
J'avais un prof d'ancien français qui poussait le snobisme jusqu'à dire "le futur II" - même quand il parlait du français
moderne !
Effectivement, si l'on analyse en diachronie :
-> le subjonctif passé (je fisse, j'eusse fait) avait hérité du latin sa valeur d'iréel.
-> les futurs périphrastiques cantare habeo et cantare habebam ont donné deux futurs : un futur simple et un futur antérieur.
Il en reste aujourd'hui des traces :
-> le "conditionnel passé deuxième forme", qui est formellement le + que parfait du subjonctif
-> le "futur dans le passé", fonction possible du subjonctif.
Donc - ce qui répondra à l'autre question - on peut dire que le "conditionnel passé deuxième forme" n'existe pas, que c'est une valeur propre du subjonctif.

Mais ça : C'EST DE LA DIACHRONIE !
C'est là que je dis : il faut savoir
aussi raisonner en synchronie - car c'est comme ça que raisonne un enfant qui apprend sa langue maternelle :
- Dans mettons trois cas sur quatre, la subsitution de "je ferais" à "je fais" entraine une modification modale, non temporelle.
- Même le "futur dans le passé" peut-être perçu comme une forme de condition ("il me disait que quand je serais grand, j'aurais une voiture" : une fois réalisée la condition {être grand}, la possibilité {avoir une voiture} s'effectue.
- L'inverse n'est pas vrai : on ne peut pas percevoir la condition comme un futur du passé : si tu venais demain, je serais content -> aucune valeur de passé.
- "j'eusse aimé", dans neuf cas sur dix, peut être substituée à "j'aurais aimé"
- "j'eusse aimé" n'a aucune des marques
modernes du subjonctif : pas de "que", possibilité d'usage en proposition indépendante.
Bref, pour l'essentiel, c'est un mode. On peut toujours pinailler, dire par exemple qu'il y a des cas où le cond. passé 2 forme ne peut pas remplacer le "vrai" conditionnel :
On rapporte que les Américains auraient trouvé des armes de destruction massive
=/= *On rapporte que les Am. eussent trouvé des etc.
Ou encore dire que le cond. passé 2e forme s'emploie dans la protase (le nez de Cléôpatre, s'il eût été plus court, la face du monde en eût été changée, etc.)
*
Mais
pour l'essentiel ça tient du mode.
Donc, encore une fois, on peut pinailler devant des étudiants,
mais pas devant des gamins de CM2. Si jusque-là on a dit que c'était un mode, c'est que c'est un mode.
Comme je dis aussi souvent : vous pouvez toujours me dire que la rupture de 1052 entre Rome et Byzance n'est pas réellement schismatique si l'on regarde le détail de l'histoire, ou qu'on est pas sorti du moyen-âge le 1 janvier 1492 pile-poile. Mais les enfants ont besoin de repères
clairs
Donc, comme tu l'as dit : soit on dit "c'est un mode", soit on dit "c'est un temps". Et je trouve qu'il n'y a vraiment pas de quoi tout chambouler : pour l'essentiel, c'est un mode.