Le poème ci-dessous fut écrit directement en italien par la poétesse Louise Labé (donc vers 1555).
Dans l'édition que je possède (en fait, la seule disponible), une traduction est donnée par l'éditeur, mais en alexandrins rimés - donc avec au moins quelques adaptations.
Ce que je souhaiterais, c'est une traduction littérale, voire mot à mot, afin de rendre un peu plus pertinents mes commentaires.
poème de L. Labé
Non havria Ulysse o qualunqu'altro mai
Più accorto fu, da quel divino aspetto
Pien di gratie, d'honor et di rispetto
Sperato qual i' sento affanni e guai.
Pur, Amour, co i begli occhi tu fatt' hai
Tal piaga dentro al mio innocente petto,
Di cibo et di calor già tuo ricetto,
Che rimedio non v'è si tu n'el dai.
O sorte dura, che mi fa esse quale
Punta d'un Scorpio, et domandar riparo
Contr'el velen' dall'istesso animale.
Chieggo li sol' ancida questa noia
Non esingua el desir a me si caro,
Che mancar non potrà ch'i' non mi muoia.
Traduction-adaptation de F. Rigolot
Si jamais il y eut plus clairvoyant qu'Ulysse
il n'aurait jamais pu prévoir que ce visage
oriné de tant de grâce et si digne d'hommage
devienne l'instrument de mon affreux supplice.
Cependant ces beaux yeux, Amour, ont su ouvrir
dans mon coeur innocent une telle blessure
- dans ce coeur où tu prends chaleur et nourriture -
que tu es bien le seul à pouvoir m'en guérir.
Cruel destin ! Je suis la pointe d'un scorpion,
et ne puis demander un remède au poison
que de cet animal qui a su me piquer.
Je t'en supplie, Amour, cesse de me tourmenter !
Mais n'éteins pas en moi mon plus précieux désir
sinon il me faudra fatalement mourir.
