je réveille le sujet meme si je ne suis pas sure qu'il s'agisse d'une faute de dictionnaires mais d'un manque de clarté certainement et qui peut avoir été à la source de ce qui me semble etre une erreur de traduction d'une italophone que je lisais aujourd'hui, j'attends vos avis sur la question
Elle parlaient de débats acrimonieux. Cet adjectif me semble peu utilisé en France mais il me semble plus usité en Italie (italophones help)
dans le bilingue collins, le mot acrimonioso n'apparait pas
dans le garzanti je trouve
acrimonioso agg. acrimonieux*, acerbe: un tono —, un ton acrimonieux; una critica acrimoniosa, une critique acerbe.
le symbole * ne m'est pas clair, mais ils donnent donc acerbe pour les critiques et acrimonieux pour le ton.
"acrimonieux" est sans doute un peu précicieux. Un peu latinisant, dirais-je surtout (l'intraduisible "acer" !). Bref le genre de mots bizarroïdes que j'utilise assez facilement, mais je ne suis pas une référence.
Voici un distinguo de Littré qui t'intéressera peut-être :
ACRIMONIE, ÂCRETÉ. Qualité de ce qui est âcre, mordant, corrosif. Deux différences existent entre ces deux mots. D'abord acrimonie se dit non de ce qui a une saveur âcre, mais de ce qui exerce une action âcre. En second lieu, acrimonie désigne une disposition constante à l'âcreté, tandis que âcreté peut s'appliquer à ce qui se fait sentir actuellement ou vient de se faire sentir. L'âcreté de son humeur peut signifier une âcreté actuelle ; l'acrimonie de son humeur signifie une humeur habituellement âcre. Ces nuances une fois conçues, on sent quand et comment il y aura lieu de distinguer.
De ce fait - et comme j'en avais effectivement le sentiment - je ne dirais pas un "une critique acrimonieuse" : son auteur est peut-être acrimonieux par nature, mais si la critique paraît acre, c'est qu'elle a pour but d'attaquer le film ou le livre qu'elle commente, elle donc, au sens propre, acerbe (Littré : Fig. Sévère et dur. Des paroles acerbes. C'est un homme acerbe. Il m'écrivit sur un ton très acerbe.).
J'ai plus d'hésitation à condamner "un débat acrimonieux" ; au contraire, il me semble idoine : "acerbe" suppose clairement une intention méchante, or le débat par lui-même n'a pas d'intention (les propos qui y sont tenus, oui) ; son ambiance générale trahit une forme d'aigreur, ce que rend bien "acrimonie" ou "âcre", si l'on en croit Emile.
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Sinon, pour continuer dans les erreurs des dictionnaires, je pourrais en référencer des tonnes pour ce qui est des dictionnaires de latin et de grec. Par nature, ce sont souvent de très mauvaises publications.
D'abord, elles sont généralement vieilles. Le dictionnaire d'Anatole Bailly" date de 1899, vaguement corrigé par Louis Séchan (qui au passage était le grand-père du chanteur Renaud). Celui de Félix Gaffiot de 1936. Seul le deuxième a été révisé. C'est pire encore pour les dicos de thème : le Edon (français-latin) et le Feuillet (grec-français) datent du début du XXe siècle ; les hatiers de 1956.
D'abord ces dicos ont été faits par des profs de fac ou de lycée, travailleurs, mais isolés, aidés sans doute par une foule de "petites mains" (étudiants de maîtrise ou de thèse transformés en larbin, genre de chose qui ne se fait plus évidemment), mais sans aucune réflexion de base sur la lexicographie. Rien que la présentation typographique est ahurissante.
On pourrait croire que le fait qu'elles doivent référencer les termes d'une langue morte, donc fatalement d'un corpus clos, rende la tâche plus facile. C'est le contraire : il n'y a aucun moyen de vérifier la véracité d'un terme qu'en notant son existe d'abord, sa fréquence ensuite dans les textes. Or : 1) tous les textes sont loins d'être édités, et c'était encore pire au début du XXe siècle, surtout pour le grec (bien qu'elles aient de moins en moins d'étudiants, les études grecques n'ont jamais été d'aussi bonnes qualité) ; 2) Les textes sont en mauvais était (transmission manuscrite), 3) faires des listes de fréquence, avant l'informatique, relevait du travail de Titan
Ainsi, des erreurs carrément grossières parsèment le Bailly. La plus visible, c'est une foule de référence approximatives, parce qu'Anatole Bailly devait faire ses 6 comme des 0, ses 7 comme des 1 etc. Ca donne des "vers 316" au lieu de "vers 370" par exemple. Même dans le nouveau Gaffiot, on trouve un renvoi à l'article "Lea" (lionne) vers Virgile oùù le mot ne se trouve pas (on n'a en fait "Laeana", qui veut dire aussi lionne). Félix Gaffiot avait dû confondre deux fiches, et les correcteurs modernes ont laissé passer la chose - je m'en suis aperçu en traitant une damande ici même. Il y a aussi un "saltem OU saltim" (variantes orthographique) qui s'est transformé en un "saltemsaltim" qui n'est pas un mot latin, mais on pourrait le croire. Et j'ai failli le croire, j'ai dû aller vérifier dans l'Oxford.
Ensuite, il y a les mots qui n'existent pas. Tel dico de thème donne "parthénometôr" pour traduire "la sainte vierge", alors que ce mot, par sa forme même, est byzantin. Le même donne "mikrophilotimia" pour "vanité", alors que ce terme apparaît
une fois (c'est ce qu'on appelle un "hapax legomenon", ou en abrégé "hapax"), et en plus chez Théophraste d'Ephese, un auteur plus que mineur.
Dans le sens inverse (grec-français), c'est même une science que de faire la chasse aux "mots fantômes", ou
vox nihili (litt. "une voix du rien", c'est joli non ?), et les plus grands hellénistes s'y collent. D'un bouquin de J. Irigoin je tire par exemple que "cotylis" "cavité" n'existe pas, qu'il a été inventé par des commentateurs pour expliquer un autre mot.
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Pour en terminer avec ce chapitre, je viens de prendre Gaffiot en flagrant délit de renvois circulaires : à "jamdiu" il est noté "voir diu", à "Diu" on dit "voir jamdiu" !!
... En fait la réponse se trouve à "jam".