Parlons d'abord philologie, c'est la partie rigolote...
Une chose est sûre, le /-t/ final est déjà dans la plupart des transcriptions latines médiévales et post-médiévales, cf.
https://la.wikipedia.org/wiki/Mahometus#cite_ref-7
Nomen Arabicum variis modis in litteras Latinas redditum est, ut Mahometus, Muhammadus, Mahumetus, Machometus, Mahometes,[6] Maometus[7] et alia.
Je me suis demandé si ce /-t/ n'était pas dû à la forme turque,
Mehmet, qui est d'ailleurs le nom de plusieurs sultans, dans la mesure où les Turcs dominent la mer Méditerranée et ses échange dès le bas Moyen Âge et que c'est à eux que les Croisés ont eu affaire. Le wikipédia latin me donne raison, mais ne cite pas ses sources :
Transcriptio e Lingua Persica est Mohammad (IPA: mohæm.mæd). Forma nominis in Lingua Turcica est Mehmed sive Mehmet et Muhammet (etiam Muhammed). Prius multis in linguis Europaeis forma Mohamet in usu erat, cuius t-finale linguae Turcicae debetur, cui linguae est obduratio sonorum finalium. Haec forma nominis etiam his diebus in Lingua Francogallica pervulgata est, forma tritissima Italica Maometto aeque ac forma Hispanica Mahoma vel Lusitana Maomé etiam ab hac forma originem repetunt. In regionibus olim Unionis Sovieticae forma Magomet est praenomen frequens Musulmanorum. Variatio africana est praenomen Momodou, in Gambia usitatum.
cf.
https://la.wikipedia.org/wiki/Mahometus_(nomen) (inutile de traduire, je suppose) ; cela étant, les deux explications peuvent valoir en même temps : le dévoisement des finales est en effet une donnée de base dans une partie des langues romanes, qui accueillent donc d'autant plus facilement la forme turque.
Andgerassen wrote: Plus sérieusement, j'ai découvert un fait intéressant dans la traduction en allemand : dans cette langue, Mahomet se dit Mohammed, et les musulmans (autrefois mahométans) Mohammedaner. Mahomet apparaît aussi, mais uniquement dans la traduction du titre d'une tragédie de Voltaire, Le Fanatisme ou Mahomet le Prophète : Mahomet der Prophet.
La forme
Mahomet (et les formes
Mahometanisch, etc.) a aussi existé en allemand, il suffi de parcourir le wiki allemand :
Die zweite Wiener Türkenbelagerung 1683 inspirierte den katholischen Barockprediger Abraham a Sancta Clara im selben Jahr zu einem Pamphlet, in der die Christen zum Kampf wider den Mahometanischen Irrthum und Türckischen Erbfeind
Comprenez
Les Chrétiens en lutte contre l'erreur mahométane et l'ennemi héréditaire turc (je m'amuse toujours autant du fait que les Teutons du Grand Siècle se piquassent de noms latinisés : Abraham a Sancta Clara... Moi, je trouve que ça fait soap-opéra des années 90, mais bon...)
Accessoirement, la forme "Mahom(e)", proche de la variante espagnole, a existé en ancien français, Victor Hugo l'utilise encore dans
Hernani parce qu'il a besoin d'un syllabe en moins et d'une rime en [-ɔm] :
Avons-nous des turbans ? Serait-ce qu’on me nomme
Mahom ou Boabdil, et non Carlos, répond !
Pour nous baisser la herse et nous lever le pont ?
Et dans la
Chanson de Roland, on trouve les deux formes, pour les mêmes raisons :
laisse I.Li reis Marsilie la tient, ki Deu nen aimet.
Mahumet sert e Apollin recleimet :
(...)
laisse XXXIII Blancandrins vint devant Marsiliun,
Par le puign tint le cunte Guenelun,
E dist al rei : « Salvez seiez de Mahum
E d’Apollin, qui seintes leis tenuns !
*
Sur le fond "politique", que dire

? Je trouve Dada bien large d'appeler cela une polémique à 2 balles, ou alors il compte encore en francs et il faut diviser par 6,55957. Il n'y a pas un musulman au monde, fervent ou purement résiduel, qui n'utilise le nom de son prophète selon la forme qu'il a dans sa propre langue. Ou alors, comme l'a dit Andergassen, il va falloir s'attaquer à Jésus / Jezus / Gesù / Isa auquel cet hérétique de pape François / Francis / Francisco / Frañcez / Franzkiskus / Franġisku / etc. manque de respect tous les jours.

Si tant est qu'on doive ne pas manquer de respect aux prophètes de toutes les religions ; auquel cas j'interdis toute moquerie à l'égard du feu prince Philipp(e) (ou dois-je écrire Φίλιππος ?) de/of Mountbatten/Battenberg duc d'Edimbourg (je lui manque de respect si je n'écris pas Edinburg ? Mais alors pour quoi pas Dùn Èideann ?)... Non pas parce qu'il vient de mourir, mais parce qu'il a fait l'objet d'une
quasi divinisation sur l'île de Vanuatu.
C'est vrai ça, comment osez-vous faire preuve de Vanuatuphobie primaire ?
Notre époque se repaît de ces polémiques à 0,3048 balles (donc). La chasse à la micro-offense tient de la chasse au dahu, en moins drôle.
La plupart des occasions des troubles du monde sont grammairiennes (Montaigne, II.12)