ElieDeLeuze wrote:svernoux wrote:Ils ont de la chance quand même tes élèves : il n'y a pas de programme imposé ?
Pour la maturité seulement en partie. Ce n'est pas du tout comme en France.

En France non plus il n'y a pas d'oeuvre imposée en tant que telle aux épreuves de français (de première). J'ai des
objets d'étude (en gros les genres littéraires : argumentation, poésie, théâtre et roman), avec des petites variantes (en première, le théâtre doit plutôt porter sur l'aspect scénographique, mes élèves doivent savoir ce qu'est une mise en scène ; en roman, mes élèves doivent réfléchir sur les personnages et la "vision du monde" offerte par le romancier...) et des textes de cadrage plus ou moins abscons, plus ou moins imposés par les inspecteurs et plus ou moins suivis (l'habitude d'être interrogateur et la réalité des élèves "cadrent" d'ailleurs beaucoup plus que n'importe quel autre arsenal législatif), mais c'est moi qui choisis
tous les livres.

Ca, c'est le vrai bonheur du prof de français...
Il n'y a qu'à l'épreuve de littérature de terminale L qu'il y a un programme national. En gros comme en Suisse.
J'avais même Thérèse Desqueyroux il y a quelques années, tout le monde déteste ce bouquin, moi y compris, mais tout le monde le trouvait simple à commenter et moi j'admets ouvertement que c'est à chier mais que c'est pédagogiquement absolument parfait pour apprendre à travailler sur la littérature.

Moi je le trouve génial littérairement
et pédagogiquement... Mais je te soupçonne de ne pas assez connaître intimement la bourgeoisie française de terre et de trop connaître la bourgeoisie suisse d'argent pour l'apprécier pleinement.
Comprendre Mauriac, à défaut de l'admettre, suppose de comprendre (sans forcément l'admettre) deux infinis : Dieu, et la théière en argent accompagnée d'un service de Limoges et d'une serviette à thé bistrée.
Avec le film qui sort, je vais demander si ça leur fait envie. Dès qu'il y a un film, ils disent toujours oui.
My name is Sisyphus and I approve this movie.
Pour Amélie Nothomb, ils l'ont regretté: pour eux, cette fille est une tête à claque, rien de plus.
La littérature francophone contemporaine est un vaste merdier (oui, je sais, je suis renommé pour mes jugements esthétiques complexes, argumentés et subtiles

). Les quelques rares qui réussissent à avoir soit un vague projet de fond (comme Houellebecq), soit un vague talent de style (comme Nothomb) ne peuvent qu'émerger, même s'ils n'ont jamais l'autre. J'utiliserais Nothomb en 3e/2e, pour les effets de style, pour leur faire voir comment on peut faire des choses rigolotes avec la langue française. Mais dans une liste de bac, jamais
La plupart des occasions des troubles du monde sont grammairiennes (Montaigne, II.12)