
Voilà, j'ai tout un roman à raconter à ce sujet!
Pour Gfa : j'espère que ça te sera utile ou au moins divertissant.
D'abord, quand on travaille chez soi, la gestion de la liberté et des obligations est difficile parce que celles-ci ne sont pas définies par un cadre extérieur. On doit assumer ça tout seul.
Ah oui, j'allais oublier : pour commencer, je précise que je suis traductrice pour une petite boîte. Je peux tout faire à distance grâce à la magie de notre ami Internet. Mon patron - traducteur aussi - travaille chez lui également. Et malgré la distance, j'arrive à m'occuper de certaines tâches de gestion à sa place sans que personne ne sache qu'on est chacun chez soi. Je répartis aussi le travail parmi les collègues, toujours au moyen du courriel.
Pour moi, le travail à la maison était le seul mode de vie possible, étant donné mon énorme besoin de liberté de mouvement.

Donc, ce mode de vie me convient.
Mais

ça ne veut pas dire que c'est facile.
Toute cette liberté doit sans doute être gérée comme si on venait de gagner le triple de son salaire annuel à la loterie. On dispose alors d'un gros montant d'argent dont on se DOIT de profiter, mais qu'il faut en même temps éviter de dilapider d'un seul coup. Cette gestion ne se fait pas à la va comme je te pousse, il faut prendre le temps de budgéter.
Comme tu es comptable, ça doit quand même t'être familier! Je dirais que c'est la même chose avec le travail à la maison, étant donné la grande responsabilité de gestion qui revient à une seule personne : toi-même. Ton objectif est donc de veiller au bien de ton travail, tout en profitant de ta liberté. Pour ça, il faut prendre le temps de réfléchir à la meilleure façon de faire, voir comment les autres fonctionnent (opération en cours!), comment tu peux fonctionner, utliser le papier et le crayon (ou un beau tableau graphique dans l'ordinateur!).
Si je poursuis mon parallèle avec l'équlibre budgétaire, on peut dire que j'ai la chance de gérer mon temps à la petite semaine, ou même à la petite journée! Les délais que j'ai à rencontrer se présentent tout au long d'une même journée ou d'une même semaine, ce qui permet de garder une vue d'ensemble et d'être plus facilement à son affaire.
Étant donné ma personnalité, je devrais faire tout un apprentissage si j'avais des travaux à long terme. Il faudrait alors que je me crée un horaire, mais comme je trouve les horaires plutôt contraignants, même les miens, il faudrait alors
- Soit que j'adapte ma perception pour accepter de suivre un horaire (ce qui est tout de même très faisable);
- Soit que je trouve une façon de travailler sans faire d'horaire mais de façon à pouvoir tout bien faire et éviter le stress à l'approche de la date d'échéance;
- Cela dit, la solution la plus efficace, qui peut aller de pair avec les deux précédentes, consiste à diviser le travail à long terme en petites parties, et à faire cette planification bien en détail avant de commencer (on peut toujours adapter son plan en cours de route, de toute façon).
Et même pour des délais qui reviennent plusieurs fois par jour, pour bien s'organiser, il faut nécessairement connaître son rythme de travail et se laisser une marge de manoeuvre en conséquence. Si je pense que je traduis habituellement mille mots à l'heure, je dois réserver une plage de deux heures pour les éventuelles difficultés, les imprévus et les pauses. Et je réajuste au besoin.
Voici mes règles d'or pour la motivation du travailleur à domicile :
1. Ne jamais rester seul avec ses préoccupations sous aucune considération! Il faut que quelqu'un quelque part soit au courant de ce sur quoi tu travailles. Quelqu'un à qui tu vas raconter de temps à autre comment ça avance. Au fond, ce mode de vie ressemble à celui des études supérieures : il faut une personne qui soit là à titre de mentor ou au moins de motivateur. Idéalement, la famille et les amis servent aussi de soutien au travail. C'est toujours bon de demander à une personne proche (si elle a le temps) : « Regarde cette page que j'ai écrite et dis-moi ce que tu en penses ».
Dans mon cas, le contexte facilite l'application de cette règle : durant toute ma journée de travail, j'ai les collègues (au nombre de cinq) avec qui je peux clavarder joyeusement. Le chat nous sert à discuter des petites colles de tel ou tel texte (surtout parce qu'on travaille en équipe), à nous relancer les uns les autres pour savoir quand est-ce que l'autre va avoir fini son texte parce qu'il y en a un nouveau qui arrive dans la chaîne de montage, etc. Tout ça en plus des nombreuses conversations délirantes. Parfois, un simple qrblhzwrewvkkrdzjlb bien envoyé fait toute la différence!

Ceci n'est pas une blague : un échange absurde ou moins absurde (« comment va ton poisson rouge ») avec d'autres personnes nous replace en situation de société, ce qui est essentiel pour bien travailler.
Et il y a bien sûr ma découverte de cet été : le merveilleux forum ici présent! Très sérieusement, j'ai réalisé que le fait de venir y jeter un coup d'oeil, de se trouver avec du monde, même sans voir toutes ces personnes, est encore une fois très bénéfique. C'est l'idée d'échange qui est la clé. Pour faire une autre belle image illustrant cette idée d'échange : l'énergie que tu consacres au travail doit circuler comme le courant d'une rivière - si ça ne circule pas, ben... ça devient de l'eau stagnante!
2. Adapter sa façon de travailler à sa personnalité et même à son humeur. Comme je le disais, les horaires imposés ne me conviennent pas. Mais si je reste maître de ce que je fais (si j'ai tout le contrôle de la situation!

), je prends du plaisir à être disciplinée et organisée. Donc, la motivation marche comme ça avec moi. Il faut vraiment se connaître et savoir de quoi on a besoin pour être motivé. Une autre chose qui m'aide beaucoup consiste à surveiller mes envies de fuite. Certaines personnes, quand elles sentent beaucoup de pression, peuvent interrompre leur travail sans s'en rendre compte et se lancer dans des activités de divertissement encore plus prenantes (le forum!!), juste pour échapper à la pression. C'est mon cas.

Sauf que si c'est sans s'en rendre compte, on peut perdre la notion du temps et se réveiller en sursaut : « M***

, où est-ce que j'étais, là? Trois heures de travail à rattraper!

» Je suis donc attentive à ces envies de fuite, et dès que je les vois venir, je m'impose une pause! J'accepte consciemment et délibérément de passer 1/2h à faire tout ce que je veux (même à dormir dans le salon), et après, je suis contente de poursuivre mon travail. En gros, l'important est de s'assurer que la soupape qui libère la pression fonctionne bien et soit contrôlée consciemment.
3. Délimiter sa journée de travail. Mes collègues et moi, on travaille de 9h à 17h du lundi au vendredi,
point. Rien le soir, rien durant la fin de semaine. Quand la journée est finie, on se dit bonne soirée, et chacun passe à autre chose. Très important! Et si une traduction est en retard mais presque prête, je vais bien dépasser de vingt minutes, mais rarement plus. Sinon, tant pis, on continuera demain matin à tête reposée. L'être humain - et je l'ai réalisé en approchant la trentaine - a des capacités incroyables mais limitées. En travaillant à la maison, on risque d'oublier ces limites. Aussi faut-il penser à respecter les frontières de l'humainement possible afin d'éviter la perte de motivation et le travail mal fait. Pour cela : être attentif à sa lassitude, au cerveau qui surchauffe et aux épaules (mains, jambes...) tendues.
4. Travailler dans une pièce uniquement vouée au travail. Ne surtout pas installer son ordi dans la chambre à coucher, on risque de faire de l'insomnie.

Ne surtout pas habiter un logement d'une seule pièce très grande où se côtoient le lit, le poste de travail, le divan et la table (mais ça, ça doit être moins fréquent en Europe).
5. Aux quarante-douze-huit personnes qui t'appellent ou viennent te voir parce qu'elles croient que tu es disponible, vu que tu es à la maison

, tu accordes un temps limité. Après un certain temps (dix minutes?), tu as le droit de dire : « On s'en reparle, je dois travailler! » C'est bien sûr normal que les gens ne réalisent pas que tu es peut-être sollicité par plusieurs personnes chaque jour, mais c'est normal aussi de garder ton emploi du temps à l'oeil.
Et avec tout ça, tu as le bonheur de pouvoir interrompre ton travail quand tu veux pour aller explorer le frigo (posologie : plusieurs fois par jour

), laver une pile de vêtements, écrire des courriels, faire une tournée d'arrosage de plantes, etc.
