nuba wrote:Bonjour,
J’aimerais commencer des études de linguistique historique et comparative, mais j’ignore s’il y a des universités en France qui offrent ce sujet d’études dès le DEUG.
Concernant les langues, on peut normalement étudier LLCE ou LEA, mais là, il faut choisir une certaine langue et l’aspect historique n’y est traité que marginalement.
D'abord, je rappelle que le DEUG n'existe plus. Paix à son âme. Par la grâce des réformes LMD, le premier diplôme, c'est la licence. On parle donc de première, deuxième et troisième année de licence.
Il n'existe pas de licence de linguistique comparée. En France, la voix royale pour étudier la linguistique comparée, c'est l'agrégation de grammaire (ce que je fais). Ce qui impose de suivre un cursus de lettres classiques jusqu'en maîtrise, puis de faire une maîtrise en linguistique ancienne avec un professeur habilité à la diriger, et enfin de se présenter à l'agrégation... et de la réussir (

ce qui est loin d'être facile). Note : je ne sais pas combien de temps encore l'agrégation de grammaire* continuera d'exister.
Bien sûr, c'est
après l'agrégation que les choses sérieuses commenceront : DEA puis thèse. C'est à partir de ce moment-là que vraiment l'on se spécialise dans un domaine précis, par exemple l'indo-européen lui-même, plutôt que la linguistique du latin ou des dialectes grecs, ou encore du sanscrit.
L'agrégation de grammaire est, à la base, une agrégation de prof de français latin grec, donc elle comporte une dissertation de littérature, thèmes et versions en latin et grec. A quoi s'ajoute de l'ancien français, de la grammaire française moderne (synchronique, ce que fait Ann), de la linguistique du latin et de la linguistique du grec, qui obligent toutes les deux à remonter à l'indo-européen. En option B, où je suis, on fait beaucoup de linguistique du latin-grec-sanscrit, et très peu d'ancien-français-grammaire moderne. En A, c'est le contraire.
A noter qu'il est généralement conseillé, lorsqu'on s'embarque dans ce cursus, de suivre en parallèle des cours de sanscrit. Et j'aurais aimé, mais je n'ai pas pu, suivre des cours de linguistique historique dans d'autres langues (germaniques, notamment).
Il est bien sûr possible aussi de suivre un cursus de langues vivantes (LLCE dans ce cas), en suivant les UV de linguistique historique de cette langue, puis de faire une maîtrise dans ce sens (par ex. "linguistique historique de l'allemand"). Et, après l'agrégation (de fait
obligatoire si l'on veut poursuivre une carrière universitaire en France), de se spécialiser dans ce domaine...
... Mais attention : toutes les facultés ne proposent pas de linguistique historique de leur langue. Et comme tu le dis, dans les trois premières années, ce ne sera que marginal (une UV, deux heures par semaines ; peut-être trois s'il existe une option spéciale en licence 3). Les sections d'anglais, pour une raison qui m'échappe, en font rarement (ce qu'elle appelle "linguistique", c'est toujours de la sociolinguistique, plus un chouia de phonétique). Les professeurs de linguistique historique de l'allemand, de l'anglais, etc. existent, mais ils ne sont pas tripette. Il faut bien choisir. Le plus simple, c'est encore d'aller dans une BU trouver le nom des principaux auteurs de linguistique allemande, anglaise, etc. et de voir où ils enseignent, et d'aller là-bas.
Enfin, il existe des séminaires de linguistique historique à l'Ecole Pratique des Hautes-Etudes (je vais essayer de retrouver l'adresse). Mais là, le cadre est un peu différent : aucun diplôme précis n'est exigé à l'entrée, mais la sélection est rude ; et le diplôme qui est délivré est propre à cette école. En général, on y entre plutôt à partir du troisième cycle, en parallèle à une thèse.
Il faut bien avoir conscience qu'envisager des études de linguistique historique, que ce soit pour l'indo-européen en général, ou dans une langue ou un groupe de langues-filles en particulier (germaniques, slaves, etc.), c'est envisager des études
longues (thèse = 8 ans mininum, dans les faits un peu plus), et débouchant essentiellement (pour ne pas dire uniquement) sur le métier passionnant mais rude (et peu payé

) de chercheur.
PS : Je n'ai pas très bien compris quelle était ta situation, Nuba ? Tu es encore lycéen ? Tu t'apprêtes à passer un bac français ? Un abitur allemand ?
N’est-il pas possible d’étudier un sujet tel que les langues indoeuropéennes et leur développement en général pour reconstituer des proto-langues anciennes et pour découvrir dans quel degré les différentes langues actuelles sont apparentées entre elles ?

Bin oui, c'est ce que font les indo-européanistes depuis le XIXe siècle !
Cela dit, la notion de "proto-langue" fait largement débat. Il n'est pas sûr que "l'indo-européen" ait été "une" langue. En tout cas, ce que l'on reconstitue, ce n'est pas une langue, c'est plutôt un schéma théorique. Si je compare le latin bos, le grec bous, l'allemand Kuh, l'anglais cow et le sanscrit gauH, je peux reconstituer un étymon *gwôw-s. Mais il n'est pas certain que quelqu'un ait jamais dit *gwôws pour désigner la grosse bête qui fait meuh
