à rendre service à un ami .A présent les tremblements avait cessé.Peut-être étais-je mort après tout.Oui c'était sûrement cela j'ai dû avoir une attaque à la poste et c'est pour cela que j'ai quitté mon corps tout à l'heure.C'est incroyable, je suis en train de faire une experience unique : je sais à présent ce qu'il y après la mort du corps.L'esprit reste donc vivant et erre dans les cieux.Mais non ,c'est étrange,les cieux auraient été d'une lumière éclatante et là il fait sombre.Alors je vais en enfer c'est cela ? Mais qu'ai-je fait de mal ? Penser du mal des vieilles personnes méritait-il un tel châtiment ?Car auparavant jamais je n'ai eu de vilaines pensées à l'égard de personnes....à part certains professeurs mais dans ce cas l'enfer serait plein à craquer d'étudiants.Tiens voilà que je deviens plus léger maintenant, j'ai l'impression de m'élever....Aïe !!! mais qu'est ce qu'il se passe ? je viens d'être violemmennt reposé par......terre ? Ainsi donc il y a un sol ....Donc je ne suis pas aux cieux c'est une certitude.Allons bon voila que de nouveau une entité inconnue me manipule dans tous les sens.Ah si j'avais mon corps !
C'est humiliant de se sentir dirigé,dépendant d'une force que l'on ne voit même pas et dont il ne sort aucun son.

Depuis combien de temps suis-je ici ?On perd toute notion de temps lorsque l'on est dépourvu de ses sens et il n'y a guère que les arbres qui savent ce que je ressens actuellement.Aucun être ne sait quelle détresse l'on éprouve, l'on tremble déja rien qu'à l'idée de perdre la vue ou l'usage de ses jambes.Alors tout un corps.....

Mais pourquoi est-ce arrivé ? et pourquoi est-ce tombé sur moi ? D'habitude j'ai plutôt de la chance aux jeux de hasard.Et puis surtout d'autres le méritent largement plus que moi d'être dans cet état.Tiens à commencer par mon soi-disant ami qui voulait que je lui envoie ce maudit paquet.Franchement il aurait pû patienter plus longtemps parce qu c'est vraiment avec ce qu'il contient que.......Tiens mais au fait que contient-il ?Impossible que j'ai oublié une chose si essentielle ....non je deviens fou, je ne sais même plus ce que contient le colis que je devais expédier.Allez,il faut que je fasse un effort, je sais que mon ami tenait beaucoup à ce qu'il y avait dedans mais je n'arrive plus à me souvenir pourquoi.Il était très pressé et m'a demandé de l'envoyer très rapidement,c'est donc que ça doit lui manquer beaucoup .Nous étions vraiment très proches.Je l'ai connu dés les premières classes.On faisait toujours nos bêtises ensemble hahaha sacré.....heu... non je n'ai quand même pas oublié son prénom .Si il s'appelait ....je ne me souviens plus.C'est incroyable, une personne que je connais depuis toujours et dont je ne rappelle même plus le nom.Et s'il n'y avait que ça je viens de me rendre compte que je n'ai plus en tête sont visages..Dans mes souvenirs sa tête a ....disparu.C'est sans doute l'environnement dans lequel j'erre qui efface peu à peu mon passé car c'est la seule chose à présent qui me sépare de la folie.

Eh mais que se passe-t-il encore ? J'ai l'impression de retrouver mes sens.Oui c'est bien cela, je perçois quelques rayons de lumière et j'entends une voix .Tiens elle me rappelle quelqu'un.Oui je connais cette personne.Mais quel est ce bruit horrible ? On dirait un déchirement , des froissements de papiers qui bourdonnent dans mes oreilles .Tiens une forme s'approche, on dirait un visage,mais je connais cette personne,c'est.......

Ah qui a sonné ??? j'avais pourtant juré de faire la grasees matinée ce jeudi matin.J'avais mis le réveil à 11heures et voilà qu'on me réveille à 10 heures 15.Bon si c'est un mormon ou un vendeur de calendriers ça va barder."Bonjour monsieur,c'est le facteur,.J'ai un colis pour vous".Tiens chic ça la journée commence pas si mal,on a pensé à mon anniversaire."Merci monsieur, bonne journée et au revoir"Bon alors voyons voir ce qu'on m'a offert de beau.Tiens c'est une personne qui me fait une blague ou quoi ??il n y a rien du tout !!!! Ah il y a le nom de l'expéditeur de ce côté-ci...mais,c'est mon nom !!!!!!
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Post by Geache »

Le texte de Kyliane :

Et là...

…et là du sang…qui gicle …partout, ça s’infiltre dans le paquet…l’horreur…l’employé hurle, son collègue se précipite avec un chiffon pour éponger le sang et tenter d’arrêter l’hémorragie. Une cliente derrière moi pousse un cri et tombe dans les pommes, sa tête heurte violemment le sol…encore du sang.
Un autre employé se précipite au toilettes pour…non pas besoin de dire…
Vite, quelqu’un appelle les secours.

Je reste là, scotchée. Mon beau paquet, tout écrabouillé, plein de sang. Quel courge ! Pourquoi il a tapé si fort ?

Tout le monde s’active autour de l’employé ou de la femme.

On entend la sirène dehors…des hommes avec un brancard pénètrent dans le bureau de poste et se précipite vers la femme étendue sur le sol, elle a du mal à respirer.

Un autre homme s’engage derrière les guichets pour s’occuper de l’employé blessé, il s’est évanouit lui aussi, la peur sans doute, peut-être la douleur, ou alors…Mais où est son pouce ?

Les recherches commencent, tout le monde à quatre pattes autour des guichets pour rechercher le doigt. Je m’y mets aussi.

Voyons par là. Ah non ce n’est pas ça, et là ?

Il n’est pas sous la chaise, ni derrière le pilier central…
Je ne vois rien sous la table…y’a tellement de monde, et les gens du samu qui essayent de réanimer la femme.

Je continue à chercher, c’est crade par terre et ça commence à sentir fort la transpiration dans la salle, tout le monde s’agite !

-« Aïe ! Faites attention où vous rampez ! (crétin) »

Les secouristes ont dégagé un truc de la gorge de la femme…qu’est-ce que c’est, je ne vois rien avec toutes ces jambes devant moi. Bon je me lève je verrais mieux.

-« Amenez de la glace, vite ! »
Incroyable le pouce maudit était dans la gorge de la femme !

Je crois que je vais profiter de la panique ambiante et reprendre mon paquet discrètement…Au fond je savais bien que ce n’était pas une bonne idée d’envoyer ça par la poste.
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Post by Geache »

Le texte de Maïwenn :

L’employé soulève son tampon et le laisse retomber sur mon avant-bras, posé sur le comptoir. Avant que j’aie le temps de dire quoi que ce soit il me tend une vignette d’affranchissement et me demande de la coller sur mon front. Voyant que je ne bouge pas il reprend l’autocollant et me l’applique autoritairement au dessus du sourcil droit. Je suis tellement abasourdie que j’ai comme perdu l’usage de la parole. Puis il me montre une porte derrière lui et me fait signe de sortir. Retrouvant peu à peu mes esprits j’essaye de lui expliquer que je ne suis pas un colis, que je veux juste poster cette lettre qui est là devant moi, que… que… rien à faire, son regard me guide malgré moi vers la porte du fond.

Je l’ouvre et me retrouve dans une petite pièce, genre salle d’attente de médecin. Trois personnes sont déjà assises là : une femme entre deux âges, et deux jeunes hommes. Je glisse un bonjour, auquel ils répondent tous par un hochement de tête et prends place sur la chaise la plus proche de la porte. J’ai beau tourner et retourner la situation dans mon esprit, je n’y comprends rien. Après quelques minutes je me décide à adresser la parole à mes compagnons :

- Heu, excusez moi, mais, qu’est ce qu’on fait là ?
Les deux jeunes gens se regardent l’air de dire « c’est quoi ce guignol ? » et l’un me fait :
- Ben, on attend.
- Pardonnez mon ignorance, dis-je alors, mais on attend quoi ?
La femme prend alors la parole. Elle m’explique que nous sommes en salle de transit, et que nous attendons le départ de la navette pour l’aéroport.
- L’aéroport ?
- Oui, pour aller prendre l’avion postal.
- L’avion postal ? Mais je ne suis pas un colis ! Enfin, mais vous non plus !.. Des colis humains, on n’a jamais vu ça. Et puis je n’ai rien demandé, moi, je venais juste poster une lettre… Donc vous me dites qu’on va prendre l’avion, mais, je n’ai pas que ça à faire, moi.

D’un coup j’ai retrouvé la parole, j’essaye d’expliquer aux autres que quelque chose ne va pas, que ça ne peut pas être possible, tout simplement. Mais je dois m’interrompre. Un employé de la poste vient d’ouvrir la porte. Il dis un seul mot : Dominique. Personne ne bouge. Il répète, plus fort cette fois-ci : Dominique ! Mes compagnons me lancent des regards appuyés. Quoi ? Dominique ? Ce n’est pas mon prénom ! Mais soudain je me rappelle. La lettre que j’étais venue postée, elle est à destination de la Dominique. Je pense alors que jamais je n’aurais dû accepter de rendre service à mon chef et d’aller poster cette lettre destinée au ministère de la culture dominicain. J’en conclus donc que c’est moi que l’homme attend. Je me lève, attrape mon sac. L’homme me déclare laconiquement :
- Il y aura un supplément pour le sac.
Un supplément ? Décidément je ne comprends rien. Je décide alors de laisser mon sac à main dans la salle d’attente. De toute façon c’est forcément une farce, je le retrouverai plus tard. Je suis l’homme jusqu’à une camionnette jaune. Je me dirige machinalement vers le siège passager, mais il me fait signe de monter à l’arrière. A l’arrière ? Mais il n’y a pas de banquette ! Je ne prends même pas la peine de tergiverser et je me case difficilement entre un sac postal et un gros colis. Nous arrivons à l’aéroport après un long trajet des plus inconfortables. On m’intime alors de monter dans un avion, au confort tout aussi spartiate. Et après 8 heures de vol nous atterrissons en Dominique.

C’est de là que je vous écris aujourd’hui. Voici plus d’un an maintenant que je vis ici. Je n’ai toujours pas compris ce qu’il m’est arrivé. Mon sac, vous vous en rappelez est resté à la poste en France. Je n’ai donc pas de papiers, je ne suis personne. Je vis sur la plage et j’essaye de gagner un peu d’argent en aidant des paysans souvent aussi pauvres que moi. Dès que j’ai économisé le prix d’un timbre je m’empresse d’aller à la poste. J’envoie des lettres en France, en espérant qu’un jour l’employé me tamponnera l’avant bras, comme ce jour où tout a commencé, et que je pourrai retourner chez moi. Mais pour l’instant rien. Tout est désespérément normal à la poste ici. Mes nombreuses lettres restent pourtant sans réponse, que sont devenus mes amis, ma famille ? Alors aujourd’hui je prends la liberté de vous écrire, j’espère que vous existez, j’ai mis un nom au hasard sur l’enveloppe. Si vous recevez cette lettre écrivez-moi, ça me fera plaisir de savoir que quelqu’un a enfin pu lire mon histoire.
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Post by Geache »

Le texte de Miguel :

Ballade du temps qui passe et des feuilles mortes

En 1997, autour du 15 avril, un homme aux traits tirés et au visage livide, et qui sur la joue portait un pansement, se présenta au comptoir d’une poste quelconque, vêtu d’un imperméable beige et d’un vieux chapeau de cow-boy. Présenta un pli, paya, remercia. La grosse postière tamponna le courrier, le jeta dans une bannette. Se retourna et ne vit plus personne ; marmonna sans doute quelque chose en direction de ces gens malpolis qui ne se soucient jamais de dire au revoir – quand bien même le revoir est souvent improbable.

Chambre quelconque d’un hôtel quelconque. Le 17 avril, autour de 1983, ou peut-être de 93. Fenêtre ouverte ; séance d’amour. Un beau jeune homme et une belle jeune femme enchaînent caresses, baisers, frottements et autres jeux du corps ; se regardent ; ferment les yeux ; sourient au plafond et admirent la nuit par la fenêtre. Il l’aime et elle l’aime et elle regarde par la fenêtre et aperçoit, au loin, une silhouette trapue et un chapeau ; la silhouette avance sur un chemin en titubant, et s’éloigne. Il l’aime et elle l’aime alors elle ferme les yeux et se glisse dans sa nuit.

Une chambre d’enfant, autour d’un 15 décembre ou peut-être novembre, vers 1987 ou 1997, peut-être 98 ? Enfant qui ne dort pas. Anticipe les cadeaux d’anniversaire. A demandé un costume de cow-boy, depuis qu’il a aperçu un Eastwood ou un Wayne à la télévision. Yeux fermés qui brillent. Temps qui ne passe pas. La porte s’ouvre doucement. Papa qui entre sans bruit, regarde l’enfant qu’il croit endormi ; papa est entré en caleçon ; est ressorti habillé avec un chapeau ; maman ne le croira pas. Il est où papa ?

Bord de l’eau, eau calme et scintillante, silence réglé au maximum. Des joncs et des barques amarrées, qui se balancent mollement. Vers 1982 ou 1999 ; fin du XXème siècle ; l’homme ne croit encore qu’en lui. Une enveloppe ouverte, posée au milieu des joncs ; un papier humide ; dessus des traces d’encre rouge à demi-effacées ; encre ou sang, on se demande – le « on » n’est personne. On y distingue quelques mots ; lettres rouges qui paraissent de sang ;

« croyant avoir touché l’amour et le fils et la vie,
n’ai touché que leurs vitres,
suis relique de l’humain
inerte, irréparable et éphémère.
désire être l’ici perdu et l’ailleurs ; eau muette ;
[et autres mots incompréhensibles]. »

Au-dessous, tapé à l’encre noire, un « t’aimais » adressé à [illisible].

Sur l’enveloppe, l’adresse indique : Bord de Lagune – Berge du Muet – Au milieu des joncs – 3870 Elaudret.

A moitié détaché déjà, prêt à fuir avec le vent, un petit pansement rougi.

Vers 1997, sur la place immobile d’un village quelconque, un vieil arbre pourrissait depuis plusieurs années. A peine nées, ses feuilles jaunissaient et tombaient inlassablement. Il arriva qu’un matin, un bruit sourd se produisît. La déflagration, qui semblait venir du petit bureau de poste, fut si forte que l’arbre frémit, et que plusieurs feuilles jaunes tombèrent. Quelques minutes auparavant, un homme étrange aux yeux emplis de larmes venait de laisser tomber une alliance au pied de l’arbre.
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Post by Geache »

Le texte d'Adeline :

La poste

M. Zerbrovski n’avait jamais aimé les bureaux de poste. Trop de monde, de resquilleurs, de fonctionnaires à son goût. Quoi qu’il en soit, il n’aimait quand même rien. Rien d’autre que lui-même. Mais il était assez orgueilleux que pour ne pas faillir à la tradition des cadeaux de Noël. N’ayant qu’une sœur vivant à des kilomètres de Bruxelles, dans le New Jersey, il ne la voyait jamais, sans pour autant l’oublier. A la veille de Noël, pataugeant dans la neige, essayant tant bien que mal de tirer parti de son pied bot, son bonnet enfoncé sur son crâne dégarni, il se rendit à la poste, avec son colis-cadeau sous son bras adipeux, un long manteau de laine le tassant, lui donnant l’apparence, avec son ventre plus que proéminent et sa petite taille, d’un caillou qui se déplacerait dans la neige.
Au bureau de poste, rien n’alla. Des gosses se moquèrent de lui, lui tournant autour comme des vautours. Des gens, pleins d’assurance et de suffisance, le dépassèrent. Enfin, l’employé des postes. Un sale type désagréable, celui-là. Et arrogant avec ça! Et maladroit. Ah ça, pour être maladroit ! On n’avait jamais vu pire ! Figurez-vous qu’en tamponnant le colis pour l’envoyer, cet imbécile a donné un coup à assommer un bœuf. Alors, forcément, le service à thé en porcelaine… Crac dedans! Enfin, au moins, il semblait vraiment confus et désolé. Déjà pas mal. Alors, il a donné un ticket vert à M. Zerbrovski, en le dirigeant, avec toutes ses excuses, vers la porte du fond. Bizarrement, il avait un léger sourire aux lèvres, semblant presque soulagé…
Ce n’est pas cela qui arrêta M. Zerbrovski, bien décidé, au moins, à se faire rembourser pour envoyer un autre cadeau à sa sœur. Arrivé dans la pièce du fond, il s’installa sur une des nombreuses chaises, regardant le mur blanc. Il n’attendit pas très longtemps pour comprendre à quoi servaient les interstices des murs, et pourquoi la porte était blindée. Un filet de fumée rougeâtre sortit de ces murs, enveloppant toute la pièce d’un nuage sanglant, laissant M. Zerbrovski suffoquer petit à petit. Complètement à court d’air respirable, il tomba de sa chaise, s’évanouissant. Le gaz se retira alors, et une seconde porte dissimulée dans un mur s’ouvrit, laissant le passage à trois hommes vêtus de blouses vertes. L’un d’eux ramassa le ticket vert s’étant échappé des mains de M. Zerbrovski. Les deux autres le prirent sans ménagement, et tous trois sortirent de la pièce, emmenant le petit homme joufflu.
Mr. Zerbrovski ouvrit les yeux, les refermant aussitôt, blessés par la lumière crue du néon. Faisant le point sur sa situation, il en vint à faire les constatations suivantes : il était nu, attaché de surcroît, dans une position assise, sur une chaise de métal peu confortable. De plus, il avait l’impression d’être dans une gigantesque boîte de coton, fait duquel il tira une nouvelle conclusion : il avait été drogué. Continuant de faire le compte de ses problèmes, il remarqua la pièce dans laquelle il se trouvait. Un cube de béton, au sol recouvert de métal, ce qui lui rappela vaguement mais déplaisamment des expériences sur des rats. Ou des souris. Ou des lapins. Bref. Rien de bien jovial en tous les cas. Il y avait une histoire de décharges électriques dans cette expérience.
Un homme, grand, imposant, entièrement vêtu de caoutchouc, fit alors son apparition dans la pièce, s’avançant vers Mr. Zerbrovski, le détachant, tout en l’empêchant d’essayer de s’enfuir, puis , il sorti de la pièce, après avoir posé un tampon et un plateau-repas sur le sol, à quelques trois mètres l’un de l’autre.
C’est alors que commença le cauchemar de Mr. Zerbrovski. Il passa plusieurs mois dans la pièce, utilisé tel un chien de Pavlov, tiraillé entre l’envie de manger et celle d’utiliser le tampon pour avoir une récompense, en recevant par exemple le droit de sortir cinq minutes de sa prison. Le but de ces nouvelles postes est simple: éliminer toutes les personnes en surcharge pondérale, en les forçant à maigrir et en ne les libérant qu’en échange d’un autre « patient ». D’après ce que Mr. Zerbrovski sait, c’est un tout nouveau programme top secret du gouvernement, et les patients guéris sont « suivis » après leur libération, afin qu’ils ne divulguent rien.

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Aujourd’hui, il y a un gros jeune homme triste qui doit envoyer un paquet. M. Zerbrovski jubile. Il va pouvoir détruire son paquet et l’envoyer avec un ticket vert à son nom dans la pièce du fond. Les hommes en vert vont trouver le ticket, et il pourra partir. Il sera libre, libre après tant d’années passées dans son aquarium, vendant des timbres…
Il prépare son tampon, met de l’encre dessus, lève le bras… Et l’abaisse soudainement, fracassant le colis… Ou presque… Un bruit métallique se fait entendre. Rien ne semble cassé. Tout est intact. Ce n’est pas encore pour aujourd’hui, la libération…
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Maïwenn
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Post by Maïwenn »

C'est marrant de voir où nous portent nos imaginations respectives ! :) Bravo à tout le monde ! Est ce que vous voulez qu'on soumette nos textes au vote ?
Penn ar Bed
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Pixel
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Post by Pixel »

Ben soit ça, soit on dit ce qu'on en pense.

Perso, je dis bravo à tous !! Mais parfois, faut croire que la poste est la source de bien des peurs :P (hein Maï et Adeline ? ;))

Sinon, j'aime particulièrement le texte de Mig. :jap:
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Maïwenn
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Post by Maïwenn »

Oui, c'est drôle qu'on imagine toutes les deux une pièce secrète derrière le guichet. Mais j'ai pas peur de la poste du tout ! Qu'est ce que tu vas imaginer là ?
Penn ar Bed
The end of the land
Le commencement d'un monde
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