C'est l'histoire, vraie donc, d'un monsieur respectable de mettons quarante-quarant-cinq ans, qui a un bon travail, de beaux enfants, une fort belle femme et une belle maîtresse encore. Rien que de très normal, donc. C'est justement chez cette dernière qu'il se trouve, un matin, lorsque entre deux papouilles son téléphone portable retentit : un appel de sa femme.
- Oui chérie ? (dit-il d'une voix confite d'une gentillesse mielleuse inversement proportionnelle à la mauvaise conscience qui l'étreint à ce moment-là, en même temps que sa maîtresse d'ailleurs).
- MAIS PUTAIN T'ES OU QU'EST-CE QUI SE PASSE ! (dit l'officielle d'une voix exprimant l'horreur et l'effroi).
- Mais au bureau, ma gazelle en sucre [ou autre joliesse outrée, afin de rattraper une situation dont il commence à soupçonner qu'elle pourrait être plus compliquée que prévue], comme tous les mardi.
- ... (silence interloqué meurtri d'un souffle que l'on devine coupé, mais c'est pas facile à rendre par écrit)
- ... (silence en réponse, vaguement inquiet et attentiste)
- Co... comment ça au bureau ?
- Eh bien oui, au bureau, dit le cocufiant, en agitant désespérement quelques feuilles et stylos, afin de donner quelque vraisemblance phonique à son mensonge.
Ce qu'il ignorait, c'est que son bureau, comme le bureau voisin, comme les deux cents étages de bureau au-dessus et les cinq cent quatre-vingt-dix-neuf en-dessous, et comme tous les bureaux de l'immeuble, venaient d'être percutés par un avion de ligne détourné par des terroristes islamistes, ce mardi onze septembre, vers dix heures du matin...
... Si mes souvenirs sont bons, le divorce fut prononcé en mai 2002.
