C'est du latin médiéval...

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fournier
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C'est du latin médiéval...

Post by fournier »

J'écris un roman médiéval qui se passe sur l'ile de Cordouan à l'entrée de la gironde. J'essaie d'être un peu crédible en collectant un max de renseignements. Des moines clunisiens (trois semble-t-il) s'y sont installés en 1088. J'ai trouvé à la Bnf cette charte à propos de leur installation. J'y cherche des renseignements sur la provenance des moines (Sancti Rigaldi ?), et à quoi ressemblait l'ïle à ce moment, les bâtiments, la taille de l'ïle, pas forcement une traduction complète et précise, il y en a deux pages !
En tous cas merci à ceux quiauront la gentillesse de s'y coller, je transpire depuis deux heures sur le dico latin-français de Freelang avec ma fille, mais le latin médiéval c'est plutôt différent semble-t-il...

NOTITIA QUOMODO STEPHANUS, ABBAS, ET ERMENALDUS., PRIOR SANCTI RIGALDI, IN CORDAM INSULAM VENERUNT ET DEINDE CELLAM CONDIDERUNT IN LOCO QUI DICITUR GRAVA, QUAM CLUNIACENSI MONASTERIO SUBDIDERUNT
(Bibl nat. or. 178A; B. h. 707, DCCX 1.)

Notum sit omnibus presentibus atque futuris fidei cultoribus, quod ego Stephanus, abbas Sancti Rigaldi, et frater Ermenaldus, prior ejusdem loci, votiva concordia declinare volentes tumultuosas procellas secularium actionum, Christo presule, devenimus in Corda(2) insulam, a parte occidentali in Oceano sitam. Cumque gratia solitudinis ibi manere vellemus, ipsam insulam juris ecdesie Cluniacensis esse audivimus. Factis itaque litteris, assensum domni Hugonis, abbatis, super hoc quesivimus, et paulo post ipsius litteras melliflua consolatione conditas, cum auctoramento habitandi et edificandi in- fidelitate apostolorum Petri et Pauli et sua suscepimus. Venerat autem ad nos cohabitandi gratia quidam Cluniacensis monachus, nomine Willelmus(3), vir ingeniosus, laboriosus piscandi, acquirendi sollertissimus, in cunctis actionibus accommodatissimus. Ipso itaque retia componente, piscarias construente, qui eo tenus rebus pauperes eramus, Deo multiplicante, exuberare cepimus(4). Audientes itaque homines finitime regionis famam nostre conversationis, optabant perfrui solatio nostre collocutionis. Sed quoniam illuc vix intratur sine metu naufragii, multum timebamus ut aliquis interiret, dum nostri causa tantum periculum subiret. Gratia igitur hec evadendi pericula, monachis ac principibus multa prece suadentibus, haud procul ab ipsa insula inlocum qui dicitur Grava transmigravimus, ibique iliis ad quos pertinebat concedentibus, edificare inchoavimus(5). In primis itaque laici, quorum juris erat ipsa possessio, nobis nostrisque successoribus inde cartam fecerunt, cui propriis manibus signa confirmationis impresserunt. Postea vero ad nos pusiilos est venire dignatus vir venerandus domnus Amatus, Romane sedis legatus, idemque Burdegalensis archiepiscopus(6), qui nobis plurima dignanter indulsit, missam sollemniter cantavit, aquam exorzizavit, cimiterium consecravit, nobiscum manducavit, nummos et quedam alia nobis donavit, ut strenue edificaremus non solum concessit atque laudavit, verum etiam sub-obedientia imperavit. His omnibus interfuit domnus Petrus Burdegalensis ecclesie decanus et archidiaconus, quo rogante, laudante et concedente, domnus Amatus illa complevit(7). Antequam vero oratorium inciperemus, ipse domnus Petrus, et archipresbiter donmus Achelmus, collaudaverunt et loca designaverunt(8). Erant autem hujus operis coadjutores, non solum predictus Willelmus, sed etiam alii monachi cluniacenses. Considerantes itaque nobis multa provenire ipsorum concilio, et ex redditibus supradicte insule, que juris est Cluniacensis ecclesie(9), scientes etiam jam ex longo tempore antequam hue venissemus, quicquid habebamus, quicquid acquisituri vel edificaturi eramus, donmo Hugoni abbati et eccleste Clusiacensi nos concessisse, in eadem sententia permanentes unanimiter concordamus, ut nos et omnia nostra quecumque sunt vel que futura sunt ecclesie Cluniacensi subiciamus et in eorum jus in perpetuum transfundamus. Hoc pariter laudamus, concedimus et confirmamus(10). Si quis autem istam donationem nostrique laboris laudabilem dispositionem infringere vel inquietare presumpserit, angeli percutientis gladio trucidetur, et ab electorum Dei consortio jn perpetuun separetur, nisi resipuerit, et ab hujus dispositionis inquietacione cessaverit. Fiat. Fiat. Amen.
(Au dos :) carta Stephani Senis:de se ipso et de loco Grava ad Cluniacum.
1 La copie de B. s'éloignant considérablement de celle de l'original, que nous publions ici dans le texte, nous donnerons en note les variantes importantes. Mabillon [ Ann. bénéd., t.V, p. 647) a publié, mais non intégralement, une autre version, différente, de cette pièce; elle se rapproche toutefois beaucoup du texte de B.
2 [B. in. Cordam.]
3 [B. ajoute mihi Stephano gerinmas.}
4 [B. centuplo divine promissionis cepimus exhuberare
5 [B. oratarium et officinas pro posse construximus
6 [Aîmé avait été envoyé en France et en Espagne comme légat par Grégoire VII]
7 [B. ajoute : Interfuerunt quoque quidam canonici Burdegalénsis ecclesie.]
8 [B. quibus iterum. collaudantibus et fandamenta, designantibus, hoc oratorium et officinas inchoavimus
9 [B. ajoute : simulque desiderantes monachos regulares in hoc loco nobis succedere.]
10 [La suite manque dans B. qui porte seulement les souscriptions : Signum Stephani abbatis, Signum Ermenaldi]
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Sisyphe
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Post by Sisyphe »

:-o Wouaouh ! C'est du lourd !

:roll: J'ai pas le temps tout de suite, si Tom veut commencer, qu'il le fasse, sinon j'essaierai ce soir.
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arkayn
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Post by arkayn »

Quelques liens et infos :
Histo wrote:Nous apprenons que Cordouan abrita les moines de la Grande Sauvre, venant du monastère de Saint-Nicolas de Royan. Ils s'y fixèrent en 1090 et y construisirent une chapelle au pied du phare, appelé la tour d'Abdérane.
Pointe Medoc wrote:A cette époque, l'île de Cordouan, qui était d'une superficie plus étendue que l'îlot actuel, offrait quelques ressources. Trois moines cisterciens s'y étaient établis en 1088 pour y vivre en ermites et desservir une chapelle très fréquentée, dédiée à la Sainte Vierge.
L'Internaute wrote:Une oeuvre royale
L'histoire de Cordouan remonte au IXème siècle lorsque Charlemagne demande à son fils Louis le Débonnaire de construire une première tour.
Son nom serait la tour d'AbdéraneImage
Source : ENPC

C'est un début. En cherchant un peu, on doit pouvoir trouver mieux ;)
Bon courage pour ton roman
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fournier
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moines sur leur île

Post by fournier »

Sisyphe wrote::-o Wouaouh ! C'est du lourd !

:roll: J'ai pas le temps tout de suite, si Tom veut commencer, qu'il le fasse, sinon j'essaierai ce soir.
Merci et bon courage, mais y'a pas l'feu ! Les infos qui m'interressent concernent surtout l'île par elle-même. Maintenant il n'y en a carrément plus à cet endroit, tout juste un phare. Il semblerait qu'elle se soit également éloignée de la pointe du médoc...
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fournier
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Post by fournier »

arkayn wrote:Quelques liens et infos :
Histo wrote:Nous apprenons que Cordouan abrita les moines de la Grande Sauvre, venant du monastère de Saint-Nicolas de Royan. Ils s'y fixèrent en 1090 et y construisirent une chapelle au pied du phare, appelé la tour d'Abdérane.
Pointe Medoc wrote:A cette époque, l'île de Cordouan, qui était d'une superficie plus étendue que l'îlot actuel, offrait quelques ressources. Trois moines cisterciens s'y étaient établis en 1088 pour y vivre en ermites et desservir une chapelle très fréquentée, dédiée à la Sainte Vierge.
L'Internaute wrote:Une oeuvre royale
L'histoire de Cordouan remonte au IXème siècle lorsque Charlemagne demande à son fils Louis le Débonnaire de construire une première tour.
Son nom serait la tour d'AbdéraneImage
Source : ENPC

C'est un début. En cherchant un peu, on doit pouvoir trouver mieux ;)
Bon courage pour ton roman
Merci. J'avais déjà une bonne part de tes infos exceptée celle du site sur Royan :clap: . T'as trouvé tout ça avec Google ? Si oui, pourquoi il me dit pas tout, à moi ? Sérieux, c'est quoi le mieux ? J'ai essayé un moment altavista, mais bof...
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arkayn
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Post by arkayn »

C'était avec Google. Il faut simplement savoir choisir ses mots clefs.

Le petit truc, c'est "and". Si tu tapes Cordouan monastère par exemple dans un moteur de recherche, tu auras tous les sites parlant de Cordouan et/ou de monastères. Mais si tu tapes Cordouan and monastère il ne te donnera plus que les sites comportant les mots Cordouan et monastère.

De quoi réduire sensiblement le champ de recherche.

J'irai visiter un peu les autres moteurs quand j'aurai un peu de temps.
:hello:
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tom
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Post by tom »

Donc comme vous le proposiez, voici non pas une traduction complète (je n'aurai pas le temps de le faire ces jours-ci), mais un collage des principales informations qui, dans cette charte, concernent l'histoire locale. Si d'autres points vous intéressent, n'hésitez pas, naturellement ! NB : dans le texte qui suit, je ne produis que des informations venues du texte lui-même, sans ajouts ni esprit critique ; mes seules interventions personnelles sont en bleu.

titre : Notice qui indique comment l'abbé Stéphane (ou Etienne, c'est pareil) et le prieur Ermenald (tous deux ont exercé cette fonction à Saint-Rigaud) sont venus sur l'île de Cordouan, puis ont fondé une celle à l'endroit qui s'appelle Grava ; ils ont soumis cette celle au monastère de Cluny.

Dans un premier temps, ils sont venus sur l'île de Cordouan ("située très à l'ouest, dans l'océan"). Ils voulaient y résider parce qu'ils en appréciaient la tranquillité ; ayant appris qu'elle relevait de l'autorité de Cluny, ils ont écrit à l'abbé de celle-ci, Hugues (un des très grands personnages du XIe s.) pour lui demander l'autorisation d'y vivre et d'y construire (l'objet de la construction n'est pas précisé ; mais ça ne peut être qu'un prieuré). La réponse est positive, l'ensemble étant soumis aux apôtres saint Pierre et saint Paul (c'est-à-dire à l'autorité de Cluny). Arrive alors un moine de Cluny, Willelmus (Guillaume, quoi), "homme ingénieux, tenace à la pêche" etc. Sous sa conduite, les deux fondateurs construisent des pêcheries, l'affaire tourne bien. Problème : les habitants de la région entendent parler de cet établissement, veulent bénéficier de la conversation des moines, et du coup, courent le risque d'un naufrage. Ca gêne les moines, qui émigrent alors non loin de cette île, en un lieu appelé Grava, qu'ils achètent aux propriétaires laïcs. Ces derniers signent une charte pour cela. Les moines reçoivent alors la visite du légat du pape, Amatus, ainsi que de l'archevêque de Bordeaux : ce dernier célèbre une messe sur place, exorcise l'eau, consacre le cimetière, mange avec les moines, leur donne les moyens de construire ce qu'ils souhaitent (par des présents et par des instructions à ses subordonnés). Etait présent notamment Pierre, doyen et archidiacre de l'Eglise de Bordeaux, sur la demande duquel s'étaient faites toutes les cérémonies en question (en termes modernes, on dirait que c'est lui le "piston" des moines auprès de l'archevêque de Bordeaux). C'était lui, ainsi que l'archiprêtre Achelme, qui avaient décidé de l'endroit où s'établirait cette nouvelle fondation. Les moines de Cluny étaient également partie prenante. C'est pourquoi les deux fondateurs reconnaissent que toutes leurs possessions appartiennent à Cluny (façon de les rembourser pour l'aide apportée à Grava, tout en reconnaissant que Cluny était à Cordouan avant eux).
La fin du texte consiste en une formule de malédiction à l'encontre de ceux qui voudraient enfreindre les dispositions adoptées ici.

Au dos : charte de Stéphane Senis (ou : Stéphane l'ancien) à propos de lui-même, et de Grava, pour Cluny.
Last edited by tom on 02 Nov 2005 17:29, edited 1 time in total.
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arkayn
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Post by arkayn »

Pas grand chose de plus mais un peu d'histoire
http://membres.lycos.fr/notremedoc/cordouan.htm
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fournier
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Post by fournier »

tom wrote:Donc comme vous le proposiez, voici non pas une traduction complète (je n'aurai pas le temps de le faire ces jours-ci), mais un collage des principales informations qui, dans cette charte, concernent l'histoire locale. Si d'autres points vous intéressent, n'hésitez pas, naturellement ! NB : dans le texte qui suit, je ne produis que des informations venues du texte lui-même, sans ajouts ni esprit critique ; mes seules interventions personnelles sont en bleu.

titre : Notice qui indique comment l'abbé Stéphane (ou Etienne, c'est pareil) et le prieur Ermenald (tous deux ont exercé cette fonction à Saint-Rigaud) sont venus sur l'île de Cordouan, puis ont fondé une celle à l'endroit qui s'appelle Grava ; ils ont soumis cette celle au monastère de Cluny.

Dans un premier temps, ils sont venus sur l'île de Cordouan ("située très à l'ouest, dans l'océan"). Ils voulaient y résider parce qu'ils en appréciaient la tranquillité ; ayant appris qu'elle relevait de l'autorité de Cluny, ils ont écrit à l'abbé de celle-ci, Hugues (un des très grands personnages du XIe s.) pour lui demander l'autorisation d'y vivre et d'y construire (l'objet de la construction n'est pas précisé ; mais ça ne peut être qu'un prieuré). La réponse est positive, l'ensemble étant soumis aux apôtres saint Pierre et saint Paul (c'est-à-dire à l'autorité de Cluny). Arrive alors un moine de Cluny, Willelmus (Guillaume, quoi), "homme ingénieux, tenace à la pêche" etc. Sous sa conduite, les deux fondateurs construisent des pêcheries, l'affaire tourne bien. Problème : les habitants de la région entendent parler de cet établissement, veulent bénéficier de la conversation des moines, et du coup, courent le risque d'un naufrage. Ca gêne les moines, qui émigrent alors non loin de cete île, en un lieu appelé Grava, qu'ils achètent aux propriétaires laïcs. Ces derniers signent une charte pour cela. Les moines reçoivent alors la visite du légat du pape, Amatus, ainsi que de l'archevêque de Bordeaux : ce dernier célèbre une messe sur place, exorcise l'eau, consacre le cimetière, mange avec les moines, leur donne les moyens de construire ce qu'ils souhaitent (par des présents et par des instructions à ses subordonnés). Etait présent notamment Pierre, doyen et archidiacre de l'Eglise de Bordeaux, sur la demande duquel s'étaient faites toutes les cérémonies en question (en termes modernes, on dirait que c'est lui le "piston" des moines auprès de l'archevêque de Bordeaux). C'était lui, ainsi que l'archiprêtre Achelme, qui avaient décidé de l'endroit où s'établirait cette nouvelle fondation. Les moines de Cluny étaient également partie prenante. C'est pourquoi les deux fondateurs reconnaissent que toutes leurs possessions appartiennent à Cluny (façon de les rembourser pour l'aide apportée à Grava, tout en reconnaissant que Cluny était à Cordouan avant eux).
La fin du texte consiste en une formule de malédiction à l'encontre de ceux qui voudraient enfreindre les dispositions adoptées ici.

Au dos : charte de Stéphane Senis (ou : Stéphane l'ancien) à propos de lui-même, et de Grava, pour Cluny.
Quand je pense que j'ai un ordi depuis l'aube de l'humanité (atari 700xl, autant dire ce que la brouette est à la voiture de maintenant ) et que je n'avais encore jamais eu l'idée de risquer un clic de souris sur un forum !
J'essaie de m'appuyer sur un max de faits avérés et ce que vous venez de faire éclaire, précise, voir même fait carrément le ménage dans les infos disparates que j'avais amassées. Par exemple certaines sources sérieuses disent que l'on pouvait se rendre sur l'île en sautant un mince courant d'eau sans trop pouvoir dire quand le rivage s'est éloigné d'elle... C'est peut-être vrai, mais c'était avant alors... Ou au moment des grandes marées... Vous êtes sûr qu'ils ont déménagé parce que les paysans faisaient naufrage en venant les voir ? Si vous voulez savoir la fin de l'histoire, ils se sont donc installés sur la dune face à l'île, presque à la pointe du médoc, non loin de Soulac (4 ou 5 kms) puis en 1193, les bénédictins de l'abbaye de Sainte-Croix de Bordeaux ont fait valoir une vieille Charte pour revendiquer la possession de la paroisse de Soulac et de toute la pointe . Les Clunisiens en furent pour leurs frais et le petit prieuré sur la dune fut abandonné peu après. Des fouilles du début du siècle passé en ont retrouvé les fondations. Votre traduction de la charte de Cluny qui doit être en fait d'un peu après l'installation à la pointe (1092), m'a grandement aidé à comprendre le mécanisme des rivalités entre ordres religieux. Une dernière question : vous dites que l'îlot appartenait à Cluny avant que les moines ne s'y installent ? Mille mercis en tous cas, si le latin de l'époque est autant à géométrie variable que le français vernaculaire médiéval, comment on peut arriver à traduire ça ? Moi qui lis à peine l'anglais... Pff...
Last edited by fournier on 02 Nov 2005 02:32, edited 1 time in total.
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Sisyphe
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Post by Sisyphe »

si le latin de l'époque est autant à géométrie variable que le français vernaculaire médiéval, comment on peut arriver à traduire ça ? Moi qui lis à peine l'anglais... Pff...
:) Non, le latin médiéval est généralement très facile, car les bons moines écrivent sans beaucoup de style, et qui plus est "décalquent" plus ou moins consciemment leur langue maternelle dans cette langue avec laquelle ils ont certes quelque naturel, mais qui n'est pas pour autant à proprement parler une langue vivante. On est loin des fioritures à la Cicéron.

Certes, les bons moines font souvent des fautes (je repère un joli et phonétique "exorzizavit" :) ), ce qui complique la tâche pour un latiniste "classique" dans mon genre. Mais cela n'a rien à voir avec la variabilité de l'ancien français, que je pratique aussi, et qui est effectivement insondable. Le latin au moyen-âge est parlé, mais ceux qui le connaissent l'ont forcément étudié ; alors qu'un poète français écrira le français tel qu'il le parle ou peu s'en faut.

La véritable difficulté pour moi dans ce genre de demande, c'est qu'il y a tout un vocabulaire technique que je ne connais pas, n'étant pas très familier du Moyen-Âge contrairement à Tom.

*

Le résumé de Tom, me semble-t-il, est parfait. :lol: Je pense que vous n'avez pas besoin de la traduction mot à mot ( :) qu'est-ce qu'ils sont bavards les clercs tout de même !
Si quis autem istam donationem nostrique laboris laudabilem dispositionem infringere vel inquietare presumpserit, angeli percutientis gladio trucidetur, et ab electorum Dei consortio jn perpetuun separetur, nisi resipuerit, et ab hujus dispositionis inquietacione cessaverit. Fiat. Fiat. Amen.
Tout ça pour dire : "si quelqu'un n'est pas d'accord, qu'il aille se faire f***" Bon, Ok, là je résume un peu trop là
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latin médiéval

Post by fournier »

Merci aussi pour votre aide. Je vais essayer de ne pas en abuser, bien que la tentation soit grande ! Au fait ça veut dire quoi fiat ?
Fiat. Fiat. Amen
J'avoue que quand on s'intéresse au moyen âge, le latin ça aide... l'occitan aussi d'ailleurs, mais c'est déjà plus facile "à la louche"...
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de quoi perdre son latin !

Post by fournier »

arkayn wrote:Pas grand chose de plus mais un peu d'histoire
http://membres.lycos.fr/notremedoc/cordouan.htm
Extrait de ce site :
" Une tradition néanmoins qui subsiste en Bas-Médoc porte que le local, sur lequel cette Tour est placée, était anciennement si peu séparé du continent, que pour y arriver, il suffisait d'enjamber un très petit courant d'eau ... Il y a d'ailleurs des faits qui viennent à l'appui de cette tradition. Il existait vers le commencement du XIIème siècle une église appelée " de Saint-Nicolas de Grave" située sur l'ancien territoire de la paroisse de Soulac mais beaucoup plus avancés dans le Nord... La passe qui existe maintenant entre l'extrémité Nord du Médoc et la Tour de Cordouan, a été faite par les ravages de la mer au préjudice du terrain dépendant de cette église, puisqu'elle retient encore la dénomination de "Pas de Graves"... "... On trouve dans le recueil de Rymer une charte de Henri IV, Roi d'Angleterre, en date du 8 août mille quatre cent neuf dans laquelle celui-ci déclare que son oncle Edouard, Prince de Galles, avait fait construire, à l'embouchure de la Gironde et dans l'endroit le plus avancé de la mer, une Tour et une chapelle, sous l'invocation de la Sainte Vierge avec des maisons et d'autres édifices pour pouvoir à la conversation des navires..."

Le bon abbé Barrein s'est un peu planté en fait. La charte de Cluny que vient de décrypter Tom montre bien que :
a- Le prieuré de Saint Nicholas de Grave était sur une dune à la pointe et d'ailleurs des fouilles ont retrouvé ses fondations.
b- L'île était déjà à sa place, loin au large de l'embouchure en 1082
c- Par contre elle était plus grande, sans doute ayant été érodée par un changement des courants et des passes, assez grande pour y avoir abrité habitation, chapelle et tour-fanal lorsque le Prince Noir voulu "sécuriser" l'entrée de l'estuaire pour ne pas trop perdre de Claret lors des voyages entre Bordeaux et sa cave !

D'ailleurs le dessin que tu m'as envoyé avec ton premier mail est incomplet. Les vilains petits tricheurs tronquent pour étayer leurs thèses c'est pas trop nouveau ça. Le dessin complet montre avec certitude, car en fait il a été commandé par Sully ce dessin, que l'île était encore bien plus vaste que maintenant (il ne reste plus que la tour de droite réhaussée) au XVII ème . Il est donc tout à fait probable qu'elle ai été carrément accueillante 6 siècles plus tôt quand les trois moines voulurent s'y établir...

Je t'aurais bien envoyé un scan de la photo en question mais je ne retrouve pas le post qui donne l'adresse ou on peut héberger une tite photo et comment on fait ça...

Au fait, y a un forum histoire ici ?
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Post by arkayn »

Il n'y a pas de forum d'histoire ici. Mais tu peux ouvrir des sujets sur le thème si cela t'intéresse, dans bla-bla. Je pense qu'il y aura quelques personnes (dont moi) pour les suivre.

Et quand à mettre une photo sur le forum : http://lokanova.free.fr/upload/. Il suffit de suivre ensuite les instructions.

Fournier wrote:Quand je pense que j'ai un ordi depuis l'aube de l'humanité (atari 700xl, autant dire ce que la brouette est à la voiture de maintenant
Un 800 XL plutôt non ? ;)

Le mien (en réalité un 130 XE), acheté à l'époque est toujours branché. Mais c'est mes enfants qui s'en servent maintenant le plus souvent. Ils le préfèrent largement à un PC.

:hello:
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Post by tom »

fournier wrote: Vous êtes sûr qu'ils ont déménagé parce que les paysans faisaient naufrage en venant les voir ?
La phrase latine dit précisément : " Parce qu'il est difficile d'entrer ici sans redouter un naufrage, nous eûmes peur que quelqu'un ne meure par notre faute" . Rien ne dit donc que ce soit vraiemnt arrivé ; et rien ne dit non plus que cet argument soit la raison réelle du déménagement : pour ce qui est des intérêts locaux des uns et des autres, qui ont pu contribuer à ce déménagement, vous êtes plus expert que moi...
fournier wrote: Une dernière question : vous dites que l'îlot appartenait à Cluny avant que les moines ne s'y installent ?
Oui, la deuxième phrase dit : "comme nous voulions nous installer ici en raison de la solitude, nous avons appris que cette île relevait du droit de Cluny". C'est pourquoi ils écrivent à Hugues.

Votre enthousiasme fait plaisir à voir; bon roman ! :drink:
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Sisyphe
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Re: latin médiéval

Post by Sisyphe »

fournier wrote:Merci aussi pour votre aide. Je vais essayer de ne pas en abuser, bien que la tentation soit grande ! Au fait ça veut dire quoi fiat ?
Fiat. Fiat. Amen
J'avoue que quand on s'intéresse au moyen âge, le latin ça aide... l'occitan aussi d'ailleurs, mais c'est déjà plus facile "à la louche"...
C'est le subjonctif passif du verbe "faire", en gros ça veut dire "Qu'il en soit fait ainsi"

(Au début de la Bible, Dieu - qui parle latin, enfin de temps en temps - dit "fiat lux" = "que la lumière soit").

(si c'est répété, c'est soit que le moine voulait insister, soit tout bêtement qu'il a écrit deux fois le même mot comme ça nous arrive tous à l'écrit)


Promis, si j'ai quinze secondes, je traduis tout, ça me fera de l'exercice.
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