Entre deux pintes de bière, j'ai discuté pendant de longues minutes avec un ami, ce soir, sur deux formules qui sont :
- la plupart
- plus d'un
la plupart a fait / la plupart ont fait
plus d'un est parti / plus d'un sont partis
qu'est-ce qui est correct ?
quelle est la règle (académique, dirons-nous) et quels sont les usages ? de quand datent les éventuelles modifications d'usage ? et les raisons des règles et des usages ? bref, je voudrais tout savoir.
Au sens strict de la grammaire, "la plupart", comme "plus d'un", est singulier. Je ne sais pas en quelle mesure l'usage du pluriel est accepté.
Oralement, pour ma part, je n'utilise jamais l'expression "plus d'un", et je considère généralement "la plupart" comme un pluriel (je me creuse la tête pour trouver un cas où je le verrais spontanément comme un singulier, mais je ne trouve pas).
Ce problème d’accord se présente dans de nombreux cas où le sujet est formé d’un nom et de ce qu’on peut appeler, suivant la terminologie du Bon Usage de Maurice Grevisse, un « pseudo-complément » : l’accord se fait soit avec le nom, soit avec son « pseudo-complément », selon que celui-ci ou celui-là frappe le plus l’esprit, et que l’on considère les êtres ou les objets dont il s’agit ou bien comme formant essentiellement un ensemble, ou bien en détail, dans leur pluralité. Ainsi : Une foule de malades accourait (c’est une foule qui accourt) mais : Une foule de gens diront qu’il n’en est rien (chacun d’eux dira…). Dans ce dernier cas, la subordination logique l’emportant sur la subordination grammaticale, on parlera d’accord par syllepse. Cet accord par syllepse est parfois obligatoire : après nombre, la plupart, quantité, l’accord se fait avec le « pseudo-complément ». Dans le cas d’ensemble, on écrira aussi bien : l’ensemble des intéressés a ou ont protesté.
L’accord dépend du sens des mots, mais aussi de l’intention de l’auteur. On trouvera donc : Un grand nombre de soldats fut tué dans ce combat (Littré) et Un grand nombre de soldats périrent dans ce combat (Académie).
En particulier dans le cas d’un nom numéral au singulier suivi d’un complément au pluriel, l’accord peut se faire avec ce complément ou avec le terme quantitatif quand la personne qui écrit arrête son attention sur celui-ci plutôt que sur son complément. L’Académie admet les deux possibilités : Une quinzaine de francs suffira ou suffiront pour sa dépense.
Je n'ai pas de Grevisse sous la main, mais l'avis de l'Académie signalé par Vikram est à peu près semblable.
Moi j'aurais parlé "d'accord ad sensum" plutôt que de syllepse, et de partitif plutôt que de pseudo-complément, mais ça revient strictement au même (ma terminologie est un peu latiniste).
Alors je vais préciser, maintenant que j'ai vos réponses, le contexte de la discussion.
Mon ami m'avait envoyé un test de langue française qui se trouve sur le site d'une entreprise de correcteurs, pour tester les éventuels candidats à un poste.
Parmi les questions, il y avait :
- la plupart + pluriel ou la plupart + sing.
- plus d'un + pluriel ou plus d'un + sing.
Dans chaque cas, il fallait en choisir un seul sur les deux. L'autre était considéré comme faux.
J'ai eu faux au deux d'après le test, en choisissant la plupart + sing. et plus d'un + pluriel.
Et je disais à mon ami que je contestais la validité même du test, puisque les deux réponses étaient possibles. Mon ami, qui avait conscience que les deux pouvaient être valables, me disait néanmoins que le test consistait à nous faire choisir entre ce qui est une règle académique en déclin et un usage de la langue considéré comme acceptable.
A cela, je répondais la chose suivante : si je suis correcteur, et que je vois dans un texte "la plupart" suivi d'un pluriel, je laisserai passer ; si je le vois avec le singulier, je le laisserai aussi passer. En aucun cas, je ne considèrerai ceci comme une faute.
Une réaction à ce que je raconte ? A propos du test ?