Bonjour,
Je suis en train de lire un bouquin de Yourcenar, et cette fois c'en est trop ! J'avais déjà remarqué dans ses autres livres qu'elle utilisait systématiquement un pronom réfléchi là où j'attends naturellement un pronom à la 3e personne.
Voilà l'exemple que j'ai maintenant sous les yeux :
Miguel y repensait souvent malgré soi [à des racontars].
Moi j'aurais dit malgré lui, et elle me fait toujours le même coup dans tous ses romans. Est-ce là un usage belge, ou tout simplement une déficience de mon côté en français ?
Merci !
Pronom personnel ou réfléchi ?
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- Sisyphe
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Ni vraiment l'un ni vraiment l'autre : c'est un archaïsme, comme Marguerite Yourcenar les aime (et moi avec !).
En français classique, la règle est si je puis dire logique : on utilise le pronom tonique réfléchi quand le pronom renvoie au sujet grammatical, quel que soit son genre, selon l'exemple de Racine (Phèdre, II, 5, 634 sqq.) :
J'ai souvenir d'une prof - que j'aimais bien - qui au téléphone, quand on demandait "allô, Mme Bidule ?" répondait "soi-même".
En français classique, la règle est si je puis dire logique : on utilise le pronom tonique réfléchi quand le pronom renvoie au sujet grammatical, quel que soit son genre, selon l'exemple de Racine (Phèdre, II, 5, 634 sqq.) :
Référent réfléchi donc pronom réfléchi. C'est le français moderne (en gros depuis le 18/19e) qui est illogique, puisqu'il utilise le pronom tonique non-réfléchi avec les sujets animés (ou soit dit autrement : on utilise "soi" avec "on" seulement).
Oui, Prince, je languis, je brûle pour Thésée.
Je l'aime, non point tel que l'ont vu les enfers,
Volage adorateur de mille objets divers,
Qui va du Dieu des morts déshonorer la couche,
Mais fidèle, mais fier, et même un peu farouche,
Charmant, jeune, traînant tous les cœurs après soi,
Tel qu'on dépeint nos Dieux, ou tel que je vous voi.
J'ai souvenir d'une prof - que j'aimais bien - qui au téléphone, quand on demandait "allô, Mme Bidule ?" répondait "soi-même".
La plupart des occasions des troubles du monde sont grammairiennes (Montaigne, II.12)