
S'agissant de "pendulaire" ou "navetteur" - que personnellement je trouve très bons : clairs, conformes aux règles morphologiques et sémantiques, etc. - la difficulté peut aussi venir de ce que le concept de pendulaire/navetteur est moins évident en France.
La Belgique est en effet une zone totalement urbanisée ou presque, et multi-polaires : plusieures villes, grosses ou moyennes, se partagent le terrain, bien reliées entre elles par un assez dense réseau de train. De même en Suisse, où le maillage des CFF est très dense (

c'est une des choses que j'aime dans ce pays auprès duquel j'ai vécu). Dans les deux cas, on peut habiter dans une ville moyenne et travailler dans une grosse ville (du type Namur/Bruxelles ou La Chaud de Fond/Neuchâtel).
En France, la seule zone connaissant franchement des migrations pendulaires, c'est la région parisienne (Melun/Paris), organisée d'ailleurs autour du RER. Lyon est la deuxième ville de France, et pourtant, autant que je puisse en juger, il n'y a pas de migrations pendulaires St-Etienne/Lyon.
Ailleurs, les migrations sont plus restreintes, essentiellement automobiles, du type centre/banlieue ou ville/campagne (ce qu'on appelle en géographie les "rurbains" (j'habite en zone rurale mais je travail en ville et j'ai un mode de vie urbain).
Bref, c'est pas seulement une question de mot, c'est aussi une question de géographie (Migueeel ! On a besoin de toi) et de civilisation.
Les "turbo-profs" sont une exception notable, mais justement très spécialisée ; liée à la structure de l'enseignement supérieur français et au poids excessivement dominant de Paris, numériquement, mais aussi et surtout "idéologiquement". : ca s'améliore un peu depuis dix ans, mais pour beaucoup, il n'y a
pas d'université hors de Paris (ce fut très exactement vrai jusqu'à la fin du XIXe siècle !). L'idée d'habiter à Besançon, Reims ou Clermont-Ferrand apparaît à peu près aussi absurde pour certains jeunes universitaires que pour un cadre gagnant bien sa vie d'aller habiter dans une banlieue ouvrière.
Les turbos se classent en deux groupes : les jeunes maîtres de conf' venant là faire leurs premières armes, en
attendant un poste précis à Paris, et d'autres plus âgés qui viennent, en gros, inculquer des rudiments de savoir à des indigènes. Pour eux, c'est quasiment du social

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Ann, il faut vraiment que je t'aime beaucoup
pour te pardonner de rentrer dans cette catégorie. Enfin, techniquement, pas intellectuellement
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Pour ce qui est de l'acclimatation des mots venues des "autres" francophonies, je suis totalement d'accord avec Ann.
Je suis un peu une exception, ayant vécu à côté de la Suisse, visionnant la télé suisse (de meilleure qualité que la française à tous points de vue) et lisant la presse helvétique. Mais la francophonie est une idée assez abstraite, à dire vrai, pour beaucoup de Français.
Un Anglais sait qu'il peut aller étudier dans une fac américaine, et quand un anglais regarde le monde anglophone, il voit des pays développés, et souvent plus riches que le sien : Etats-Unis, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande. Malgré quelques (maigres) différences culturelles, il y a quand même une continuité civilisationnelle
pas très beau comme néologisme qui double la continuité linguistique.
Alors que ce n'est pas du tout le cas pour un Français. Les francophones de l'extérieur lorgnent sur la France (Liban, Afrique du Nord et Afrique noire, etc.), et encore : la concurrence avec le monde anglophone est de plus en plus grande, notamment dans le domaine universitaire. Et le contraire ne se produit pas : on ne va pas étudier à Dakar ou à Beyrouth, ni même à Genève ou à Louvain-la-Neuve, qui sont pourtant d'excellentes universités.
Le Québec est ou sera peut-être l'exception. Ann est l'exemple-type de ce genre de nouvelles dépendances culturelles "équilibrées", et elle n'est pas la seule universitaire de ma connaissance à être allée se refroidir et se cultiver à l'Université Laval. D'autres partent également au Québec dans un but professionnel, au sens large, etc. Mais il y a quand même une "rupture de civilisation" plus nette que dans le monde anglophone. Ni les journaux, ni la télé (TV5 est riquiquie, quoique d'une grande qualité) ne traversent encore vraiment l'Atlantique... La toile, par contre, pourrait bien changer les choses. Mais tout le monde n'est pas "forum-addict" (ou "forumomaniaque"

) comme Ann, SubEspion ou moi-même.