Je vais reprendre comme exemple l'expérience que j'ai faite de la traduction simultanée lors du Congrès du Parti Radical International dont j'ai déjà parlé dans un post précédent.Ceux qui ont besoin de communiquer ont à leur disposition tous les "outils" nécessaires : interprètes, traducteurs, traducteurs de poche, etc.
La première journée de ce congrès c'est déroulée dans une salle de conférence d'un grand hôtel de Bruxelles, dans laquelle des cabines de traduction (français, anglais, italien, allemand, espéranto) avaient été mises en place pour la circonstance. Chaque participant 350 personnes environ ayant à sa disposition un récepteur sans fil et un casque avec des écouteurs. Je ne connais pas le coût de l'heure d'interprétation ni de la location d'un tel équipement. Il s'agissait là d'un parti politique dont j'ignore tout du financement, ce n'est d'ailleurs pas mon propos, mais je doute qu'une quelconque association dépourvue de ressources conséquentes qui se voudrait internationale puisse se permettre un tel luxe.
Pour la deuxième journée une salle équipée et des interprètes avaient été mis à disposition au sein du parlement...
Si tous les participants avaient été espérantophones le coût de la location de matériel et le coût de l'interprétation auraient été nuls.
J'avais écrit :
Svernoux a répondu :je considère que la traduction simultanée en cabines, aussi bonne soit-elle, n'est pas de la véritable communication car trop artificielle.
J'avais écrit :Pas plus artificielle que ne l'est l'espéranto...
Svernoux a réponduElle ne peut se faire que dans des lieux appropriés, elle crée un "filtre" qui dépersonnalise le locuteur
Je peux assurer à ceux qui ne verraient rien d'artificiel là dedans, que l'artifice est non seulement visible, mais encore palpable et qu'à la fin de la journée il vous chauffe les oreilles.Pas un filtre plus gênant que celui créé par le recours à une langue tierce et artificielle.
Une charmante dame monte à la tribune et prend la parole...elle s'exprime d'une voix douce et agréable dans une langue que vous ne connaissez pas... Vous "coiffez" vos écouteurs (en espéranto "sur/orel/igi" mettre sur les oreilles, sonne plus juste) et vous entendez la voix rauque et virile de l'interprète. Moi ça me paraît artificiel...
Un autre orateur s'enflamme à la tribune, vieux militant du parti, italien de surcroît, vous pouvez imaginer ce que cela peut donner. Que nenni, dans vos écouteurs l'interprète essaye bien d'y mettre le ton, mais quand on voit comment l'autre gesticule et vocifère on sent bien qu'il y a comme un décalage... Pour moi c'est artificiel...
Pour prendre la parole il faut appuyer sur un bouton et attendre sagement qu'on vous la donne, point de place ici à la spontanéité...
Nous autres espérantistes qui avons l'habitudes de congrès qui rassemblent aussi plusieurs centaines de personnes de nationalités différentes, n'avons besoins ni d'écouteurs, ni d'interprètes. Certains pensent que ça n'en est pas moins artificiel...
Les espérantistes avaient été invités à titre consultatif en vue de la création d'un comité chargé de préparer une expérimentation sur l'espéranto au niveau européen.
Nous étions une trentaine environs, de nationalités : belge, allemande, danoise, estonienne, française, anglaise, hongroise, italienne, néerlandaise, polonaise, portugaise, croate, bulgare et roumaine.
Nous nous sommes réunis en séance de travail. Une fois entre nous plus d'écouteurs, plus d'interprète.
Que que croyez-vous qu'il arriva :
Chacun s'exprime, les questions fusent, certains ne sont pas d'accord avec ce qui vient d'être dit et interpellent l'intervenant de vive voix...Après deux heures de débats nous sommes en mesure de présenter un rapport de travail. Pour certains c'est tout autant artificiel...
Cette expérience n'a fait que conforter l'opinion que je m'étais faite de la traduction simultanée à la lecture d'auteurs tels que MM. Georges KERSAUDY (voir l'interview de Freelang) et Claude PIRON (voir l'adresse de son site sur un post précédent) eux mêmes ex-traducteurs à l'ONU et dans différentes organisations internationales.
J'invite les détracteurs de l'espéranto à faire la même expérience et à nous faire part ensuite de leurs opinions.
Bernard(o)