
Nan mais pourquoi vous posez toujours des questions super-passionnantes exactement quand je dois terminer un superméga-article pour une méga-super-revue et que je suis à hypergiga-à la bourre et que je ne dors déjà téraméga-plus et que j'en suis à péta-négliger (péta- = x10E15, si si, vérifiez...) mes yotta-copies ?
Donc, si je suis bien, le latin habere et le gotique hafjan (haban ?), bien que d'écritures très proches et ayant donné dans les langues modernes des verbes au sens et à l'usage identique, n'ont pas la même origine ? Ca paraît bizarre à l'ignare que je suis

)
Ca, c'est une certitude (et au passage, oui got. hafjan = vha haban, mais le gotique n'est pas l'ancêtre de l'allemand évidemment). Pour les raisons qu'a énoncées Elie : ce qui donne un h- en allemand n'est pas ce qui donne un h- en latin.
C'est même un exemple classique de ressemblance intuitive mais erronée. Comme toute science (car c'est une science), la linguistique comparée naît de l'empirisme, mais n'en dérive pas ; ce qu'on tendance à oublier tous les inventeurs de "langue originelle" et autres découvreur pseudochampollionesques des origines de l'étrusque qui rapprochent dix mots dans deux langues lointaines en affirmant qu'ils se ressemblent (à condition de changer 80% des sons...).

L'autre grand classique, c'est "le feu / das Feuer". Rien à voir : le feu < focus, le foyer ; Feuer = grec pyr.
Les questions que je me pose sont donc
1) Ce que j'ai trouvé dans wiki est-il correct ?
Je ne sais pas où tu as trouvé la deuxième étymologie, mais co+apio me paraît un peu grotesque (très XIXe siècle

...). Il existe effectivement un verbe archaïque
apio en latin, à peine attesté sinon dans les glossaires, mais qui donne des mots assez courants comme
rapio,
aptus ou
coepi "je commence", qui se conjugue au passé mais qui a un sens présent, et qui est préciment le composé de co+apio (ou plus exactement d'une forme en -ê- long de la même racine mais ça ne change rien).
Il y a me semble-t-il consensus (le récent
Etymological dictionnary of latin and italic languages s'y tient, et même le très gros, très illisible, très germanique et donc très savant
Lexicon der Indogermanischen Verben) pour faire venir
habeo de l'i.e. gʰh1b(ʰ)- (wiki écrit *gʰabʰ-, c'est déjà une simplification, si tu veux des explications, demande-moi). La racine signifie plutôt "prendre, serrer"...
C'est d'ailleurs le sens profond de "habere" en latin, même classique. Souvenez-vous de vos cours de quatrième : l'expression normale de la possession, en latin, c'est "mihi est equus" "à-moi est un cheval". "habeo librum" c'est "je détiens un livre, je le serre fort contre ma poitrine pour pas qu'on me le vole et c'est le mien qu'il est à moi",

je glose un peu... C'est aussi "considérer qqchose comme" (cf. français "je le tiens pour responsable").
D'ailleurs, contrairement même à ce que j'enseigne à mes élèves (

ah les mensonges pédagogiques...) "habemus papam" ne signifie pas, originellement, "nous avons un pape", mais "nous considérons XYZ comme le pape" (c'est bien ça le problème : qu'on soit tous d'accord

).
*gʰh1bʰ- est très bien attesté en i.e. : haban/hafjan, moyen-gallois "caffael" 'to get', moyen-breton "caffout", etc.
N'en déplaise à Elie, la différence gʰh1bʰ-/kap- a son importance. Un k- initial se maintiendrait en latin, pas un gʰ-. cela étant, à suivre le LIV, c'est un peu le bordel...
1) D'abord, la présence de deux aspirées dans la même racine (les petits ʰ) est gênante. Ce sont les langues italiques qui obligent à poser le second, parce qu'on a un futur "hafiest" en osque (habebit) ; il peut y avoir eu des réfections.
2) L'intérieur de la racine (la laryngale : h1) fait débat... Mais là, il faudrait que j'explique le principe des laryngales et c'est presque du Jean-Sébastien Bach...
2) Si oui, quel est le "degré de certitude" que l'on a sur l'indo-européen (si tant est quel'on puisse le quantifier) ?

Absolument certain... Tant qu'on a pas réussi à prouver le contraire. C'est le principe de "falsification" de toutes les sciences.
Cela, toutefois, à condition de bien comprendre que l'indo-européen
n'est pas une langue, mais un squelette théorique, qui permet d'expliquer rationnellement (au sens profond du terme : presque arithmétiquement) toutes les données attestées.
Le tableau de Mandeleïev m'apprend que le potassium a 19 électrons : personne n'est jamais allé les compter un par un (alors un, deux, trois, quatre... Je recommence, y'en a un qu'a bougé !). Mais je sais, par les propriétés valencielles du potassium, et par l'ensemble du système chimique, qu'il doit y en avoir dix-neuf. Et je sais que l'ununoctium en aurait 118 s'il existait dans la nature, sauf qu'il n'existe pas et qu'on en a jamais synthétisé que trois atomes pendant quelques millisecondes.
La question n'est pas "quel est le degré de certitude de l'indo-européen" mais "quel est le degré de scientificité de ma source" ?

Des fois qu'il y ait des atomes indo-européens d'origine extra-terrestre avec des chasubles pastorales jaunes...
3) Et accessoirement, existe-t-il un site où l'on peut s'initier aux subtilités de la linguistique indo-europenne ?
Y'en a beaucoup de mauvais, laisse-moi le temps de fouiller dans mes favoris...
La plupart des occasions des troubles du monde sont grammairiennes (Montaigne, II.12)