Nouvelle version de la réforme de l'orthographe allemande
Moderators: kokoyaya, Beaumont, Sisyphe
-
- Membre / Member
- Posts: 5068
- Joined: 08 Jun 2005 00:20
- Location: Lörrach
Nouvelle version de la réforme de l'orthographe allemande
Comme vous l'avez compris depuis longtemps, la réforme de l'orthographe allemande de 1996 était à l'époque très mal passée. Une commission a été mise en place pour réformer la réforme. Ce cafouillage dure depuis huit ans, mais le bout du tunnel est en vue. Les dernières publications de cette commission commencent à être convainquantes. C'est pourquoi je vous fais un petit tour d'horizon de la situation actuelle, nettement moins complexe que la longue polémique sur cette réforme a pu le laisser croire jusqu'à maintenant. Il faut juste noter que les -ph- sont revenus là où ils étaient, mais les mots grecs qui avaient déjà un -f- le gardent.
Des sons et des lettres:
Les corrections étymologiques de 1996 n'ont jamais été vraiment contestées, elles restent. Le principe est simple : on évite les changements reliques d'anciennes conventions orthographiques depuis longtemps oubliées:
das Band => das Bändel (anciennement Bendel), car on voit très bien le rapport entre le /a/ de Band et le /ɛ/ de Bändel.
Le seul a survivre est Eltern, personne n'a osé le changer.
Ce principe est une très bonne idée, cela permet de se fier à la logique sans risquer de se tromper trop souvent.
Par contre, il y a quatre domaines où le débat a fait fureur, ce qui donne le résultat suivant (norme dans l'enseignement à partir de la rentrée 2006):
En un ou deux mots:
En un seul mot si l'expression donne globalement un nouveau sens, différent du sens litéral des deux éléments:
freisprechen (juger innocent) - frei sprechen (parler librement)
leichtfallen (trouver facile) - leicht fallen (tomber facillement)
leidtun (être désolé) - Leid tun (souffrance+faire)
teilhaben (participer) - Teil haben (part+avoir)
kennenlernen (faire connaissance suite à présentation) - kennen lernen (apprendre à connaître un sujet)
En deux mots si l'expression globale n'est autre que le sens litéral des mots employés:
rot streichen - peindre en rouge
bewusstlos schlagen - frapper jusqu'à ce que le victime perde connaissance
Klavier spielen - jouer du piano
Auto fahren - conduire en voiture
sprechen lernen - apprendre à parler
schwimmen üben - s'entrainer à nager
Quand on peut difficilement préférer l'un ou l'autre, on choisit comme un le sent:
détruire - kaputt machen ou kaputtmachen
passer l'aspirateur - staubsaugen ou Staub saugen
tout manger - leeressen - leer essen
N.B. Autant Velo fahren en deux mots me semble logique, autant je préfère radfahren car on n'est pas sur une roue quand on fait du vélo, mais je n'ai jamais réussi à savoir si les deux possibilités sont maintenant admises. La réforme de 1996 voulait Rad fahren et l'ancienne orthographe radfahren.
Majuscule ou minuscule:
Les substantifs et tout ce qui est utilisé en guise de substantif prend une majuscule, même une composition Adjectif+Nom en deux mots:
die Königliche Hoheit - altesse royale
der Heilige Abend - veillée de noël
Les expressions qui sont de simples adjectifs accolés à un nom ont un adjectif en minuscule:
ein neues Jahr - une nouvelle année
(bekannt wie) ein bunter Hund - (connu comme) le loup blanc
En minuscule aussi les substantifs utilisés comme adjectifs ou utilisés pseudo-adverbialement:
klasse sein - être super (classe)
ich bin es leid - je suis désolé
mir war angst und bange - j'étais complètement affolé
schuld sein - être de la faute de
Il y a de nombreux cas ambigus où on fait comme on le sent, selon que la substantivisation semble évidente ou pas:
aide d'urgence - die erste Hilfe ou Erste Hilfe
depuis longtemps - seit Langem ou seit langem
jusqu'à nouvel ordre - bis auf weiteres ou bis auf Weiteres
tableau noir - schwarzes Brett ou Schwarzes Brett
La commission s'est exprimée spécifiquement pour Recht et Unrecht:
On a le choix dans les expressions avec recht/Recht et unrecht/Unrecht associés aux verbes haben, behalten, sein, bekommen, geben, tun.
Couper les mots en fin de ligne:
On respect la structure des syllabes, mais sans jamais séparer une voyelle seule.
Backen => Ba-cken
Lachen => La-chen
Myrrhe => Myr-rhe
Aue => aucune coupure possible
Et on est prié d'éviter les coupures qui rendent le mot ambigu à la lecture:
Analphabet => An-alphabet ou Analpha-bet, mais pas Anal-phabet.
On est aussi prié de respecter un minimum la formation des mots, avec une certaine liberté:
hinauf => de préférence hin-auf mais aussi hi-nauf
darum => dar-um ou da-rum
einander => ein-ander, ei-nander ou einan-der (pas einand-er !)
Ponctuation:
La polémique concernait surtout la virgule. En gros, on remet la virgule grammaticale, version ancienne orthographe.
Du coup, la virgule ne disparait que dans le cas d'une infinitive composée uniquement du verbe avec zu:
Er hatte grosse Lust zu fahren (avec ou sans virgule)
Er hatte grosse Lust, mit mir zu fahren (avec virgule obligatoire)
Mais la virgule est obligatoire pour lever une ambiguité:
Sie versprach der Mutter, zu schreiben - Elle promit à sa mère d'écrire.
Sie versprach, der Mutter zu schreiben - Elle promit d'écrire à sa mère.
Des sons et des lettres:
Les corrections étymologiques de 1996 n'ont jamais été vraiment contestées, elles restent. Le principe est simple : on évite les changements reliques d'anciennes conventions orthographiques depuis longtemps oubliées:
das Band => das Bändel (anciennement Bendel), car on voit très bien le rapport entre le /a/ de Band et le /ɛ/ de Bändel.
Le seul a survivre est Eltern, personne n'a osé le changer.
Ce principe est une très bonne idée, cela permet de se fier à la logique sans risquer de se tromper trop souvent.
Par contre, il y a quatre domaines où le débat a fait fureur, ce qui donne le résultat suivant (norme dans l'enseignement à partir de la rentrée 2006):
En un ou deux mots:
En un seul mot si l'expression donne globalement un nouveau sens, différent du sens litéral des deux éléments:
freisprechen (juger innocent) - frei sprechen (parler librement)
leichtfallen (trouver facile) - leicht fallen (tomber facillement)
leidtun (être désolé) - Leid tun (souffrance+faire)
teilhaben (participer) - Teil haben (part+avoir)
kennenlernen (faire connaissance suite à présentation) - kennen lernen (apprendre à connaître un sujet)
En deux mots si l'expression globale n'est autre que le sens litéral des mots employés:
rot streichen - peindre en rouge
bewusstlos schlagen - frapper jusqu'à ce que le victime perde connaissance
Klavier spielen - jouer du piano
Auto fahren - conduire en voiture
sprechen lernen - apprendre à parler
schwimmen üben - s'entrainer à nager
Quand on peut difficilement préférer l'un ou l'autre, on choisit comme un le sent:
détruire - kaputt machen ou kaputtmachen
passer l'aspirateur - staubsaugen ou Staub saugen
tout manger - leeressen - leer essen
N.B. Autant Velo fahren en deux mots me semble logique, autant je préfère radfahren car on n'est pas sur une roue quand on fait du vélo, mais je n'ai jamais réussi à savoir si les deux possibilités sont maintenant admises. La réforme de 1996 voulait Rad fahren et l'ancienne orthographe radfahren.
Majuscule ou minuscule:
Les substantifs et tout ce qui est utilisé en guise de substantif prend une majuscule, même une composition Adjectif+Nom en deux mots:
die Königliche Hoheit - altesse royale
der Heilige Abend - veillée de noël
Les expressions qui sont de simples adjectifs accolés à un nom ont un adjectif en minuscule:
ein neues Jahr - une nouvelle année
(bekannt wie) ein bunter Hund - (connu comme) le loup blanc
En minuscule aussi les substantifs utilisés comme adjectifs ou utilisés pseudo-adverbialement:
klasse sein - être super (classe)
ich bin es leid - je suis désolé
mir war angst und bange - j'étais complètement affolé
schuld sein - être de la faute de
Il y a de nombreux cas ambigus où on fait comme on le sent, selon que la substantivisation semble évidente ou pas:
aide d'urgence - die erste Hilfe ou Erste Hilfe
depuis longtemps - seit Langem ou seit langem
jusqu'à nouvel ordre - bis auf weiteres ou bis auf Weiteres
tableau noir - schwarzes Brett ou Schwarzes Brett
La commission s'est exprimée spécifiquement pour Recht et Unrecht:
On a le choix dans les expressions avec recht/Recht et unrecht/Unrecht associés aux verbes haben, behalten, sein, bekommen, geben, tun.
Couper les mots en fin de ligne:
On respect la structure des syllabes, mais sans jamais séparer une voyelle seule.
Backen => Ba-cken
Lachen => La-chen
Myrrhe => Myr-rhe
Aue => aucune coupure possible
Et on est prié d'éviter les coupures qui rendent le mot ambigu à la lecture:
Analphabet => An-alphabet ou Analpha-bet, mais pas Anal-phabet.
On est aussi prié de respecter un minimum la formation des mots, avec une certaine liberté:
hinauf => de préférence hin-auf mais aussi hi-nauf
darum => dar-um ou da-rum
einander => ein-ander, ei-nander ou einan-der (pas einand-er !)
Ponctuation:
La polémique concernait surtout la virgule. En gros, on remet la virgule grammaticale, version ancienne orthographe.
Du coup, la virgule ne disparait que dans le cas d'une infinitive composée uniquement du verbe avec zu:
Er hatte grosse Lust zu fahren (avec ou sans virgule)
Er hatte grosse Lust, mit mir zu fahren (avec virgule obligatoire)
Mais la virgule est obligatoire pour lever une ambiguité:
Sie versprach der Mutter, zu schreiben - Elle promit à sa mère d'écrire.
Sie versprach, der Mutter zu schreiben - Elle promit d'écrire à sa mère.
Re: Nouvelle version de la réforme de l'orthographe allemand
Euh, je ne comprends pas (mais je ne suis pas germaniste, ceci peut expliquer celaElieDeLeuze wrote:Il faut juste noter que les -ph- sont revenus là où ils étaient, mais les mots grecs qui avaient déjà un -f- le gardent.

-
- Membre / Member
- Posts: 5068
- Joined: 08 Jun 2005 00:20
- Location: Lörrach
Re: Nouvelle version de la réforme de l'orthographe allemand
Les Allemands ont hésité longtemps pour la transciption du phi grec. Et ils hésitent encore un peu. En général, ça devient un F, mais il y a des mots réfractaires
Elefant mais Philosophie, Alphabet, Apostroph, Delphin, Phonotechnik, Photosyntese, Phonetik, Graphem... et bien d'autres...
En fait, plus le mot désigne un concept intelligent, plus il y a de chance de garder le ph. Il y a une zone grise, évidemment, et la commission de révision de la réforme admet les deux orthographes. Il faut juste noter, pour ceux que ça intéresse vraiment, que Fantasie et Telefon ne peuvent en principe plus s'écrire avec ph. Le mot Foto s'écrit avec un F depuis déjà bien longtemps, mais Photo est l'orthographe normale dans un mot savant composé à la grecque.
Pas si bien organisés que ça, finalement, nos amis germains.

Elefant mais Philosophie, Alphabet, Apostroph, Delphin, Phonotechnik, Photosyntese, Phonetik, Graphem... et bien d'autres...
En fait, plus le mot désigne un concept intelligent, plus il y a de chance de garder le ph. Il y a une zone grise, évidemment, et la commission de révision de la réforme admet les deux orthographes. Il faut juste noter, pour ceux que ça intéresse vraiment, que Fantasie et Telefon ne peuvent en principe plus s'écrire avec ph. Le mot Foto s'écrit avec un F depuis déjà bien longtemps, mais Photo est l'orthographe normale dans un mot savant composé à la grecque.
Pas si bien organisés que ça, finalement, nos amis germains.

Re: Nouvelle version de la réforme de l'orthographe allemand
@ Koko : je suppose que les ph viennent des mots empruntés non pas directement au grec mais au français, par exemple. Non ?


Merci Elie pour le topo !
Oh, je connaissais même pas ça !ElieDeLeuze wrote:Le seul a survivre est Eltern, personne n'a osé le changer.

Mais, ça n'est pas un problème de roue. Rad signifie tant "roue" que "vélo", donc je vois pas pourquoi ça serait pas logique.ElieDeLeuze wrote:N.B. Autant Velo fahren en deux mots me semble logique, autant je préfère radfahren car on n'est pas sur une roue quand on fait du vélo, mais je n'ai jamais réussi à savoir si les deux possibilités sont maintenant admises.
Suis-je la seule à me demander l'utilité d'une réforme qui rend possible plusieurs orthographes là où il n'y en avait qu'une avant ? est-ce vraiment plus simple pour l'apprenant ?ElieDeLeuze wrote:La commission s'est exprimée spécifiquement pour Recht et Unrecht:
On a le choix dans les expressions avec recht/Recht et unrecht/Unrecht associés aux verbes haben, behalten, sein, bekommen, geben, tun.
Oh, on n'a plus de bak-ken, alors ?ElieDeLeuze wrote:Backen => Ba-cken

Mais ç, ça a toujours été le cas, non ? en tout cas moi j'ai toujours appris comme ça, il me semble que ça date d'avant la réforme.ElieDeLeuze wrote:La polémique concernait surtout la virgule. En gros, on remet la virgule grammaticale, version ancienne orthographe.
Du coup, la virgule ne disparait que dans le cas d'une infinitive composée uniquement du verbe avec zu:
Er hatte grosse Lust zu fahren (avec ou sans virgule)
Er hatte grosse Lust, mit mir zu fahren (avec virgule obligatoire)

Merci Elie pour le topo !
Sonka - Сонька
It's crazy how the time just seems to fly
But for a moment you and I, we caught it
It's crazy how the time just seems to fly
But for a moment you and I, we caught it
-
- Membre / Member
- Posts: 5068
- Joined: 08 Jun 2005 00:20
- Location: Lörrach
Re: Nouvelle version de la réforme de l'orthographe allemand
Merci d'être passée, svernoux
Rad: justement, dans une bonne partie de l'Allemagne, il ne viendrait à l'idée de personne de demander "Wo ist dein Rad?" pour "Wo ist dein Fahrrad?".... il n'y a pas identité absolue entre Rad et Fahrrad. Pour les vieux croûtons comme moi, Rad pour Fahrrad est un abus de langage.
Bak-ken: disparu, a pu, terminé.
Virgule: Oui, justement, c'est ça la nouvelle, on oublie tout le délire des huit dernières années et on redevient raisonnable.
Ph: Personnellement, je ne vois rien de régulier dans le délire héllenistique des Outre-Rhénans.
Eltern: ça vient du fait que les parents sont en général plus âgés que leurs gosses.... älter => Eltern.

Rad: justement, dans une bonne partie de l'Allemagne, il ne viendrait à l'idée de personne de demander "Wo ist dein Rad?" pour "Wo ist dein Fahrrad?".... il n'y a pas identité absolue entre Rad et Fahrrad. Pour les vieux croûtons comme moi, Rad pour Fahrrad est un abus de langage.
Bak-ken: disparu, a pu, terminé.
Virgule: Oui, justement, c'est ça la nouvelle, on oublie tout le délire des huit dernières années et on redevient raisonnable.
Ph: Personnellement, je ne vois rien de régulier dans le délire héllenistique des Outre-Rhénans.
Eltern: ça vient du fait que les parents sont en général plus âgés que leurs gosses.... älter => Eltern.
- Sisyphe
- Freelang co-moderator
- Posts: 10954
- Joined: 08 Jan 2004 19:14
- Location: Au premier paquet de copies à gauche après le gros dico

Finalement, je trouve qu'on arrive à des propositions assez rationnelles. Sans le doute le choix de laisser le locuteur choisir dans les cas ambigus va-t-il gêner les professionnels de la langue comme vous, mais je pense que c'était la seule solution sage.
je suis heureux qu'ils aient sauvé leur magnifique virgule, qui est à mes yeux une des plus grandes beautés de la grammaire allemande. On ferait d'ailleurs bien d'adopter les mêmes règles pour l'édition des textes latins (

Reste la nouvelle répartition du ß, celle qui me traumatise le plus. Sans doute du point de vue allemand est-elle parfaitement logique. Mais pour moi qui ai appris l'allemand avant la réforme, c'est une catastrophe

Elie wrote:Analphabet => An-alphabet ou Analpha-bet, mais pas Anal-phabet.



Le plus absurde, c'est qu'aux petits français, on enseigne bien "Rad" pour vélo, alors que j'ai l'impression que ce n'est pas vraiment usuel...Elie wrote: Rad: justement, dans une bonne partie de l'Allemagne, il ne viendrait à l'idée de personne de demander "Wo ist dein Rad?" pour "Wo ist dein Fahrrad?".... il n'y a pas identité absolue entre Rad et Fahrrad. Pour les vieux croûtons comme moi, Rad pour Fahrrad est un abus de langage.
... A tel point qu'une camarade, en colle d'hypokhâgne, avait scandalisé le prof en traduisant "das Rad der Geschichte" par "le vélo de l'histoire"... S'était fait engueuler !!
*
petite mise au moint à propos de phi/ph/f (en complément des propos d'Elie)
Il faut bien avoir deux choses à l'esprit :
1. La phonétique et la graphie sont deux choses différentes. Même en allemand.
2. La transcription des mots grecs, ou plus exactement, des éléments de composition savante (on dit parfois "interfixation") n'est pas une translittération. Elle obéit à des mécanismes purement arbitraires.
Un peu d'histoire :
Le "phi" grec se prononçait bel et bien comme un "p" suivi d'une aspiration, comme dans "Phnom Penh". De ce fait, pour transcrire les mots grecs, les latins lettrés et hellénophones ont adopté le digramme "ph". Le peuple, lui, ne s'est pas emmerdé et a écrit "p" dans les véritables emprunts (ex. "porphyra > purpura "la pourpre").
Même chose pour théta et chi.
Les Latins sont des gens simples avec un alphabet "parfait" (c'est pas moi quile dit, c'est une grande latiniste) : une lettre = un son (un peu moins l'inverse). Ils ne se seraient pas emmerdés avec une graphie complexe pour le plaisir. La preuve, c'est qu'à l'inverse, ce qui en grec s'écrivait ει mais se prononçait déjà , ils l'ont écrit i, et ce qui s'écrivait ου et se prononçait , il l'ont écrit u : Χειρουργια > Chirurgia.
Malheureusement, les phi grecs ont commencé à se prononcer [f] au moment où le latin disparaissait. Il en a résulté un beau bordel, surtout à partir du moment (fin du Moyen Âge) on l'on a redécouvert le grec, via les Byzantins, et les phi désormais prononcé [f].
Dès lors, il y a eu deux tendances : soit s'en tenir à la phonétique et écrit t et f (comme l'italien : teatro, filosofo), soit par admiration béate pour les Anciens écrire comme les Latins : c'est la voie adoptée par le français, qui transcrit les racines grecques selon leur reflet latin.
Le problème de l'Allemand, c'est qu'il est entre les deux : d'un côté l'admiration éperdue pour le latin et, surtout, pour le français au XVIIe/XVIIIe siècle (Frédéric II n'écrivait et ne parlait qu'en français !), de l'autre, une relative rationnalité dans sa langue et son écriture.
A quoi s'ajoute aujourd'hui la pression internationale : quand toutes les langues écrivent "phénolpharmine", que vous lisez toute la journée des publications en anglais avec de "ph", vous avez tendance à écrire "ph". Il nous arrive la même chose aujourd'hui : sous l'influence de l'anglais, on voit des "ei" au lieu de "i" : "déixis, déictique, etc" en linguistique (!) alors que de toute éternité on dit "épidicitique" (mais "épidictique" est un mot de rhétorique qui existe depuis la Renaissance, alors que "déictique" est un mot de linguistique récente).
On a un peu le même bazar en français avec la prononciation des "ch" issus du chi grec : quand le mot est populaire, c'est plutôt /ch/, suivant les règles françaises (anarchisme), quand le mot est savant, c'est plutôt /k/ (archéologue), et des fois, on sait pas (monachisme ? J'ai entendu un prof du Collège de France dire /monachism/).
La plupart des occasions des troubles du monde sont grammairiennes (Montaigne, II.12)
-
- Membre / Member
- Posts: 5068
- Joined: 08 Jun 2005 00:20
- Location: Lörrach
Et oui, Siz', les règles pour le ß sont faites pour les Allemands, qui eux, savent prononcer les mots.
En théorie, la version ancienne des ß n'est plus acceptée à l'école, mais tu as quand même le soutien solidaire des millions d'Allemands adultes qui n'ont rien changé à leurs habitudes orthographiques.
Pour Rad, j'ai visiblement raté un épisode
On apprend dans les écoles françaises que ça veut dire vélo ?
C'est n'importe quoi !
On trouve Rad fahren / (?)radfahren uniquement pour éviter d'avoir la redondance Fahrrad fahren. Comme je le disais plus haut, racourcir Fahrrad en Rad est un abus de langage qui n'a rien à faire dans les dictionnaires et encore moins en hypokhâgne. Je sais bien que personne ne me demande mon avis, mais allez demander ein Rad dans un magazin en Allemagne, et vous verrez bien ce qu'on vous apportera...


Pour Rad, j'ai visiblement raté un épisode


On trouve Rad fahren / (?)radfahren uniquement pour éviter d'avoir la redondance Fahrrad fahren. Comme je le disais plus haut, racourcir Fahrrad en Rad est un abus de langage qui n'a rien à faire dans les dictionnaires et encore moins en hypokhâgne. Je sais bien que personne ne me demande mon avis, mais allez demander ein Rad dans un magazin en Allemagne, et vous verrez bien ce qu'on vous apportera...

Ben oui, je confirme ! Et c'est dans le dictionnaire aussi.ElieDeLeuze wrote:Pour Rad, j'ai visiblement raté un épisodeOn apprend dans les écoles françaises que ça veut dire vélo ?
C'est n'importe quoi !

Sonka - Сонька
It's crazy how the time just seems to fly
But for a moment you and I, we caught it
It's crazy how the time just seems to fly
But for a moment you and I, we caught it
-
- Membre / Member
- Posts: 5068
- Joined: 08 Jun 2005 00:20
- Location: Lörrach
das Rad = la roue
Das Fahrrad = le vélo
J'ai demandé à mes collègues aujourd'hui, et en effet, il faut écrire Rad fahren. Interdit de le mette en un seul mot. Aucun de mes collègues de langue maternelle allemande ne dirait Rad seul pour vélo, et les secrétaires suisses non plus. J'ai fait l'essai en leur demandant ce qu'ils comprenaient quand on leur dit "Gestern habe ich ein neues Rad gekauft". Ils ont tous supposé que je parlais d'un vélo, mais tous m'ont aussi repris en répétant la phrase avec Fahrrad.
En attandant, la nouvelle othographe est sans appel. Je suis furieux, mais vaincu.
Das Fahrrad = le vélo
J'ai demandé à mes collègues aujourd'hui, et en effet, il faut écrire Rad fahren. Interdit de le mette en un seul mot. Aucun de mes collègues de langue maternelle allemande ne dirait Rad seul pour vélo, et les secrétaires suisses non plus. J'ai fait l'essai en leur demandant ce qu'ils comprenaient quand on leur dit "Gestern habe ich ein neues Rad gekauft". Ils ont tous supposé que je parlais d'un vélo, mais tous m'ont aussi repris en répétant la phrase avec Fahrrad.
En attandant, la nouvelle othographe est sans appel. Je suis furieux, mais vaincu.

-
- Guest
L'emploi de la majuscule à l'intérieure de la phrase (pour écrire autre chose que le nom d'un personnage sacré ou d'une charge importante) se repand au XVIe siècle (initiale majuscule pour environ 80% des substantifs dans la Bible de Luther). Au début ne pas concernés que les substantifs, mais également des pronoms, des adjectifs, des verbes... bref, tout les mots que l'auteur souhaite mettre en relief.
Ce phénomène devient petit à petit systématique à partir de la fin du XVIIe siècle.
J. Bödiker individue dans l'alternance majuscules/minuscules la possibilité de marquer, à l'aide de l'orthographe, des faits qui relèveraient plutôt de la morphologie (si je lis Laut, je sais tout de suite qu'il s'agit du substantif et non pas de l'adjectif ou de l'adverbe, voire de la préposition laut ; et c'est aussi l'utilité que je trouve au système, car les exemples comme der Laut/laut sont vraiement nombreux en allemand). En 1748 Gottsched publie un ouvrage où il place le substantif au sommet de la hiérarchie de la phrase : écrire les substantifs avec l'initiale majuscule devient une règle. Une règle qui avait déjà eu ses détracteurs au XIXe siècle (notamment Jacob Grimm), avant d'être critiquée aujourd'hui par certains, qui en demandent l'abolition. Perso, j'espère qu'on la maintienne.
Avant la réforme orthographique de 1948, l'écriture danoise aussi utilisait des majuscules pour la première lettre des substantifs.
Ce phénomène devient petit à petit systématique à partir de la fin du XVIIe siècle.
J. Bödiker individue dans l'alternance majuscules/minuscules la possibilité de marquer, à l'aide de l'orthographe, des faits qui relèveraient plutôt de la morphologie (si je lis Laut, je sais tout de suite qu'il s'agit du substantif et non pas de l'adjectif ou de l'adverbe, voire de la préposition laut ; et c'est aussi l'utilité que je trouve au système, car les exemples comme der Laut/laut sont vraiement nombreux en allemand). En 1748 Gottsched publie un ouvrage où il place le substantif au sommet de la hiérarchie de la phrase : écrire les substantifs avec l'initiale majuscule devient une règle. Une règle qui avait déjà eu ses détracteurs au XIXe siècle (notamment Jacob Grimm), avant d'être critiquée aujourd'hui par certains, qui en demandent l'abolition. Perso, j'espère qu'on la maintienne.
Avant la réforme orthographique de 1948, l'écriture danoise aussi utilisait des majuscules pour la première lettre des substantifs.
Wir brauchen keinen Appetit, wir haben den Hunger. (Bertolt Brecht)
-
- Membre / Member
- Posts: 5068
- Joined: 08 Jun 2005 00:20
- Location: Lörrach
- Sisyphe
- Freelang co-moderator
- Posts: 10954
- Joined: 08 Jan 2004 19:14
- Location: Au premier paquet de copies à gauche après le gros dico
Merci à Mischka pour ces rappels ; je connaissais l'histoire d'une façon générale, mais pas ces passionnants détails.
La "majusculite" a eu cours aussi en France : la majuscule est très courante dans les oeuvres du 18e siècle, dès qu'on veut souligner un mot, ou pour indiquer certaines nuances (notamment me semble-t-il les noms abstraits). Il en reste d'ailleurs quelques traces dans notre usage puisqu'il faut écrire l'action de l'État (à côté de l'état de mon travail), la Bourse (des valeurs, celle qui ruine ma bourse), la Cour (quand bien même se réunirait-elle dans une cour), etc.
(Accessoirement, tant qu'on imprimait en typographie, les moyens de soulignement était très limités : pour mettre en italique, il fallait changer de casse, ce qui compliquait les choses. Et bien sûr pas de gras ou de souligné. Donc il fallait d'autres systèmes de mis en valeur : la majuscule est un moyen commode, de mêmes que les "l i t t e r a e d i s j u n c t a e")
... On voit d'ailleurs par là toute la différence entre les deux langues : le problème du français est sémantique, peut-être parce qu'il est très rétif à la néologie, par nature (peu de composition, peu de dérivation) et aussi par culture, et donc un même mot peut signifier quantité de choses (vs ETAT l'allemand au moins : Staat (l'État), Stand, Bestand, Zustand, Verfassung, etc.).
Le problème de l'allemand est morphologique : identifier la nature du mot. On peut dire rapidement, en tombant dans le cliché, que cela procède du caractère méthodique des Allemands... Ou en étant plus objectif, rappeler que dans la langue allemande, la frontière entre les classes n'est pas nette : tous les adjectifs sont aussi adverbe sans aucune marque, un infinitif se substantive très facilement, un substantif se colle à un verbe et forme une "pince phrastique", etc.
... En tout cas, je peux vous dire une chose : il y a quelques jours, j'ai dû utiliser le Lexer en ligne, dictionnaire de moyen-haut-allemand qui date du 19e et qui ne met pas les majuscules. C'est insupportable ! Ca gêne considérablement la lecture.
La "majusculite" a eu cours aussi en France : la majuscule est très courante dans les oeuvres du 18e siècle, dès qu'on veut souligner un mot, ou pour indiquer certaines nuances (notamment me semble-t-il les noms abstraits). Il en reste d'ailleurs quelques traces dans notre usage puisqu'il faut écrire l'action de l'État (à côté de l'état de mon travail), la Bourse (des valeurs, celle qui ruine ma bourse), la Cour (quand bien même se réunirait-elle dans une cour), etc.
(Accessoirement, tant qu'on imprimait en typographie, les moyens de soulignement était très limités : pour mettre en italique, il fallait changer de casse, ce qui compliquait les choses. Et bien sûr pas de gras ou de souligné. Donc il fallait d'autres systèmes de mis en valeur : la majuscule est un moyen commode, de mêmes que les "l i t t e r a e d i s j u n c t a e")
... On voit d'ailleurs par là toute la différence entre les deux langues : le problème du français est sémantique, peut-être parce qu'il est très rétif à la néologie, par nature (peu de composition, peu de dérivation) et aussi par culture, et donc un même mot peut signifier quantité de choses (vs ETAT l'allemand au moins : Staat (l'État), Stand, Bestand, Zustand, Verfassung, etc.).
Le problème de l'allemand est morphologique : identifier la nature du mot. On peut dire rapidement, en tombant dans le cliché, que cela procède du caractère méthodique des Allemands... Ou en étant plus objectif, rappeler que dans la langue allemande, la frontière entre les classes n'est pas nette : tous les adjectifs sont aussi adverbe sans aucune marque, un infinitif se substantive très facilement, un substantif se colle à un verbe et forme une "pince phrastique", etc.
... En tout cas, je peux vous dire une chose : il y a quelques jours, j'ai dû utiliser le Lexer en ligne, dictionnaire de moyen-haut-allemand qui date du 19e et qui ne met pas les majuscules. C'est insupportable ! Ca gêne considérablement la lecture.
La plupart des occasions des troubles du monde sont grammairiennes (Montaigne, II.12)