
Une passionnante question comme on aimerait en avoir plus souvent...
Ι. δέχομαι, danken, etc.
Un bon exemple du danger des ressemblances fortuites. Ce n'est tout simplement pas possible pour des raisons de phonétique fondamentale :
A) Un [d] initial en grec ne peut provenir que d'un [d] indo-européen. Les [dh] donnent [th] (ἔθηκα = feci = adhat) et les [t] restent [t].
B) un [d] initial allemand ne peut pas provenir d'un [d] indo-européen !
En effet la première mutation consonantique suppose [d] > [t] (cf. δέκα / decem / mais angl. ten). Après quoi la seconde mutation consonantique suppose [t-] > [ts-] (pour rester sur le chiffre dix : zehn ! Ca marche aussi avec la dent : dens en latin, mais Zahne en allemand).
Pour ce qui est donc de Dank etc., l'étymologie proposée par Pokorny puis l'Online Etymological Dictionnary est phonétiquement possible, cela dit tous les dictionnaires ne la reprennent pas : comme l'ont signalé nos amis Pc2, la divergence de sens est quand même lourde... Je n'ai pas d'avis supplémentaire, tout ce que je puis dire, c'est que "Dank" est extrêment présent dans tout le domaine germanique, (vieux-norrois þǫkk, gotique þagks).
Pour ce qui est de δέχομαι, Olivier a donné l'étymologie généralement admise. On considère parfois que l'idée fondamentale serait qqchose comme "réagir et/ou s'adapter à quelque chose que l'on reçoit", ce qui explique à la fois le latin
decet "il convient" que δοκέω "penser", mais aussi l'arménien
tesanem "voir". Benveniste voulait y rattacher
dexter, δεξιός "droit", qui serait "le côté favorable, ce qui est conforme à la règle"...
II. L'aspiration dans δέχομαι/δέκομαι
D'abord il faut savoir que les deux forme existent : δέκομαι est courant en ionien et est la forme d'origine.

Je crois que vous êtes en hypokhâgne, et helléniste... Donc, vous maîtrisez bien évidemment sur le bout des doigts la conjugaison des parfaits en occlusive, §136 dans la grammaire de Ragon-Dain

. Et vous savez donc que ἄγω, qui fait ἦγμαι au parfait (oui car vous maîtrisez aussi vos 324 verbes irréguliers

...) fait ἦχθα à la 2pl du parfait , ἦχθον au duel (car vous n'oubliez jamais d'apprendre le duel

), etc. et donc ἦχθαι à l'infinitif parfait passif. Ce χ, qui est le résultat de < *ἦγσθαι, est celui que l'on retrouve dans δέχομαι.
Plus précisément : vous savez que l'on divise les verbes grecs en verbes thématiques, avec leur fameuse voyelle thématique comme λυ-ό-μεθα, et en verbes athématiques, c'est-à-dire tous les "gros" irréguliers (είμι et sa bande, εἶμι aller, les verbes en μι, etc.), qui en général sont plus anciens dans la langue, et sujet à différents accidents phonétiques.
Or, il existe chez Homère un verbe qui a dû être quelque chose comme *δέγμαι (i.e. < *δέκμαι, mais il n'est pas attesté à toutes les formes). Qui fait donc logiquement à l'infinitif δέχθαι < *δέκσθαι... Devant la difficulté, les Grecs ont normalisé à partir de cette infinitif et ont donc inventé un présent thématique δέχ-ο-μαι.
Si vous avez encore des questions...