Est-ce que cela correspond à la réalité?

Non, à peu près tout est faux !
Alors, les grandes écoles à la française... :
ENS signifie "Ecole
Normale supérieure" (normal dans le sens ancien = qui forme des professeurs).
Il y en a quatre, dont deux qui recrutent en lettres : rue-d'Ulm et Lyon-Lettres.
Ces écoles non seulement sont gratuites, mais même elles sont
payées !. En effet, lorsque l'on devient normalien, on devient automatiquement fonctionnaire de l'Etat Français, et l'on touche un salaire de professeur-stagiaire (8000 Francs / mois, à peu près).
Pour entrer dans une ENS, il faut passer un
concours.
Ce concours est très difficile, et se passe au bout de deux années de "classes préparatoires aux grandes écoles". Ces classes se déroulent dans des
lycées (en général prestigieux, les lycées historiques des centres-ville), avec un fonctionnement de type lycée : c'est à dire que l'assiduité est
obligatoire. Comme il s'agit d'un prolongement des études secondaires, en elle-mêmes, ces deux années sont
gratuites (mais pour avoir des équivalences de diplômes vis à vis de l'université, il est nécessaire de s'inscrire quand même à la faculté, mais c'est le même prix que les autres étudiants, voire moins).
La première années s'appelle "Lettres Supérieures", ou en argot scolaire "hypokhâgne".
La seconde années s'appelle "Première Supérieure", ou "khâgne".
Ces deux années (et le concours au bout) sont multi-disciplinaires. Si tu fais une khâgne-Ulm en cursus AL (le plus approprié pour toi) tu auras :
- du français (littérature) (+ ou - six heures / semaines)
- du latin et du grec ancien
- de la philo
- de l'histoire (mais pas de géographie, du moins en concours AL).
- deux langues vivantes.
Ces deux années sont très exigeantes : environ 30 heures de cours par semaine
obligatoires (contrairement à la fac. Mais c'est une bonne chose, parce qu'on est un peu "poussé au c*l" - pardonne-moi l'expression, et on évite de prendre l'habitude de glander). A quoi s'ajoutent un devoir surveillé par semaine (de quatre, cinq ou six heures, cad les mêmes épreuves qu'au concours). Et à peu près une "colle" par semaine. La "colle" est une interrogation orale : on tire un sujet, on a une pour préparer et l'on passe devant un professeur. C'est un excellent entraînement pour toute la suite des études (et c'est là qu'on apprend à "improviser" sur un sujet pour lequel on ne connaît rien).
Un détail important : les notes ne comptent pas. En tout cas de manière mathématique. Contrairement à la faculté, il ne faut pas "10/20" pour passer dans l'année supérieure. Les profs mettent les notes qu'ils veulent (

souvent très basse ! Des gens habitués à 16/20 se retrouve à 8/20). Ils décident ensuite s'il font passer dans le classe supérieure (entre l'hypokhâgne et la khâgne), d'une part, et s'ils accordent l'équivalence de diplôme avec la faculté.
Au bout de ces deux années très exigeantes, on passe donc le concours de l'ENS.
Le concours (comme tous les concours français) se déroule en deux temps.
D'abord l'écrit : sept ou huit épreuves (dissertations en français, philo, histoire, thèmes et version en langues vivantes et mortes).
Le double du nombre de postes offerts, soit à peu près les 60 premiers de l'écrit sont déclaré "admissibles".
Ils passent donc l'oral (un peu comme le deuxième tour d'une élection présidentielle française). Les 30 premiers sont "intégrés" dans l'Ecole.

Effectivement, la réussite y est très très très difficile. En gros, c'est 30 places pour 800 candidats. Ca ne veut pas dire qu'elle est impossible. Moi, j'ai failli, puisque j'ai été "admissible".
Si on échoue une fois, on a la possibilité de recommencer une fois la deuxième : on appelle cela "cuber" sa khâgne.
Ceux qui réussisent sont donc "intégrés" dans l'Ecole. Ils sont donc salariés durant quatre années, à la fin desquelles ils doivent obligatoirement
réussir l'agrégation - sinon... il faut rembourser ! En général, ils la réussissent, et sont même généralement les premiers.
En plus d'être payés, les "normaliens" sont nourris et logés, de manière plutôt confortable (en tout cas plus que dans une cité universitaire !). Les normaliens de la rue d'Ulm choisissent eux-mêmes les cours qu'ils veulent suivre dans les 14 universités parisiennes.
Il faut savoir que l'ENS ne délivre aucun diplôme par elle-même. Les normaliens passsent les diplômes des universités françaises. Mais dans des conditions idéales (payés, logés en plein Quartier Latin, accès à une des meilleurs bibliothèques, etc.). Considérés comme l'élite des étudiants, ils sont en général très bien acceuillis par des directeurs de thèses, et ensuite, voient leur carrière facilitée.
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Pour ceux qui ratent l'ENS, ce n'est pas si grave que cela. Au bout de deux ans (sauf si on a pas travaillé), les professeurs autorise une (ou plusieurs) équivalence de diplôme (autrefois le DEUG, aujourd'hui la deuxième année de licence). Si on a été admissible, on a en plus le droit à une troisième équivalence. Les khâgneux type "Ulm" peuvent la demander dans la matière de leur choix.
A partir de là, on continue donc ses études normalement.
Si tu veux repartir en Allemagne, tu feras alors jouer l'équivalence de ton diplôme obtenu en France avec l'université allemande directement. C'est pas toujours facile. Mais en principe, c'est appelé à être de plus en plus simple. A défaut d'être automatique.
Les khâgnes sont très très très difficiles et éprouvantes, c'est vrai. Mais on en sort "blindés", avec beaucoup de connaissances dans 8 matières, des méthodes de travail, et surtout, une habitude acquise pour ce qui est de faire des dissertations, des versions, des thèmes ou des exercices oraux. Etant donnés qu'on est obligé d'en faire deux ou trois par semaines alors qu'un étudiant de fac en fait deux ou trois par ans.
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Pour entrer en hypokhâgne, il faut faire un dossier... et être accepté. On peut maintenant déposer une demande dans plusieurs lycées. Certains sont très "courrus" (Henri IV, Louis-Le-Grand, Condé) mais ce ne sont pas
forcément les meilleurs. Mieux vaut être, je trouve, dans une ville de province de taille moyenne (Strasbourg, Nice, etc.).
Les khâgnes les moins "courrues" ont en générale 150 demandes pour 50 places. Les plus demandées de l'ordre de 600 demandes. Comme on peut faire dix (je crois) demandes en même temps, si on a de bonnes notes, il est rare que l'on ne trouve pas une hypo à intégrer.
La nationalité n'est plus un problème pour être intégré en hypokhâgne. Par contre, effectivement, si tu réussis l'ENS alors que tu n'as
que la nationalité allemande, tu seras intégré "au titre étranger" (

en fait c'est plutôt un avantage, je crois, parce qu'on est intégré "hors place", c'est à dire que si tu es la 16e, en fait le 17e juste après toi sera intégré comme étant un 16e ex aequo, donc si tu es 31e alors qu'il n'y a que 30 places, tu seras intégrée quand même comme 30e ex aequo). Autant que je saches, pour les étrangers de l'union européenne, cela ne fait pratiquement plus de différence. Je vais quand même vérifier.
Les dossiers d'inscription dans les hypokhâgne doivent être remplis plus ou moins maintenant.

Là, par contre, je ne sais pas comment cela peut fonctionner pour toi, parce qu'en principe il faut mettre ses bulletins depuis la seconde, plus les appréciations des profs en français, histoire-géo, etc. Et vu que le découpage des matières et des années n'est pas le même qu'en France...

Le plus simple, à mon avis, c'est que tu téléphones carrément à un lycée français ; par exemple le lycée Kléber à Strasbourg (qui doit avoir l'habitude de ce genre de situations) et que tu leur demandes plus d'explications. Ils te diront ce que tu peux faire ou non.
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L'inscription dans une khâgne n'est pas obligatoire pour passer le concours d'entrée de l'ENS. Mais passer comme candidat libre, sans avoir été préparé, est excessivement difficile. En fait : presque impossible.
Il est possible, également, si tu commences des études en Allemagne, d'être "pensionnaire étranger" un an à l'ENS. Dans ce cas, il s'agit bêtement d'une sorte d'erasmus, mais très sélectif.
Enfin, il existe un "deuxième concours", quand on déjà un diplôme de deuxième cycle, mais là je ne sais rien.
En fait, le véritable avantage n'est pas tant d'intégrer l'ENS que d'avoir fait une khâgne.
Je continue de me renseigner.