Ca, c'est pour moi
Oui.
La "phonétique", c'est l'étude des
sons tels qu'ils sont produits,
le plus précisément possible, selon tous leurs aspects : point d'articulation, mode d'articulation, voisement, etc.
En principe, la transcription phonétique se fait entre crochets, en API.
La "phonologie", c'est l'études des
phonèmes, c'est-à-dire des "sons" tels que les perçoivent les locuteurs d'une langue donnée et dans la mesure où ils s'opposent les uns aux autres.
En principe, la transcription phonologique se fait entre barres obliques, en utilisant l'API mais en usant parfois de la majuscule pour les "archiphonèmes".
Exemples :
- Suivant la région dans laquelle on se trouve, le /R/ français (notation phonologique) peut être réalisé de différentes façons : [ʁ] ou [R] sur la majorité du territoire métropolitain, [r] en Bourgogne (au moins parmi la population âgée), [ɹ] dans les Caraïbes et en Guyane, ou même [χ], etc. Mais pour les locuteurs, ce n'est jamais que les variantes d'un même son : on ne peut, dans aucune situation, opposer un mot avec un [ʁ] d'un mot avec un [r], par exemple. Donc, phonologiquement, il n'y a qu'un seul /R/.
Alors qu'en Allemand, [χ] s'oppose à [r] : "Bar" [bar] (le bar) est différent de "Bach" [baχ] (ruisseau). Phonologiquement, il y a deux deux phonèmes.
- Si je prends le mot "mucho" en espagnol : du point de vue phonétique, il y a cinq sons successifs, à savoir [m],
, [t], [ʃ] et [o]. Mais, du point de vue phonologique, le son [ʃ] ne peut jamais apparaître tout seul en espagnol, dans un aucun mot ; on a toujours [tʃ]. Donc, il n'y a qu'un seul "phonème complexe" [tʃ] en espagnol.
- Si je prends [t] et [d] en Allemand : au début d'un mot, ils peuvent s'opposer ; ainsi "danken" (remercier) [dankn,] est différent de [tankn,] "remplir le réservroi" (par [n,] je symbolise le [n] vocalisé, avec un petit trait dessous, que je ne peux pas faire).
En revanche, à la fin d'un mot, une dentale devient obligatoirement sourde : "Rat" (conseil) et "Rad" (roue) se prononcent également [rat], et si je dis [rat] sans autre précision, personne ne peut savoir si je parle d'une roue ou d'un conseil. On dira donc qu'il y a "neutralisation phonologique" du couple [t/d] à la finale en allemand.
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Tel est le principe et la théorie linguistique. Dans les faits, les linguistes eux-mêmes - moi le premier - sont parfois flou quand la différence n'est pas bien importante. Ainsi, dans les dictionnaires en France, on utilise systématiquement les crochets, et tous les mots avec un "R" sont noté [r], ce qui est plus une convention phonologique qu'une réalité phonétique (puisque précisément, le [r] "roulé" est plutôt rare chez les francophones). De même qu'on emploie parfois le mot de "phonème" à tort et à travers.
De plus, la frontière est floue : ainsi, en français, l'opposition phonologique entre [a] et [ɑ] est discutable ; il y a quelques très rares mots où on peut créer des paires : "pâtes" et "patte" par exemple, et encore dans certaines régions seulement.
De même que l'on dira parfois qu'il y a "phonologiquement deux /R/ en portugais européen", car les lusophones lisboètes sont conscients que le son de "a rua" est totalement différents de celui de "falar". Mais, si l'on voulait être strict, on pourrait qu'il n'y a qu'un seul /R/, car la différence entre les deux ne dépend que de la place dans le mot. On ne peut pas opposer un mot avec [r] et un mot avec [ʁ].