Les patrons ont peut-être une propriété (ils ont certainement des propriétés puisque, pour être patron, dans plusieurs cas, il faut être propriétaire...) qui ressemble à celle du physicien Enrico Fermi. Pour ce qui suit, je le cite de mémoire : les détails seront flous et/ou incomplets. À prendre pour amusement seulement : ceci n'est pas un mémoire de maîtrise...
En physique il est deux vocations très différentes ; théoricien et expérimentateur. L'une est aussi nécessaires l'une que l'autre, ce qui fait que je ne comprends pas pourquoi très peu d'expérimentateurs sont nobelisés mais là n'est pas le sujet de mon propos. Être expérimentateur est difficile et la maîtrise ne s'acquiert que par des années d'expérience sur un instrument. Il est tout à fait faux de penser que, si un électron a telle vitesse, un instrument servant à mesurer la vitesse des électrons donnera le résultat exact. L'expérimentateur doit régler soigneusement les paramètres de l'instrument, éliminer tout champ magnétique extérieur, ne pas se tenir lui-même trop proche (la proximité de son corps dévie les champs magnétiques), tenir compte du vieillissement de l'appareil, de la température, de l'humidité et de l'âge du capitaine... Les théoriciens, étant peu familiers avec toutes ces subtilités, ont énormément de difficulté à réussir même des expériences faciles. De sorte que, graduellement, une réputation s'est faite que plus un physicien est un bon théoricien, plus l'expérience a de fortes probabilités d'échouer...
Un excellent théoricien, Enrico Fermi, s'était bâti une solide réputation comme excellent théoricien en faisant involontairement rater certaines expériences pourtant bien préparées. Il n'intervenait même pas, il suffisait qu'il soit là, sans rien dire et sans rien faire...
Une fois, des expérimentateurs dans un laboratoire en France font une expérience passablement délicate. À un certain moment, disons 11:52 heures, tout flanche d'un coup. Le directeur du laboratoire, à titre de taquinerie, envoie une lettre à Fermi, à Rome, l'informant qu'on avait probablement trouvé un autre théoricien aussi bon que lui et lui relatant l'expérience ratée, spécifiant que, cette fois, il n'était pas là pour la faire rater.
Cependant, Fermi n'était pas à Rome. On fit donc suivre la lettre à Copenhague où il était allé. De sorte que quelques semaines plus tard, le directeur du labo reçoit cette réponse de Fermi :
Cher collègue. À la date que vous mentionnez, j'étais en route entre Rome et Copenhague. Et, à l'heure que vous mentionnez, mon train était arrêté à la gare de votre ville...
Ton patron est peut-être un excellent administrateur : il suffit qu'il soit là pour que même les appareils défectueux fonctionnent?
