10 mai : commémoration contre l'esclavagisme

Venez tous :o) ... blabla, coup de gueule, délire... Faut que ça bouge!!
domanlai
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Post by domanlai »

ann wrote: C'est justement la critique que faisait l'Express à cette nouvelle loi: le fait qu'elle ne permette pas à la vérité d'etre dite parce qu'elle n'en fait voir qu'une partie:
Perso, je ne soutiens pas spécialement une législation spécifique pour ce genre de choses. Je parlais surtout de la conscience que l'on peut en avoir. Si ce n'est pas parfait : et bien que cela soit complété. C'est mieux que le silence.
Mais sur le fond, je ne peux pas ne pas me dire que la reconaissance est un fait normal. Dans tous les déchirements humains, la reconnaissance est un passage obligé pour la guérison du blessé.
ann wrote: L'utilisation du mot migrant assimile ces personnes à des nomades pour l'éternité. Des immigrants ont par contre deux pieds dans le pays. N'ayons pas peur des mots ni des réalités.
Tu sais, la vie n'est pas aussi simple. Il y a deux ans je crois, je me suis faite traiter de raciste sur une liste de discussion car j'avais qualifié des 'immigrants' ... d'immigrants.
Le terme migrant me parait juste un peu plus vaste qu'immigrant.
ann wrote: Il faut aussi voir les cotés positifs... Pourquoi de nombreuses colonies ne veulent pas l'indépendance, pensons à la Réunion, où les indépendantistes n'existent pas... (et d'ailleurs, est-ce une colonie? à qui appartient-elle - il s'agissait d'une ile déserte...) Pensons aux pauvres Comores qui ont demandé l'indépendance puis supplié la France de les reprendre sous sa coupe et la France a répondu "débrouillez-vous".
Pour dire la vérité tous ces débats sur les colonies ne m'intéressent plus vraiment, parce qu'on sent que dans tout cela il y a toujours les choses qu'il est bon de dire et de penser. Simplement la colonisation ne peut se résumer à cela:
Je trouve ce discours pitoyable, triste ...
Tu es en train de dire que parce que certains territoires (pour des raisons très variables) n'ont pas réussi à se développer et qu'ils en sont rendus à supplier un ancien colonisateur ... cela justifie la colonisation. Je n'ai vraiment rien à répondre tellement ça me parait condescendant.

En ce qui me concerne , la colonisation n'est en rien différente de l'invasion d'un pays. Si tu regardes l'histoire, avant que la colonisation n'existe (avec sa mentalité paternaliste d'aller éduquer les non civilisés), il s'agissait d'invasion parfois suivie d'une très bonne gestion (ce point n'est jamais remis en question) des nouveaux territoires. Vraiment semblable.

L'historie est passée. Encore une fois, je ne vise pas les gens qui en ont fait partie mais le concept.
ann wrote:
domanlai wrote: Que dirais-tu si les japonais (je dis ça comme ça, hein ! il fallait que ça tombe sur qqn de pas trop proche culturellement ;) ) se ramenaient en France et prenaient le pouvoir ? En prenant bien soin de te payer et de te traiter légalement mais de manière générale ce serait plutôt les nouveaux détenteurs du pouvoir qui contrôleraient l'industrie, posséderaient les terres, occuperaient les postes hiérachiquement les plus élevés ... . Moi, ça ne me plairait pas ! Alors pourquoi eux devraient sauter de joie à ce sujet ?
Les Canadiens ont été abandonnés aux Anglais pour des intérets stratégiques de la France, les Anglais ont pris possession des commandes de l'Etat, c'est eux qui avaient les postes les plus élevés, les richesses du pays, y compris dans des régions comme le Québec où la population était en majorité francophone. Les revendications d'indépendance du Québec n'ont duré qu'un temps, ils ont obtenu un statut autonome à l'intérieur du Canada, les descendants des Anglais et les descendants des Français sont aujourd'hui tout autant Canadiens les uns que les autres. Bien sur les deux populations sont des descendants de colonisateurs et la population indienne n'a plus son territoire et n'a pas les postes hiérarchiquement les plus élevés....
En Algérie la fin de la colonisation a été un boum, une guerre: ça ne me plait pas que vous soyez là, vous avez tous les postes bien placés décampez. Et après (et c'est le meme problème en Afrique aujourd'hui) ? La relève n'était pas là, le pays est parti à la dérive. Au Maroc cela s'est fait progressivement, et il n'a pas connu la crise qu'a connu l'Algérie.
En bref, la question est un peu plus complexe. POur ce qui concerne le problème québécois je l'ai étudié en profondeur, pour ce qui concerne le problème africain, j'ai vécu l'Afrique, j'aime l'Afrique, tant du Nord comme du Sud, c'est le bordel, c'est tout ce que je peux dire, et la "décolonisation" a peut-etre rendu la "justice" dont tu parles: mon pays est à moi (quand un pays est-il à nous? doit-on rendre les territoires occupés il y a des siècles par les Arabes qui appartenaient aux populations berbères ou dire que sur les territoires qui appartenaient aux berbères les Arabes ne sont pas chez eux... ). DOnc mon pays est à moi, vous me l'avez pris longtemps, maintenant il est à moi à nouveau, mais vous devez m'aider à m'en sortir et me recevoir chez vous à bras ouverts parce que si je suis aujourd'hui dans la m... c'est à cause de vous... A cause de qui? En bref, tout ce que je veux dire c'est que ce n'est pas si simple et que la commémoration de l'esclavagisme n'est qu'une mesure politiquement correcte et historiquement incorrecte. [mais effectivement mon avis ne représente pas les sentiments des Français, et vous avez peut-etre besoin en France de vivre un grand mea culpa généralisé, pour qu'on ne vous accuse pas de racisme envers vos "migrants". La France n'est plus mon pays que "virtuellement", et je suis plutot écoeurée par tout cela, tellement qu'alors que je m'achetais le Monde plusieurs fois par semaine depuis 10 ans que je vis en Italie, après les discussions sur les banlieues plus ou moins j'en ai eu marre, et je n'achète que des journaux italiens. C'est ma manière à moi de sortir de cela. Ma mère qui est au courant de cela m'a abonnée au Nouvel Obs depuis peu et m'a envoyé les articles de l'Express dont j'ai donné l'adresse, sinon je n'aurais meme pas eu vent de ces discussions nouvelles.
Un autre article là-dessus:
http://www.aidh.org/antisem/dieud03e.htm
;)
De ta longue réponse, je retiendrai deux points :
- tu n'as pas répondu à ma question : est ce que ça te plairait si tu le subissais ?
- je trouve que justifier la colonisation par le bordel qui règne en Afrique est très ... léger

L'histoire ne s'arrête pas à l'échelle de l'espérance humaine, la roue tourne ... peut-être seront-nous aussi dans une situation de faibles dans quelques temps historiques (le nous évidemment n'est pas toi et moi mais les génératiosn postérieures). C'est facile de tirer les ficelles tant qu'on a le pouvoir et de dire à l'autre ... sois content avec ce que l'on fait pour toi.


Si non, je suis d'accord avec toi sur un point : les français adorent s'autoflageller. Mais je ne dirai pas qu'il faille faire l'apologie de l'esclavagisme ou de la colonisation pour encourager les français à ne pas s'autoflageller. Il y a bien d'autres sujets pour cela.
domanlai
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Post by domanlai »

michka wrote:Ces derniers temps on a souvent parlé de devoir de mémoire. C'est une expression qui ne me satisfait pas pleinement, car prendre conscience des héritages du passé n'est pas qu'une question de responsabilité, c'est aussi un atout. Toutefois ce ne sont pas tellement les mots choisis qui suscitent mes perplexités, c'est plutôt ce qui semble se cacher derrière eux, et je crains que ce fameux devoir de mémoire ne soit l'un des instruments les plus efficaces de l'oubli. :roll:

Je n'en ferai pas un mystère, j'ai une dent contre les hommes/femmes politiques (ou leurs avocats) qui se mèlent trop d'histoire et qui prétendent l'écrire dans les textes de loi. Est-ce que la France a si besoin de voter une loi admettant que le génocide arménien a eu lieu ? A-t-elle vraiment besoin de programmes scolaires d'histoire qui insistent sur le bon ou mauvais côté de quoi que ce soit, alors que manifestement le Bien et le Mal ne sont pas des cathégories historiques ? On dirait qu'on nous fabrique une histoire officielle, autorisée et non problématique, qui serve de matière à forger la mémoire collective, au détriment de la prise de conscience dont je parlais au début. Rien de nouveau dans cette tendence (fâcheuse), hormis les relais (formidables) dont elle dispose.
le problème est que si, parce qu'on a une dent contre les politiques, on rejette tout, quel espoir d'agir reste-t-il ?
Je pense que le simple fait de s'exprimer sur un sujet consiste à avoir une opinion et donc fait aussi partie de la politique. Si on n'est pas d'accord avec les 'politiciens', on peut exprimer une autre voix. mais finalement on préfère toujours s'arrêter à la critique de ce qui parait mauvais sans proposer d'alternative.

Comme j'ai dit plus haut, l'intérêt de la possible reconnaissance ne s'arrête pas à la loi. C'est au gens de le faire vivre.

Quand tu parles des manuels scolaires, j'ai juste une remarque à faire :
on ne leur demande pas de dire si c'est bien ou pas mais de le dire - sans s'autoflageller et sans se féliciter. Ce sera déjà amplement suffisant.
De manière générale, la plupart des pays expriment haut et fort l'injustice que le voisin ne reconnait pas et passent sous silence ce qui les dérange.

je vais citer un example qui n'est pas brûlant tellement c'est loin (sauf pour la Corse qui a encore des velléités d'autonmie violente : l'histoire de France est très partiale et sutout partielle quant aux faits réels sur l'ensemble du territoire contemporain.
Mais c'est en me posant la question sur ce qu'il se passait dans ma région avant une certaine date et ne trouvant jamais la réponse dans les livres d'historie de France que j'ai remonté le fil. Je ne suis pas pour autant indépendantiste - loin de là - mais ça m'intéresse de le savoir.

En ce qui concerne, la colonisation, si en plus c'est qqch de très bien (d'après Ann), pourquoi ne pas l'inclure dans les manuels : les écoliers savent à peine quel était le territoire de l'empire fraçais du XIX ? là encore, pas besoin de dire si bien ou pas bien, mais de savoir où et comment.

Et pour l'esclavagisme, pareil c'est un fait historique qui doit exister dans les manuels.
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michka
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Post by michka »

domanlai wrote:Quand tu parles des manuels scolaires, j'ai juste une remarque à faire : on ne leur demande pas de dire si c'est bien ou pas mais de le dire - sans s'autoflageller et sans se féliciter. Ce sera déjà amplement suffisant.
Si on ne leur demandait que ça, je n’aurais rien à redire. Si ces « on » sont les politiciens, dans bien des cas ils vont beaucoup plus loin – et pas seulement en France. En Italie une proposition du Conseil Régional du Latium avait déjà déclenché une polémique véhémente en 2000. Une commission d’experts (en quoi ? en histoire ? en pédagogie ?) aurait dû se pencher sur les « lacunes et les reconstructions arbitraires » des manuels, qui ne contribuaient pas assez à « la reconstruction d’une identité nationale commune a tous les citoyens italiens et à l’affirmation d’un sentiment authentique de pacification nationale. » Ça alors, c’est l’hôpital qui se moque de la charité ! :evil: Pendant la campagne électorale les politiques ne se sont guère soucié de la « pacification nationale », mais ils voudraient que les manuels apportent leur contribution. Contribution qui passerait d’ailleurs par l’édulcoration de certains chapitres de notre histoire nationale, notamment ceux consacrés au fascisme. Car là aussi, on n’aurait pas assez insisté sur les fameux « bienfaits ». Mais je vois que là je suis en train de m’embarquer dans un long hors-sujet… :roll:
domanlai wrote:En ce qui concerne, la colonisation, si en plus c'est qqch de très bien (d'après Ann), pourquoi ne pas l'inclure dans les manuels : les écoliers savent à peine quel était le territoire de l'empire fraçais du XIX ? là encore, pas besoin de dire si bien ou pas bien, mais de savoir où et comment.
Moi, ce qui me dérange en effet, c’est qu’on parle de « bienfaits » et des « côtés positifs » (comme si on pouvait mettre tout ça dans un bilan avec les « côté négatifs », en vue d’une réconciliation avec le passé, plus ou moins aisée, en fonction du solde de ce bilan), alors qu’on pourrait simplement parler de faits et présenter leur interprétations.

Pour en revenir à cette commémoration (car il aurait fallu avoir beaucoup de fantaisie pour parler des bienfaits de l’esclavage), je trouve juste qu’elle est dans une mouvance regrettable – celle des « lois historiographiques ». Le choix de la date n’est pas tombé sur le 10 mai par hasard. Ceci dit, je ne conteste pas que malgré ça on puisse en faire quelque chose de bon. Un fait de mémoire collective ne remplace pas une prise de conscience individuelle, mais il ne l’empêche pas non plus. Si, au-delà des motivations et des modes politiques, ce 10 mai a été une occasion pour faire de la bonne information et pour que le gens se documentent sur un thème aussi important que méconnu, ben, pourquoi pas ?
Wir brauchen keinen Appetit, wir haben den Hunger. (Bertolt Brecht)
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