svernoux wrote:Sisyphe wrote:Bruno Gollnisch (qui est professeur de japonais dans cette université)
Ouh ben je savais pas qu'il enseignait le japonais ! Tu fais bien de le dire parce que je compte peut-être chercher des cours de japonais à Lyon (même si je ne pensais pas à la fac dans un premier temps...)
Et ça m'inspire une question : S'il enseigne, c'est qu'il a des étudiants. Qui sont-ils ? Partagent-ils tous ses idées (ça m'étonnerait quand même) ? Supportent-ils avec dégoût un tel professeur parce qu'ils n'ont pas le choix ? Ou sont-ils complètement indifférents ? Et comment se passe une cours de japonais avec Gollnisch ? (je veux dire : y fait-il de la propagande ou pas ?)
Sinon, sur le reste, rien à ajouter à ce que tu as dit.
Pour être honnête, jusqu'ici Gollnisch avait échappé à mon ire. Soyons clair : je déteste viscéralement ce personnage et ce qu'il représente. Mais d'une part personne ne conteste ses capacités comme professeur de langue et de civilisation japonaise, et d'autre part, jusqu'ici, il n'avait pas mis en cause ses activités universitaire, ni le prestige qu'il est en droit d'en tirer, dans ses activités politiques, ni l'inverse à ma connaissance. Jusqu'à cette déclaration du moins.
On ne peut pas reprocher à un universitaire ses opinions politiques, fussent-elles détestables ; c'est du domaine de la liberté de conscience. On ne peut même pas lui reprocher de les manifester, fut-ce médiatiquement, tant qu'il le fait dans un cadre extérieur à la faculté.
Par contre, on peut et on doit les lui reprocher s'il se sert de son magistère pour proprager ses idées. Et surtout, on peut et on doit le lui reprocher, et avec force, s'il manipule son domaine de savoir pour avancer ses idées ; car dans ce cas il y a faute non seulement envers les obligations dues à l'université, mais encore faute à l'égard de l'éthique même de la science.
À ma connaissance (et je crois être bien informé), Gollnisch n'a jamais avancé quoi que ce soit dans ses cours et ses publications que l'on puisse soupçonner d'idéologie raciste. On peut s'étonner qu'il ait été fait prof et surtout doyen de la fac de langue relativement jeune - mais après tout les stratégie de pouvoir sont permanentes dans l'Université. Il n'a sans doute pas plus manoeuvré que n'importe quel autre assoiffé de pouvoir mandarinal - la lâcheté des autres aura fait le reste.
Bien sûr, que Gollnisch soit précisément à Lyon III et pas ailleurs est surprenant. Mais en tant qu'universitaire, il ne rentrait pas dans la même catégorie que les Allard, Haudry, Notin, etc.
Quant à savoir ce que font les étudiants... J'en ai très rapidement connu un, mais je n'ai pas osé lui demander. J'en ai connu une qui voulait commencer le japonais et qui justement voulait éviter cette section - finalement elle a fait du japonais à l'ENS de sciences (ce qu'elle pouvait faire, étant elle-même normalienne). Sans cette déclaration, j'aurais à la rigueur, si je n'avais pas eu le choix, supporté d'assister à ses cours, tout en le méprisant profondément, et sans lui adresser la parole.
Alors que jamais au grand jamais on ne me verra dans un cours d'Allard ou de Haudry. C'est d'ailleurs une question qui se pose à moi : j'aimerais, si j'en ai l'occasion, faire une licence d'allemand et spécialement étudier la linguistique germanique. Techniquement, il serait logique que je m'inscrive à Lyon III - c'est plus proche de chez moi (la fac de langue, à Lyon II, est à Bron !), et Lyon III a un bon encadrement. Seulement je ne veux pas me retrouver devant Allard (qui précisément s'occupe de linguistique allemande !), qui a participé au jury Roque (voir lien) et qui a donc accordé un doctorat et une mention à une thèse ouvertement négationiste.
C'est vrai que ce serait assez intéressant de savoir comment ça se passe et quelle est la réaction des étudiants. A mon avis beaucoup sont résignés, de toute façon on ne peut pas choisir sa fac ni ses profs, et s'il y avait un moyen de le faire expulser je pense que ce serait déjà fait (comme le dit Sisyphe ces gens-là savent ce qu'il faut faire pour rester dans la limite de la légalité). Donc je suppose qu'en cours le prof doit s'en tenir au japonais, parce que tout le monde doit guetter le moindre dérapage
Si c'était vrai !
Que tout le monde guette le dérapage, ce n'est pas tout à fait juste. L'exemple de l'affaire Lugan est assez net : ce soi-disant historien africaniste est un jour arrivé en costume colonial et s'est mis à chanter des chants racistes (voir lien). Une partie des étudiants a réagi, sauf que Lugan avait aussi des "fans" (pas forcément inscrits à la fac, à mon avis) et l'affaire s'est terminée en pugilat violent. Or, tout ce que la présidente de l'Université a trouvé à redire, c'est que les étudiants n'avaient pas à troubler le cours d'un professeur ! Lugan est toujours là.
Car c'est bien là le problème : IL Y A des moyens de les expulser, l'Université possède théoriquement un système disciplinaire. Tous n'ont pas la prudence d'un Gollnisch : Haudry continue d'écrire que les Indo-Européens étaient blonds aux yeux bleus, la thèse de M. Roque écrivait noir sur blanc que les chambres à gaz étaient une légende, et l'on dispose de toute l'attirail réglementaire de la soutenance, y compris les questions et félicitations qu'Allard (qui soit dit en passant n'est pas historien) a adressé au candidat ! Et pourtant, il enseigne toujours !
De faits, la poignée de facho qui minent Lyon III ont toujours été plus ou moins protégé par la complexe direction de l'Université. Il a fallu que Michel Noir, le maire de Lyon, fasse pression sur eux en menançant de ne pas reconduire les baux des bâtiments dont la mairie était propriétaire pour qu'ils virent Notin, dont les écrits négationistes sont là encore, clairs et sans ambiguïté. Le précédent président a presque eu la peau de l'association Hippocampe en lui collant un procès pour diffamation - précisons que Lyon III est essentiellement une fac de droit, et que ses dirigeants en sont souvent issus. Une armée de juristes professionnels contre des étudiants d'histoire.
Ce qui est affligeant dans toute cette histoire depuis trente ans, ce sont moins les délires d'une poignée d'excités d'extrême-droite que l'incommensurable lâcheté (espérons que ce n'est que cela) du monde universitaire et de ses "mandarins".
